Dans son discours, le Souverain pontife a évoqué le centenaire de la naissance de la diplomatie moderne multilatérale à travers la création de la Société des nations (SDN) le 28 juin 1919. Bien qu’elle n’ait pas connu le succès escompté, la SDN a tenté de soustraire les relations réciproques a» la logique de l’oppression qui conduit a» la guerre .
Il est important qu’également dans le temps présent, ne diminue pas la volonté d’une confrontation sereine et constructive entre les Etats. Encore aujourd’hui, le succe»s de la diplomatie multilatérale dépend de la bonne volonté et la bonne foi des interlocuteurs et de la disponibilité a» une confrontation loyale, afin d’accepter les inévitables compromis .
En tout lieu, a souligné le pontife, une attention prévenante a poussé l’Eglise à favoriser l’édification de sociétés pacifiques et réconciliées. Pour ce faire, il s’agit de repenser notre destin commun, en basant la diplomatie internationale sur le multilatéralisme, a-t-il considéré.
Les relations au sein de la communauté internationale traversent encore aujourd’hui des moments difficiles , a déploré le pontife, avec la réémergence des tendances nationalistes . Dans cette optique, il s’agit de promouvoir des éléments de contact, en premier lieu le primat de la justice et du droit, comme l’avait tracé Paul VI lors de son discours à l’Assemblée des Nations unies en 1965.
Le droit, comme le respect de la dignité de tout être humain, est pour le pape François la condition indispensable a» toute coexistence réellement pacifique, et à l’obtention de la justice sociale pour nourrir des liens fraternels entre les peuples. Le chef de l’Eglise catholique a ainsi dénoncé la tendance à ne pas recourir aux outils du droit international tels que les tribunaux internationaux. La réapparition aujourd’hui de telles pulsions affaiblit progressivement le syste»me multilatéral, a-t-il estimé, avec le résultat d’un manque de confiance général ainsi que d’une crise de crédibilité de la politique internationale.
Cette attitude à ne pas respecter la justice est le fruit de la réaction des gouvernants devant un mal-être observable parmi les citoyens de nombreux pays . Toutefois, des solutions réactives, émotives et hâtives, a mis en garde le pape, peuvent créer un consensus a» court terme, mais ne contribueront certainement pas a» la solution des proble»mes plus radicaux. Au contraire elles les augmenteront, a-t-il insisté.
Il convient par ailleurs de garantir la défense des plus faibles. Le pape a ainsi salué les opérations humanitaires auprès des populations victimes collatérales des conflits. Avec la collaboration d’autres confessions et des organisations internationales, il a été possible d’intervenir dans les théâtres de guerre en Ukraine. Le pontife s’est ainsi réjoui de la participation active des communautés catholiques d’Europe qui ont répondu a» l’appel du pape de mai 2016 en faveur de ce pays. Dans un tel contexte, les instruments qui garantissent le libre exercice des droits religieux sont importants, a-t-il souligné.
Alors que 2019 marque le 30e anniversaire de l’adoption de la Convention sur les droits de l’enfant, le souverain pontife a évoqué une des plaies de notre temps: les abus sexuels. Il s’agit d’un des crimes les plus vils et les plus néfastes, a-t-il martelé tout en assurant l’engagement de l’Eglise contre ces délits et leur dissimulation. La rencontre de février, a-t-il espéré, permettra de faire une pleine lumière sur ces faits et d’adoucir les blessures des victimes. Le pape a également dénoncé les violences faites aux femmes, appelant à des relations justes et équilibrées.
Comme à son habitude, le pape argentin a consacré une part de son discours aux migrants et aux réfugiés. S’il a salué les efforts de certains pays comme la Colombie, la Jordanie ou le Liban, il a regretté la méfiance et la préoccupation de certains pays européens et nord-américains qui ont limité fortement les flux migratoires. L’évêque de Rome a demandé de faciliter l’intégration sociale des migrants et d’œuvrer pour un droit au retour en sécurité.
En évoquant l’instabilité qui frappe le Proche-Orient depuis de nombreuses années, le pape a estimé extrêmement important que les chrétiens aient une place dans l’avenir de la région. J’encourage ceux qui ont cherché refuge dans d’autres lieux à tout mettre en œuvre pour rentrer chez eux, a-t-il gravement appelé. Et si existe une tentative d’interposer l’inimitié entre chrétiens et musulmans, il a rappelé que les fidèles des deux religions ont pu longtemps vivre ensemble pacifiquement. Le dialogue entre ces deux religions sera d’ailleurs développé par les prochains voyages apostoliques à Abou Dabi (3 au 5 février) et au Maroc (30-31 mars).
Le pape a également dénoncé le marché des armes et une tendance toujours plus répandue à s’armer. Cela est d’autant plus grave, s’est-il inquiété, qu’il y a une recherche de nouvelles armes toujours plus sophistiquées et destructrices. Il a également voulu condamner fermement le recours à la menace nucléaire, mettant notamment en avant le risque d’explosion accidentelle. C’est une logique de peur, a-t-il asséné, qui menace tout le genre humain.
Le pape François a également salué le rôle de la construction européenne pour la paix. Il est selon lui nécessaire de se souvenir de ces bienfaits alors qu’apparaissent de nouvelles forces centrifuges et la tentation de construire de nouveaux rideaux. Il s’agit donc d’une claire allusion au Brexit et à la menace du retour à une frontière physique entre la République d’Irlande et l’Irlande du Nord.
La protection de l’environnement face au changement climatique – un des chevaux de bataille du pontificat – a aussi été mentionnée par le pape. Il a souhaité un engagement plus décidé des Etats pour une collaboration à combattre ce phénomène. Cela est particulièrement urgent, d’autant que les problématiques environnementales ont des retombées sociales et que les catastrophes naturelles causent le désarroi et des souffrances indicibles. (cath.ch/imedia/xln/ah/mp)
Maurice Page
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