Pour que la joie se lève, intime comme le levain fait lever la pâte,
pour qu’elle s’éveille, à l’appel de la prière instante de saint Paul : « soyez toujours dans la joie ! »,
pour la puiser aux sources-mêmes du salut avec le prophète Isaïe
pour qu’elle puisse déployer tous ces parfums comme sous la plume exubérante du prophète Sophonie qui exulte et utilise, en 3 versets, 7 verbes différents pour la chanter!
pour que la joie se lève,
Jean le Baptiste nous attend encore, comme dimanche dernier, au cœur du désert et il nous propose une sorte de chemin vers la joie en 4 étapes.
Chercher l’essentiel
La première étape commence avec une mise en route.
Accepter de changer, accueillir un appel qui nous entraine ailleurs, comme Abraham, le père des croyants. Loin des acquis et des certitudes de toutes sortes, à l’image de ce peuple en attente qui prend la route du désert. Le désert n’est pas un lieu de promenade, mais un lieu d’approfondissement, de simplicité et d’authenticité. Le silence du désert ne permet pas qu’on triche. S’y aventurer, c’est prendre le risque de se retrouver dépouillé, contraints à de nouveaux repères, face à face avec son histoire, la vérité, l’infini. Le désert offre un rendez-vous avec l’essentiel. Accepter de se mettre en route et chercher l’essentiel, c’est ouvrir la porte à la joie !
S’ouvrir à l’inattendu et accueillir ce qui vient
La deuxième étape renvoie au monde. Le désert n’est pas un refuge mais un carrefour. L’expérience solitaire invite à l’expérience solidaire. « Celui qui a deux vêtements – pas 10, mais 2 ! – qu’il partage, celui qui a de quoi manger qu’il fasse de même » L’expérimentation des soifs et de la vie à ras terre conduit à la fraternité, la fraternité conduit à l’empathie et l’empathie conduit à la justice : « n’exigez rien de plus que ce qui vous est fixé »
D’autre part, dans le désert, la découverte de la rareté de la vie donne de la valeur à chaque plante, rend attentif à chaque insecte. L’observation silencieuse et l’émerveillement devant de toute forme de vie, si rare, si précieuse enseigne le respect de la vie et donc la non-violence : « ne faites violence à personne, n’accusez personne à tort ». En faisant l’expérience de la vie au jour le jour, de la manne offerte et du pain quotidien, l’homme du désert s’ouvre à l’inattendu et accueille ce qui vient. « Contentez-vous de votre solde » suggère Jean. La pratique de la justice, la découverte de la simplicité et de la beauté de la vie donnent accès à la joie.
S’enraciner en Christ
Après ces deux premières étapes, praticables par tous les hommes et les femmes de bonne volonté, Jean invite à une troisième qui va encore plus loin et s’inscrit dans le baptême d’eau et d’Esprit : autrement dit dans l’enracinement dans la vie du Christ. Apprendre à le connaître, donner sens à ses paroles, suivre ses traces soigneusement, s’étonner, le contempler, le regarder être avec les autres, observer ses gestes, ses déplacements, l’écouter parler, raconter, interpeler, dénoncer, se taire… se laisser toucher. Le regarder tendre la main, relever, s’arrêter, s’assoir, pleurer, s’indigner… et s’en imprégner ; désirer devenir son disciple, pour lui ressembler toujours mieux et vivre d’Evangile… parce que devenir son disciple donne la joie !
Le feu d’une passion amoureuse
La dernière étape – parce qu’il y en a encore une ! – est celle du baptême par le feu. Qu’est-ce que le baptême de feu ? Il n’est jamais vraiment décrit sinon un peu à la Pentecôte, mais l’évangéliste nous donne une piste : trois éléments du texte d’aujourd’hui apparaissent déjà dans un autre texte de la bible : le désert, les sandales à délier et le feu qui ne s’éteint pas : c’est le récit qui raconte l’expérience de Moïse au buisson ardent. Il est invité à délier ses sandales comme on le fait quand on rentre à la maison, comme on ne le faisait que quand on rentrait à la maison, là où l’on n’a plus besoin de protection ;
Moïse est appelé à l’intérieur pour y vivre une expérience profondément intime. Il découvre la présence de Dieu en lui comme un feu qui brûle et ne mange pas, un feu qui brûle et ne détruit pas, un feu qui brûle et qui envoie et qui donne suffisamment d’élan pour traverser la mer Rouge, suffisamment de force pour porter à bout de bras un peuple, suffisamment de courage pour affronter leurs cris et suffisamment d’humour pour tenir le coup durant 40 années de désert.
Ce feu est celui de la passion amoureuse, le feu des mystiques et de ceux qui aspirent à l’union avec Dieu. Le feu qui brûle le cœur des prophètes et des disciples d’Emmaüs, le feu qui fait dire à sainte Thérèse de Lisieux qu’elle veut aimer l’amour et que l’aimer c’est tout donner. Parce que l’union amoureuse à Dieu est source de la plus grande joie.
3e DIMANCHE DE L’AVENT, de Gaudete, Année C
Lectures bibliques : Sophonie 3, 14-18a; Isaïe 12, 2-3, 4bcd, 5-6; Philippiens 4, 4-7; Luc 3, 10-18