Mgr Bürcher se voit effectivement comme un «pontifex», un bâtisseur de ponts. Tous placent leur espoir dans le «regard extérieur» de ce Haut-Valaisan de 73 ans, qui fut évêque auxiliaire du diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg (1994-2007) et évêque de Reykjavik, en Islande, de 2007 à 2015, un poste qu’il dut quitter pour raison de santé.
En accueillant cath.ch à l’évêché de Coire, le nouvel Administrateur apostolique se dit confiant: les réactions à sa nomination ont été positives. «La Corporation ecclésiastique de Zurich [connue pour sa distance critique avec Mgr Vitus Huonder, évêque de Coire de 2007 au 20 mai 2019, ndlr] m’a immédiatement tendu la main et s’est dite prête au dialogue!» Lui veut être un facteur d’unité et avant tout éviter la «polarisation» dans un diocèse qui a justement besoin d’unité. «Je veux créer un esprit aussi constructif que possible!»
Selon la procédure propre au diocèse, le successeur de Mgr Huonder sera élu sur une liste de trois candidats, une «terna», qui sera reçue de Rome par les 24 chanoines du Chapitre cathédral de Coire.
Mgr Bürcher, encore peu connu en Suisse alémanique, avait été par contre qualifié d’emblée par le journaliste Michael Meier de conservateur, opposé au système dual (Corporation ecclésiastique et Eglise catholique romaine) en vigueur en Suisse. Et son envoi en Islande était à ses yeux une sorte de «punition pour les évêques difficiles». Mgr Bürcher estime au contraire que cette nomination par le pape Benoît XVI était plutôt une reconnaissance, qualifiant de «dénuées de tout fondement» les supputations du rédacteur du Tages-Anzeiger concernant son hostilité aux Corporations ecclésiastiques. De plus, durant les huit années passées en Islande, Mgr Bürcher a eu «énormément de plaisir» à diriger ce diocèse, ce qu’il a d’ailleurs fait à la satisfaction de tous.
«J’étais à Jérusalem, où, pour des raisons de santé, je passe l’hiver dans la maison où habitent les Légionnaires du Christ, derrière le Notre Dame of Jerusalem Center, en face de la vieille ville. C’est là que le cardinal Ouellet m’a appelé le 4 mai. Le préfet de la Congrégation romaine pour les évêques m’a dit: connaissez-vous le diocèse de Coire? Est-ce que le Saint-Père pourrait vous demander un service, à savoir devenir Administrateur apostolique de ce diocèse?»
Le pape François voulait nommer à ce ministère un évêque qui, à la différence d’un administrateur diocésain – avec des droits et devoirs restreints – a tous les pouvoirs d’un évêque diocésain et dépend directement du pape.
«C’est ma situation et mon mandat», précise Mgr Bürcher, dont la nomination a été rendue publique le 20 mai. Après avoir tenté de faire valoir ses objections et sachant que ce mandat du pape François ne devrait durer que «quelques mois», l’évêque émérite de Reykjavik a accepté dans un esprit de service.
«J’avais souvent entendu parler de la succession de Mgr Vitus Huonder, mais je dois dire honnêtement que je ne m’attendais pas à ce qui m’est arrivé il y a quelques jours, à ce que me demandait le pape François ! C’était une surprise totale pour moi… En tant qu’évêque émérite, c’est-à-dire un évêque à la retraite, avec mes 73 ans, je pensais pouvoir me reposer un peu… Non! Dans son attention bienveillante envers le diocèse de Coire, le pape François en a décidé autrement. Et cela, bien que j’aie été autorisé à lui exprimer toutes mes réserves concernant cette nouvelle mission… Le pape voulait confier cette tâche à un évêque et ce, pour quelques mois seulement. Il me l’a personnellement assuré à plusieurs reprises lors de l’audience privée au Vatican le 11 mai dernier».
Mgr Bürcher souligne qu’il est à Coire directement au nom du pape François. «Je veux écouter et servir. Je ne peux pas et ne veux pas me porter en juge de ce qui a été bien fait ou non dans le diocèse de Coire. Du reste, ce serait bien téméraire après à peine deux semaines de présence!»
Quant à la difficulté certaine de mettre ensemble les différentes cultures, celles des vallées grisonnes ou de Suisse centrale avec les mentalités urbaines, l’Administrateur apostolique est prêt à faire «tout son possible pour le bien tous».
«Le diocèse de Coire, avec ses 700’000 catholiques, comprend les régions les plus diverses: des centres urbains, y compris bien sûr Zurich, mais aussi des zones rurales et diverses régions linguistiques. Dans la belle Engadine, j’ai déjà célébré plusieurs confirmations. Dans la mesure du possible, je voudrais faire connaissance avec le diocèse dans toute sa richesse et sa diversité».
Le nouvel Administrateur apostolique, après avoir consulté le conseil épiscopal, n’a pas voulu effectuer de changements de personnel à l’évêché, n’étant en place que pour une courte période.
Concernant la procédure de nomination du successeur de Mgr Huonder, atteint par la limite d’âge il y a deux ans déjà, Mgr Bürcher estime que le pape François a certainement besoin d’un peu plus de temps pour trouver une bonne solution pour le diocèse de Coire. Quant à lui, il veut avant tout connaître le terrain, et pour paraphraser le pape François, «sentir l’odeur des brebis» qui lui sont confiées.
L’évêque fait en ce moment le maximum de visites pastorales dans les paroisses des 7 cantons du diocèse: Grisons, Glaris, Schwyz, Uri, Nidwald, Obwald et Zurich. Il a déjà célébré des confirmations dans quatre cantons et accompli des visites dans les autres cantons. «J’y ai rencontré beaucoup d’engagement et de bonne volonté!»
Une fois sa mission accomplie, Mgr Bürcher retournera de Coire au Monastère des Dominicaines contemplatives de Sankt Peter am Bach, à Schwyz. Il y est aumônier durant six mois (»Spiritual«, dans le langage ecclésiastique), avant de passer l’hiver à Jérusalem, où il se met à disposition pour des célébrations, des confessions et l’accompagnement de pèlerins en visite en Terre Sainte. (cath.ch/be)
Jacques Berset
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