Condamné le 7 mars 2019 à 6 mois de prison avec sursis pour non-dénonciation d’agressions sexuelles sur mineurs, le cardinal Barbarin avait annoncé le jour même qu’il se rendrait «dans quelques jours» à Rome pour rencontrer le pape et lui remettre sa démission, malgré sa décision de faire appel. Quelques jours plus tard, son diocèse avait annoncé que la rencontre aurait lieu ce 18 mars 2019 à 10h. Confirmé a posteriori par le Vatican, ce tête-à-tête devrait avoir duré une trentaine de minutes, puisque le pontife avait un autre rendez-vous à 10h30.
Si le Vatican a confirmé cette rencontre, il n’a pas donné plus de détails. Trois possibilités s’offrent désormais au pape François. Tout d’abord, il pourrait accepter la démission du cardinal français. A l’inverse, il pourrait la refuser, notamment le temps que le jugement en appel soit rendu. Troisième possibilité, le pontife pourrait nommer un administrateur apostolique sede plena pour l’archidiocèse de Lyon. Le cardinal Barbarin conserverait alors son titre et son poste, mais serait déchargé de la gestion des affaires courantes de cet important siège épiscopal.
Le tribunal correctionnel de Lyon, en rendant son verdict le 7 mars, l’a déclaré «coupable de non-dénonciation de mauvais traitements» envers un mineur entre 2014 et 2015, dans l’affaire impliquant le prêtre Bernard Preynat. Le cardinal Barbarin n’était pas présent lors de l’annonce du verdict, mais ses avocats avaient aussitôt annoncé qu’ils faisaient appel de cette condamnation.
A l’issue des débats lors du procès au mois de janvier, la procureure n’avait requis aucune peine à l’encontre du Primat des Gaules, ni des cinq anciens membres du diocèse poursuivis avec lui. «La motivation du tribunal ne me convainc pas. Nous allons donc contester cette décision par toutes les voies de droit utile», avait ensuite indiqué Me Jean-Félix Luciani, l’avocat principal du cardinal. Me Luciani avait par ailleurs évoqué la pression médiatique «avec des documentaires, un film» qui ont relaté les abus du Père Preynat et les accusations portant sur le cardinal.
Du côté des victimes du Père Preynat qui avaient lancé le procès contre l’archevêque de Lyon, le président de l’association «La Parole libérée», François Devaux, s’était réjoui du verdict, saluant dans cette condamnation un «grande victoire pour la protection de l’enfance».
Dix victimes du Père Preynat avaient poursuivi le cardinal et son entourage pour ne pas avoir dénoncé le prêtre à la justice et avoir tardé à l’écarter de ses charges pastorales. Aumônier scout dans les années 1970 et 1980 dans la banlieue lyonnaise, le prêtre aurait abusé de plus de 70 jeunes scouts, au sein d’une troupe qui n’était pas affiliée aux mouvements scouts officiels. L’ampleur du scandale a eu une onde de choc bien au-delà du diocèse lyonnais, et a secoué l’Eglise de France.
«Je n’ai jamais cherché à cacher, encore moins à couvrir ces faits horribles», avait déclaré l’archevêque de Lyon dans une déclaration lue lors de la première journée d’audience devant le tribunal correctionnel, le 7 janvier dernier. Le 31 août 2015, le cardinal Barbarin avait démis de ses fonctions le Père Preynat, en accord avec le Vatican. »J’ai fait exactement ce que Rome m’a demandé», avait-il alors affirmé. Il a cependant reconnu avoir été »imprudent» quand il a nommé en 2013 le Père Preynat responsable d’un doyenné près de Roanne. »J’aurais mieux fait de lui dire de rester dans l’ombre», avait-il concédé.
Le cardinal Barbarin est le troisième évêque français à être condamné dans un dossier concernant les abus sexuels sur mineurs. En 2001, Mgr Pierre Pican, l’évêque de Bayeux-Lisieux, avait été condamné à trois mois de prison avec sursis pour non-dénonciation d’atteinte sexuelle sur mineurs. Plus récemment, le 22 novembre 2018, Mgr André Fort, ancien évêque d’Orléans, a été condamné à huit mois de prison avec sursis pour non-dénonciation d’actes pédophiles par le tribunal correctionnel d’Orléans. (cath.ch/imedia/xln/vaticanews/be)
Jacques Berset
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