Père Vetö: «Le pape François veut encourager tous les chrétiens à étudier le judaïsme»

Le dialogue judéochrétien est une «question de fond» chez le pape François qui encourage les chrétiens à étudier le judaïsme, a confié, à I.MEDIA le 3 avril 2019, le Père Etienne Vetö, directeur du Centre cardinal Bea pour les études juives.

Ces derniers temps, le pape François s’est particulièrement tourné vers les musulmans (Abou Dabi et Maroc, notamment). Reste-t-il une place dans son esprit et dans sa politique pour le dialogue avec les juifs?
Le pape François considère que l’islam, au niveau du nombre, est évidemment un partenaire important. C’est sûr que cela fait partie de ses centres d’intérêt actuellement. Mais le judaïsme, cela fait très longtemps que cela l’intéresse et que cela fait partie de sa propre recherche. On connaît ainsi son amitié avec le rabbin Abraham Skorka et on sait que dans ses écrits, il y a très souvent des références au judaïsme. Le 28 février dernier par exemple le Souverain pontife a reçu les membres du Centre cardinal Bea en audience privée. Il en a profité pour encourager tous les chrétiens à étudier le judaïsme et tous les étudiants de théologie à avoir un enseignement à deux voix, juifs et chrétiens e nsemble, pour comprendre le christianisme même. De fait, c’est une sorte de question de fond que porte le pape.

Un enjeu est de mieux connaître le judaïsme ainsi que sa propre religion. Un autre enjeu serait de lutter contre l’antisémitisme. L’antisémitisme demeure-t-il un risque aujourd’hui?
Le pape a reçu le 8 mars des membres de l’American Jewish Committee. A cette occasion, il a prononcé un discours extrêmement vibrant contre l’antisémitisme en mettant en garde, ce qui montre bien que cela fait aussi partie des questions actuelles qu’il porte. L’antisémitisme n’est jamais mort, d’autant qu’aujourd’hui, il réapparaît sous une forme masquée avec l’antisionisme. Ainsi, certaines des critiques de la présence juive à Jérusalem et en Israël, sous fond d’antisionisme, sont en réalité de l’antisémitisme. Il y a de l’antisionisme qui est une opinion politique parmi d’autres et à ce titre acceptable, que l’on soit d’accord ou non : tout antisionisme n’est pas forcément de l’antisémitisme . Mais il y a actuellement une manière politiquement correcte d’être antisémite en étant antisioniste. Il faut cependant pouvoir faire la part des choses.

Au cours de son voyage au Maroc, le pape François a signé ‘l’appel de Jérusalem’. Que vous inspire cet événement?
Jérusalem est une ville importante pour les trois religions monothéistes. Evidemment, c’est le centre pour la religion juive. C’est probablement aussi la ville la plus importante pour la religion chrétienne. Et c’est enfin la troisième ville la plus importante pour l’islam. Cela veut dire qu’il est essentiel que les Lieux saints soient ouverts aux fidèles des trois religions. Providentiellement, puisque le nom de Jérusalem signifie ‘ville de la paix’, cette cité peut devenir le lieu de rencontre entre les trois religions. Lieu de tensions mais aussi lieu de réconciliation, espérons-le. (cath.ch/imedia/pad/mp)

Maurice Page

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