«On a eu plusieurs directeurs et une directrice à Action de Carême, mais ‘un seul’ Ferdinand Luthiger», a confié à cath.ch Charles Ridoré, qui fut secrétaire romand de l’œuvre d’entraide à Lausanne de 1988 à 2007. «Pour le caractériser, je citerai ‘Le Petit Prince’, d’Antoine de Saint-Exupéry: on ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux!»
Pour le Fribourgeois originaire d’Haïti, Ferdinand Luthiger n’était surtout pas un technocrate du développement. «Il avait un 6e sens pour créer le lien, il savait écouter les gens, ses collaborateurs sentaient qu’ils étaient entendus, c’était un animateur qui suscitait la confiance. Son décès et celui de son épouse ont choqué beaucoup de monde… On perd également des amis!»
La centrale de Lucerne, qui lui rend hommage, souligne elle aussi que Ferdinand Luthiger cultivait un style de gestion très coopératif. Il était important pour lui de promouvoir les employés, chacun selon ses forces. Comme directeur, il s’est particulièrement préoccupé de l’identité ecclésiale d’Action de Carême, tout en défendant la nécessaire indépendance de l’œuvre d’entraide vis-à-vis de l’Eglise.
Ferdinand Luthiger, qui est resté engagé jusqu’au bout avec l’œuvre d’entraide, avait fondé à sa retraite le «Cercle des Amis» d’Action de Carême pour maintenir la flamme et les liens d’amitiés entre les anciens collaborateurs. Il organisait deux fois par an des rencontres pour les retraités et était présent à chaque anniversaire et à chaque célébration, accompagné pour la plupart du temps par son épouse Theres Luthiger, qui est restée discrète pendant toute la période où il était directeur, tout en étant elle-même très attachée à Action de Carême.
Mettant en pratique une «vraie charité évangélique», voulant Action de Carême au service de la «défense des pauvres», Ferdinand Luthiger a travaillé en son sein pendant plus de 30 ans, tenant le gouvernail de l’œuvre d’entraide des catholiques suisses pendant onze ans, jusqu’à sa retraite en 1995.
Son mandat a été marqué par le 25e anniversaire d’Action de Carême et la parution du «Manifeste 2000», exposant une vision œcuménique pour le nouveau millénaire, mais aussi par la création de la Communauté de travail des œuvres d’entraide, aujourd’hui rebaptisée Alliance Sud. À la controverse entourant l’engagement politique des œuvres d’entraide, il a apporté une réponse argumentée fondée sur l’éthique sociale à la lumière de l’Évangile. Voyant Action de Carême comme le porte-parole des pauvres, il s’est engagé résolument pour cette cause.
Il avait été engagé à Action de Carême en octobre 1965, d’abord comme employé de commerce. En 1979, il est devenu directeur adjoint. En 1984, le conseil de fondation l’a nommé successeur de Meinrad Hengartner, fondateur et premier directeur d’Action de Carême. En 1995, Ferdinand Luthiger remettait à Anne-Marie Holenstein le «gouvernail du navire Action de Carême».
L’enterrement de Ferdinand Luthiger et de son épouse aura lieu vendredi 12 juillet en l’église St. Anton de Lucerne. (cath.ch/be)
Jacques Berset
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