Rapport AED: 60% de la population mondiale privée de liberté religieuse

Le rapport 2018 de l’Aide à l’Eglise en détresse (AED) a été présenté le 22 novembre à St-Gall. Un pays du monde sur cinq ne respecte pas le droit à la liberté religieuse. C’est le triste constat de l’organisation catholique, qui s’alarme notamment contre l’ultranationalisme prôné dans certains Etats.

«Les analyses des 196 pays présentés dans le rapport 2018 montrent qu’une grande partie des hommes et femmes de la planète ne bénéficie toujours pas du droit de liberté religieuse, constate Roberto Simona, responsable d’AED pour la Suisse romande et italienne. Selon nos estimations, 60 % de la population mondiale vit dans des pays où ce droit n’est pas respecté, alors que la situation se dégrade en maints endroits!».

Selon l’AED, la violation de la liberté religieuse peut revêtir différentes formes, sans nécessairement mettre en danger l’existence même d’une communauté de citoyens appartenant à une religion particulière. Dans 38 pays cependant, la violation de la liberté religieuse débouche sur une persécution ou une discrimination systématique de la part de l’État ou de groupes extrémistes envers des citoyens de communautés ou de croyances minoritaires.

Situation détériorée dans certains pays

Dans le précédant rapport, paru en 2016, ces 38 pays étaient déjà classés comme «fortement alarmants». En deux ans, la situation s’est détériorée dans 18 d’entre eux, en particulier en Chine et en Inde, deux des pays les plus peuplés au monde. En Chine, les autorités ont démoli des églises et interdisent aux musulmans ouïghours d’observer le ramadan. Tandis que la persécution continue pour les bouddhistes tibétains, selon le rapport. En Inde, une impunité systématique est constatée vis-à-vis des détracteurs de la liberté religieuse.

La situation s’est également aggravée au Niger et en Somalie, suite à l’essor de l’islamisme radical. Et en Birmanie, accusée en 2017 d’épuration ethnique des musulmans rohingyas par les nationalistes bouddhistes. Une régression est constatée en Algérie, au Kirghizistan et en Russie, ces deux derniers entrant désormais dans la catégorie «discrimination». Pour 18 autres pays, la situation n’a pas changé. Des actes de persécution ou de discrimination continuent, c’est le cas notamment de l’Arabie Saoudite, du Soudan et du Vietnam.

Nationalisme et islamophobie

L’Irak et la Syrie sont les deux seuls pays se caractérisant par un changement positif. «Mais cette progression s’explique plus par la perte d’influence de l’État Islamique que par des décisions ou des actions des gouvernements, qui négligent malheureusement cette question dans leurs tentatives de rétablir la paix et de favoriser le retour des victimes de la guerre», précise Roberto Simona.

Selon les experts du rapport 2018, le phénomène nationaliste et identitaire conduit à une nouvelle détérioration de la situation ces deux dernières années. En Europe, en Amérique et en Australie, où la liberté religieuse est respectée, le rapport rend néanmoins attentif: l’islamophobie et la discrimination envers les citoyens appartenant à d’autres religions sont toujours présentes, liées entre autres à la peur de la crise migratoire.

Dans son rapport 2018, l’AED dénonce une banalisation des atteintes à la liberté religieuse. Et il le rappelle tout spécialement en cette année 2018, où sont célébrés les 70 ans de la Déclaration Universelle des Droits de l’homme. Son article 18 prône la liberté religieuse, un élément fondamental d’un authentique Etat de droit. GR


Les rapports de l’AED

Depuis 1999, l’Aide à l’Église en Détresse (AED) s’engage pour la promotion de la liberté religieuse. Cette fondation internationale de droit pontifical publie tous les deux ans un rapport sur la situation du respect de ce droit dans chaque pays de la planète. Le rapport s’appuie sur l’expérience qu’AED a acquise sur le terrain depuis des décennies. Pour cette 14e édition, elle a travaillé avec l’aide d’une vingtaine de journalistes indépendants.

L’AED opère dans plus de 150 pays, avec une attention particulière aux pays qui vivent le drame de la guerre ou de la détresse. Sa mission est soutenir les chrétiens victimes d’injustices sociales, politiques et économiques, ce qui implique a ses collaborateurs de se rendre dans des régions du monde parfois difficiles d’accès.

L’engagement d’AED inclut la défense et la promotion du droit de liberté religieuse envers toute personne, quelle que soit sa foi, afin qu’elle puisse bénéficier de la liberté de conscience et – selon l’Article 18 de la Déclaration Universelle des Droit de l’Homme – qu’elle puisse pratiquer et manifester publiquement sa religion, et même changer librement de confession. (cath.ch/aed/gr) 

Grégory Roth

Portail catholique suisse

https://www.cath.ch/newsf/rapport-aed-60-de-la-population-mondiale-privee-de-liberte-religieuse/