Alessandro Gisotti, directeur ad interim du Bureau de presse du Saint-Siège, a rappelé le 18 juillet 2019 la volonté du Saint-Siège de respecter la souveraineté de l’Espagne.
Par ses propos estimant cette exhumation du dictateur fasciste comme un «geste politique», le nonce «a foulé aux pieds» une loi espagnole, ce qui est plutôt inhabituel dans les relations diplomatiques, s’était insurgée la vice-présidente du gouvernement espagnol, Carmen Calvo. Et la dirigeante politique de promettre de protester après ce qu’elle considère comme une «ingérence» dans les affaires internes espagnoles.
Répondant à des questions de journalistes à l’occasion du départ définitif de Mgr Renzo Fratini le 4 juillet 2019 après la conclusion de son mandat, Alessandro Gisotti a souligné que les récentes déclarations du diplomate sur la question de l’exhumation de Franco «ont été exprimées à titre personnel». «Nous rappelons en outre que l’ex-nonce apostolique en Espagne a déjà démenti, par voie de presse, toute intention d’exprimer un jugement politique interne», a-t-il précisé.
La position du Saint-Siège concernant l’exhumation de Franco est «claire et a été déjà exprimée officiellement» dans la lettre que le secrétaire d’Etat le cardinal Pietro Parolin a envoyé au mois de février dernier à Carmen Calvo. Une telle position se base sur le «plein respect» de la souveraineté de l’Etat espagnol, a martelé Alessandro Gisotti.
Depuis son arrivée au pouvoir en juin 2018, le gouvernement socialiste dirigé par Pedro Sánchez souhaite exhumer les restes de l’ancien dictateur espagnol de la basilique de la Valle de los Caídos, où sont aussi enterrés des combattants de la guerre civile espagnole (1936-1939), qu’ils soient nationalistes ou républicains. Sa tombe est un lieu de vénération pour les nostalgiques de la dictature franquiste. Ce sont des prisonniers républicains, travailleurs forcés, qui ont construit le monument de los Caídos, ceux qui sont tombés.
Si le Vatican a déclaré ne pas être concerné par l’affaire, cette volonté rencontre l’opposition du monastère bénédictin lié à la basilique et de la famille de Franco.
Le quotidien espagnol «El Pais» rappelait il y a plusieurs mois que les plans du gouvernement de Madrid pour le transfert de la dépouille du défunt dictateur étaient retardés par l’opposition du très controversé abbé Santiago Cantera Montenegro. L’attitude du prieur du monastère bénédictin, qui gère le mausolée où est enterré Franco, met en danger l’accord Eglise-Etat, estimait le journal.
L’actuel gouvernement espagnol du socialiste Pedro Sánchez veut déplacer la tombe de l’ancien dictateur, afin de faire de la Valle de los Caídos un vrai lieu de réconciliation. De leur côté, les autorités catholiques espagnoles ont déjà fait savoir qu’elles ne s’opposeraient pas à ce transfert, à l’inverse de la famille de Franco.
Dans un entretien paru fin juin, alors représentant du pape en Espagne, Mgr Renzo Fratini avait estimé que ce souhait du gouvernement socialiste avait «ressuscité» l’ancien dictateur. «Se souvenir de quelque chose qui a provoqué une guerre civile n’aide pas à mieux vivre», a-t-il ainsi considéré. Pour lui, les raisons derrière cette exhumation sont «surtout politiques» et sont le fruit d’une «idéologie de quelques-uns qui veulent diviser de nouveau l’Espagne». AH/JB
Le gouvernement espagnol a dit n’être pas surpris par l’attitude de Santiago Cantera, prieur du monastère bénédictin la Valle de los Caídos, car, «avant d’entrer dans l’ordre des bénédictins, il avait été candidat aux élections législatives de 1993 et européennes de 1994 pour le parti de la Phalange espagnole». Ce parti de tendance fasciste fut un des piliers du régime dictatorial de Franco.
La communauté des moines bénédictins de l’Abbaye de la Sainte-Croix de la Vallée de ceux qui sont tombés (Abadía de la Santa Cruz del Valle de Los Caídos), qui compte 23 membres, est profondément divisée. Il y a ceux qui soutiennent le prieur et ceux qui s’opposent à son intransigeance. (cath.ch/imedia/ah/com/be)
Jacques Berset
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