Préférant répondre aux questions des nonces dans un discours non retransmis, le pape leur a remis une copie de son texte préparé dans lequel il dresse le «décalogue» des attitudes et des comportements que doit adopter un diplomate pontifical.
Un nonce, affirme le successeur de Pierre, doit s’engager à suivre Dieu «en tout et pour tout». Il doit ainsi accepter avec un «esprit généreux» les souffrances dues à sa foi. Le nonce, poursuit-il, ne se laisse pas gagner par les «valeurs mondaines», mais garde à cœur les plus défavorisés, écoutant chacun sans juger. S’il ne suit pas une telle attitude, a mis en garde le pontife, le nonce «se ruine lui-même et les autres, sort de route et abîme l’Eglise».
Pour l’évêque de Rome, le représentant pontifical devient un «mauvais serviteur» quand il traite mal ses collaborateurs et le personnel de la nonciature avec lesquels il doit au contraire être «père et pasteur». Et le pape de poursuivre: «il est laid de voir un nonce qui cherche le luxe, les habits et les objets griffés». Etre homme d’Eglise signifie plutôt avoir l’humilité d’en adopter le visage et de défendre «courageusement» ses enseignements. Cela veut également dire que le nonce doit développer l’amitié avec la communauté locale, car telle est sa famille.
Avant tout, un diplomate pontifical est un annonciateur de la Bonne Nouvelle. Sa principale préoccupation est donc de rendre gloire à Dieu, en évitant la timidité ou la «tiédeur des calculs politiques ou diplomatiques» ainsi que le politiquement correct. Seul le zèle apostolique, soutient le pape, protège du «cancer de la déception».
Dans sa mission de recherche de la communion, le nonce doit rester «impartial et objectif», demande le pontife. Un nonce apostolique qui resterait enfermé dans sa nonciature «trahirait» sa mission de réconciliation, et serait plutôt un «obstacle». En effet, il représente le «visage de catholicité et d’universalité» de l’Eglise auprès des communautés locales.
Il s’agit du ›commandement’ le plus longuement développé par l’évêque de Rome. Chacun, reconnaît-il, peut avoir des réserves ou un manque de sympathie, mais un nonce ne peut être hypocrite, car il est un pont entre le vicaire du Christ et les gens qu’il rencontre. Le nonce doit donc être «disponible et souple, humble, de professionnalisme impeccable» et accepter d’avoir une vie de nomade. D’autant que sa mission est aussi de se rendre là où le pape ne peut le faire.
Il est «incompatible», prévient le pontife, d’être nonce et de «critiquer» le pape derrière son dos, «d’avoir des blogs ou parfois de rejoindre de groupes qui lui sont hostiles, à la Curie et à l’Eglise de Rome». Si le pontife ne cite personne, il s’agit d’une claire référence à Mgr Carlo Maria Viganò, nonce aux Etats-Unis entre 2011 et 2016, auteur de plusieurs pamphlets affirmant que le pape et la Curie étaient au courant depuis plusieurs années des abus sexuels commis par l’ancien cardinal McCarrick.
Si le prélat diplomate doit s’adapter aux exigences, il doit également refuser tant la «rigidité» mentale, spirituelle et humaine que la «souplesse hypocrite du caméléon». Il est plutôt une personne «positivement curieuse, pleine de dynamisme». Face à l’adversité, il ne cède pas à la panique, mais sait y répondre avec sérénité et esprit positif. Cette attitude, détaille le pontife, s’acquiert en se mettant à la suite du Christ et des Apôtres.
Pour le pape François, seule la liberté permet d’obéir réellement et seule l’obéissance à l’Evangile permet d’être pleinement libre. Pour l’évêque de Rome, «l’obéissance à Dieu n’est pas séparable de l’obéissance à l’Eglise et aux supérieurs». Un nonce qui ne vit pas cette vertu est un «contre-témoignage», prévient-il, y compris lorsque cela est contraire à sa propre vision.
Le véritable «bien précieux» des nonces est le Christ qu’ils doivent communiquer, annoncer et aussi représenter, poursuit le pontife argentin en paraphrasant Paul VI (1963-1978). La prière doit donc être leur «nourriture» quotidienne. Sans vie de prière qui illumine tout ce qu’ils font, les représentants pontificaux deviennent de «simples fonctionnaires, toujours mécontents et frustrés».
Pour réaliser sa vocation de «père et pasteur», un diplomate du pape doit se dépenser dans les œuvres de charité, en particulier envers les plus pauvres et les marginalisés. Cette charité, demande le successeur de Pierre, doit être «gratuite», notamment vis-à-vis des cadeaux. Il exige ainsi des nonces qu’ils n’acceptent pas les cadeaux trop coûteux ou qu’ils les donnent aux œuvres caritatives. «Recevoir un cadeau coûteux ne justifie jamais son utilisation».
Pour ce dernier ›commandement’, le pape propose la ›litanie de l’humilité’ écrite par le cardinal Rafael Merry del Val (1865-1930) qui a été nonce et secrétaire d’Etat. Cette prière comporte seize demandes d’être libéré de tentations – les honneurs, la préférence, l’estime ou encore la crainte de l’humiliation – et sept demandes en faveur des autres plutôt que de soi-même. (cath.ch/imedia/xln/rz)
Raphaël Zbinden
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