Mgr Georges Pontier est nommé administrateur apostolique du diocèse de Marseille jusqu’à la prise de possession canonique de son successeur, le 15 septembre à 2019, indique la Conférence des évêques de France (CEF) dans un communiqué.
Ordonné prêtre le 3 novembre 1984 pour l’archidiocèse de Marseille, Jean-Marc Aveline fut professeur de théologie dogmatique, directeur des études au séminaire interdiocésain de Marseille et membre de l’équipe pastorale de la paroisse Saint-Marcel de 1986 à 1991. Il fut ensuite responsable du service diocésain des vocations et délégué diocésain pour les séminaristes jusqu’en 1996. Entre 1992 et 2002 , il fonda et dirigea l’Institut de sciences et théologie des religions (ISTR) de Marseille. Il dirigea également l’Institut Saint-Jean, devenu en 1998 l’Institut Catholique de la Méditerranée, pôle associé à l’Université catholique de Lyon de 1995 à 2013.
Entre 1996 et 2007, Mgr Aveline occupa les fonctions de vicaire épiscopal pour la formation permanente et la recherche universitaire et de membre de l’équipe pastorale de la paroisse Saint-Pierre – Saint-Paul. Il enseigna à la Faculté de théologie de l’Université catholique de Lyon entre 1998 à 2007 avant d’être nommé vicaire général de l’archidiocèse de Marseille.
Nommé évêque auxiliaire de Marseille le 19 décembre 2013, Mgr Aveline fut également consulteur du Conseil Pontifical pour le Dialogue interreligieux de 2008 à 2013 et membre du Comité Études et Projets de la Conférence des évêques de France entre 2016 et 2017. Il est président du Conseil pour les relations interreligieuses et les nouveaux courants religieux de la Conférence des évêques de France depuis 2017. (cath.ch/com/rz)
L’Agence de presse internationale catholique (APIC) avait interviewé Mgr Aveline lors d’un passage à Fribourg en avril 2014. Voici le texte en question:
Mgr Aveline et l’»aventure spirituelle» du dialogue interreligieux
Qu’apporte concrètement cette rencontre avec les tenants d’autres religions?
«Le climat du dialogue, c’est l’amitié», disait encore Paul VI. Comme il faut du temps pour que grandisse l’amitié, il faut aussi du temps pour que s’établisse un dialogue en vérité. Mais lorsqu’on en vient à pouvoir se dire ce qui profondément nous fait vivre, alors on prend conscience de l’immense diversité des chemins par lesquels Dieu rejoint chaque homme en quête de sens.
En échangeant sur les questions existentielles qui marquent nos vies, en découvrant avec respect d’autres manières d’agir et de vivre, d’autres rites et d’autres doctrines, on est conduit inévitablement à rendre compte de ce qui nous fait vivre comme chrétiens, à rendre raison de notre espérance dans un dialogue qui exige à la fois patience et vérité. Souvent, Dieu se révèle dans la rencontre qu’il suscite, comme le disait Michel de Certeau. Quand il repose sur l’amitié, le dialogue peut aussi aborder les questions plus difficiles et appréhender sans peur ni naïveté tout ce qui nous sépare, car ce sera toujours moins important que ce qui nous unit, comme aimait souvent à le rappeler le saint pape Jean Paul II.
Mais comment se positionner face aux valeurs, parfois contradictoires, d’un point de vue chrétien, des autres religions? Comment éviter la dilution de son identité?
Il importe d’avancer en tenant en main la boussole du concile. Dans la déclaration Nostra ætate, les pères conciliaires ont indiqué quelques repères pour tenir à la fois le dialogue et l’annonce, le respect sincère et le témoignage de foi. S’ils enjoignent l’Eglise à ne rien rejeter de ce qui est «vrai et saint» dans les religions, cela veut dire qu’on y trouve certes du vrai et du saint, mais que tout n’y est pas vrai ni saint ! Un discernement s’impose.
J’ajoute que pour avancer spirituellement dans le dialogue interreligieux, il est très important de considérer la relation particulière de la foi chrétienne avec la foi juive. L’identité chrétienne a ceci de particulier qu’elle ne peut être déclinée sans référence à une altérité. La foi chrétienne est greffée, comme le disait saint Paul, sur la foi juive. Et la reliure de nos Bibles comporte l’un et l’autre Testaments.
Enfin, les textes conciliaires disent bien l’importance, dans la foi des chrétiens de la confession selon laquelle « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité » (I Tm 2, 4), mais aussi « qu’il n’y a qu’un seul Médiateur du salut, l’homme Christ Jésus, qui a livré sa vie en rançon pour la multitude » (I Tm 2, 5-6). Ce n’est pas à nous de dire qui est sauvé et qui ne l’est pas : cela, c’est l’affaire de Dieu et il n’a que faire de nos théories ! Mais il nous revient de rendre compte de notre espérance et de témoigner de l’universalité de la volonté salvifique de Dieu et de l’unicité de la médiation du Christ.
Comment se passe concrètement le dialogue religieux dans votre diocèse de Marseille?
Le plus important, ce sont les relations quotidiennes entre les habitants de cette cité très cosmopolite. C’est par les liens de voisinage, les rencontres de la vie ordinaire, que peu à peu une meilleure connaissance des uns et des autres peut faire tomber quelques préjugés et quelques peurs. Souvent, la peur vient de ce qu’on ne se connaît pas.
Ensuite, il y a des relations plus organisées, que le diocèse essaie d’entretenir et de promouvoir, que ce soit avec la communauté juive très nombreuse chez nous, avec les bouddhistes aussi et bien sûr avec les musulmans. Chacune de ces communautés est d’ailleurs très diversifiée. Il y a trois ans, on a lancé un groupe d’échange entre quelques imams et quelques prêtres afin de pouvoir aborder ensemble des questions qui se posent aux uns et aux autres, même si elles sont difficiles et font apparaître des différences assez radicales. Ce groupe nous permet aussi, à nous prêtres, de prendre un peu mieux la mesure de l’angoisse de certaines familles musulmanes devant la puissance de séduction qu’un islam plus radical exerce sur leurs jeunes actuellement, qui sont souvent la proie de réseaux islamistes face auxquelles les parents musulmans peinent à s’opposer.
Nous nous impliquons également dans les initiatives civiles qui vont dans le sens de la cohabitation entre les communautés. La mairie de Marseille a lancé en 1990 l’initiative «Marseille espérance», qui réunit régulièrement les principaux responsables religieux de la ville. La cohésion sociale dans une ville comme Marseille préoccupe beaucoup les pouvoirs publics et il est normal que les chrétiens y apportent une contribution, même si pour nous, le dialogue interreligieux va bien au-delà du simple souci de cohésion sociale.
Parmi les initiatives de l’Eglise catholique à Marseille, il faut bien sûr mentionner la création, en 1992, de l’Institut de sciences et de théologie des religions (ISTR). Son but est de réfléchir aux questions que pose à la foi chrétienne l’expérience de la pluralité religieuse. Marseille, avec sa grande mixité de population, était un endroit tout à fait indiqué pour lancer une telle initiative. Mais vingt ans après, on constate que ces questions intéressent aussi tous ceux qui, croyants ou non, sont confrontés dans leur vie profesionnelle ou sociale à la gestion de la dimension religieuse dans l’espace public.
Avez-vous en mémoire des moments particulièrement forts d’échange interreligieux?
En tant que consulteur au Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, j’ai bien sûr participé à de nombreux colloques interreligieux. Mais ce qui me marque le plus, ce sont les amitiés personnelles, tissées et entretenues depuis des années avec des croyants d’autres religions. Ce sont elles qui, au bout du compte, font avancer les choses, parce qu’elles nous invitent à porter concrètement dans la prière ce dialogue des fidélités à des normes de foi différentes. Et sans doute ne comprendrons-nous que plus tard comment ce dialogue fraternel s’inscrivait, d’une façon que Dieu seul connaît, dans le mystère du dialogue de salut qu’il a voulu instaurer avec l’humanité toute entière.
Une dernière chose : lors de mon ordination épiscopale, il y avait dans l’assemblée des amis de religion musulmane et de religion juive. Dans les jours qui ont suivi, ils m’ont dit les uns et les autres combien ils avaient été saisis et édifiés par une assemblée chrétienne en prière. C’est là que nous nous rejoignons le plus profondément. Il ne faut pas avoir peur, nous chrétiens, de témoigner de notre foi en la force de la prière. Et de confesser avec joie que, comme l’écrivait Jean Paul II, «toute prière authentique est inspirée par l’Esprit Saint».
(apic/rz)
Raphaël Zbinden
Portail catholique suisse
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