L’église des Saints-Martin-et-Sébastien semble avoir fait siennes les vertus de la communauté pour laquelle elle a été construite, la Garde suisse : présente au plus près, mais dans la discrétion. Ainsi, cette petite église jaune se trouve juste à côté du Palais apostolique et dans l’ombre de la basilique Saint-Pierre. Mais pour le pèlerin de passage, elle ne peut être aperçue qu’en levant les yeux au bon endroit, sous la colonnade du Bernin.
Saints-Martin-et-Sébastien tranche pourtant avec sa gigantesque voisine. Le bâtiment est ainsi de dimensions modestes et – mis à part son ton ocre – sa façade est pour le moins sobre. Comme les Gardes suisses, elle semble vouloir manifester sa présence aux côtés des chefs de l’Eglise catholique successifs, sans pour autant attirer à elle les regards.
Le nom de l’église a bien sûr été choisie en fonction de sa communauté bien particulière, les ›gardes du corps’ du Souverain pontife, qu’elle dessert. Saint Sébastien et saint Martin étaient en effet tous deux des militaires. Le premier était ainsi membre de la Garde prétorienne, unité d’élite de l’Empire romain. Mais sa foi catholique déplaisait à l’empereur Dioclétien qui le fit mettre à mort en 288.
Saint Martin de Tours était pour sa part un légionnaire romain, connu pour sa charité. Il est ainsi souvent représenté en train de découper son manteau pour en donner la moitié à un pauvre. Après l’armée, Martin devint ermite puis fut choisi, contre sa volonté, comme évêque de Tours par les habitants en raison de sa grande piété.
Voulue par le saint pape Pie V (1566-1572) pour sa garde rapprochée, Saints-Martin-et-Sébastien est l’œuvre de l’architecte italien Nanni di Baccio Bigio, également à l’origine de la Villa Médicis qui abrite désormais l’Académie de France à Rome. A l’origine, l’intérieur de l’église était recouvert de fresques représentant le Seigneur, saint Martin et saint Sébastien, mais celles-ci ont été retirées dans les années 1967 pour intégrer les collections des musées du Vatican.
L’église Saints-Martin-et-Sébastien est désormais aussi sobre à l’intérieur qu’à l’extérieur. Sa seule véritable particularité est un balcon qui surmonte la nef et d’où une dizaine de personnes peuvent suivre la messe. Loin d’être un inconvénient, cette sobriété est une invitation au recueillement, à quelques mètres du brouhaha de la place Saint-Pierre. Il n’est ainsi pas rare de voir un membre de la Garde suisse venir y prier quelques moments, entre deux services. Peut-être pour y trouver la force spirituelle de tenir de longues heures sans bouger, dans un couloir du Palais apostolique.
Le Père Thomas Widmer, chapelain de la Garde, célèbre la messe à Saints-Martin-et-Sébastien pour ces hommes qui ont promis de défendre la vie du chef de l’Eglise catholique. Y compris au prix de leur vie, comme ce fut le cas pour leurs valeureux prédécesseurs morts en 1527 pour protéger le pape Clément VII (1523-1534) des lansquenets de Charles Quint. Un sacrifice ultime auquel les gardes actuels ont promis de se tenir prêts, si cela s’avérait nécessaire.(cath.ch/imedia/xln/pp)
Pierre Pistoletti
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