Des paroles claires, sans faux-semblants. Tout au long de ses méditations des 14 stations du Chemin de croix, Sœur Eugenia interpelle sur le sort de ces «nouveaux crucifiés d’aujourd’hui», ces personnes exploitées et victimes de la traite humaine. Les femmes surtout, qui voient «leur propre corps jeune manipulé, abusé, détruit». Comme cette «mineure au petit corps gracieux, rencontrée une nuit à Rome, que des hommes à bord de voitures luxueuses, exploitaient à tour de rôle». Ce drame de l’exploitation humaine ne se déroule pas à l’autre bout du monde, mais ici.
La religieuse italienne ne se contente pas de dénoncer les bourreaux. «C’est trop facile de condamner des êtres humains et des situations embarrassantes qui humilient notre fausse pudeur, mais il n’est pas si facile d’assumer nos responsabilités», assène-t-elle. «Nous tous, surtout les chrétiens, nous devons grandir dans la conscience que nous sommes tous responsables du problème». Notamment concernant les migrants morts en mer: il y a «des frères qui laissent mourir d’autres frères».
«Seigneur Jésus, rends limpides nos yeux», invite donc à prier Sœur Eugenia, «fais-nous comprendre que nous sommes tous enfants du même Père». Un appel qui concerne en premier lieu les dirigeants, qui doivent se mettre à l›écoute du «cri des pauvres». Et la religieuse de donner la réponse à ces drames: «toujours mettre notre vie au service des autres». «Ce n’est qu’en unissant nos pauvretés qu’elles pourront devenir une grande richesse», exhorte encore l’octogénaire.
«Tant de nouveaux Samaritains du troisième millénaire» agissent déjà ainsi, se réjouit-elle, en se penchant «avec amour et compassion sur les nombreuses blessures physiques et morales». Par exemple, cite Sœur Eugenia, ce groupe de religieuses qui depuis 17 ans visite un centre pour femmes immigrées et sans-papiers. «Que de souffrances nous rencontrons, mais aussi que de joies chez ces femmes se trouvant devant des religieuses provenant de leurs pays, qui parlent leurs langues, qui essuient leurs larmes!»
Le Chemin de croix, rappelle l’Italienne, se conclut au tombeau, dans l’attente de la Résurrection du Seigneur. «Qu’elle soit une lumière d’espérance, (…) afin que tous les fils et les filles de l’homme soient vraiment reconnus dans leur dignité de fils et filles de Dieu et ne soient plus jamais traités comme des esclaves».
Ces méditations et prières de Sœur Eugenia seront lues au cours du Chemin de croix du Vendredi Saint au Colisée, lieu lié aux persécutions contre les chrétiens des premiers siècles. A l’issue de celui-ci, le pape François devrait prononcer une longue prière. Cet événement important de la Semaine Sainte attire chaque année de très nombreux fidèles et pèlerins. Ils étaient ainsi pas moins de 20’000 l’an dernier. (cath.ch/imedia/xln/rz)
Raphaël Zbinden
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