Beaucoup de chrétiens rwandais, principalement catholiques et protestants, qui représentent 90% de la population, ont protesté face à ces fermetures massives, rapporte le 2 août 2018 l’agence d’information vaticane Fides. Ils estiment que le gouvernement utilise la loi pour justifier la suppression de lieux de culte non désirés. Les églises «sauvages» ont en effet proliféré dans le pays durant les dernières décennies. Le gouvernement du Rwanda voit dans cette mesure radicale une façon de résoudre les problèmes de sécurité, de nuisances et de troubles de l’ordre public que ces établissements génèrent parfois.
Interrogé par Fides, le Père Donald Zagore se demande si le fait de fermer des églises et d’exiger des pasteurs de posséder des diplômes de théologie sont vraiment des solutions adéquates au problème de la religion en Afrique. Le théologien de la Société des missions africaines explique qu’il faut faire attention à l’impact de telles décisions sur la nature fondamentale de la dynamique religieuse. «La religion a un mode de fonctionnement différent d’un parti politique ou d’une association, affirme le prêtre catholique. Vouloir mettre de l’ordre dans un désordre est une chose, mais tuer consciemment ou inconsciemment le caractère prophétique de la religion, qui échappe à toute logique et impératif académique, au nom d’une certaine mécanisation de la sphère religieuse, en vue de sa bonne gestion, en est une autre». Pour le Père Zagore, Dieu appelle à son service des hommes et des femmes pas nécessairement intelligents ou diplômés, mais avant tout convaincus de leur foi.
«La question essentielle est de savoir pourquoi le commerce de la religion est-il si en vogue et rentable en Afrique?», s’interroge-t-il. Le prêtre observe que la population se réfugie en masse derrière les pasteurs à cause d’une certaine désespérance face à la situation politique. Il existe en outre, pour le prêtre, une conception africaine de Dieu et de la religion «qui n’est pas saine et qui mérite d’être purifiée». «Dans la dynamique d’un spiritualisme parfois trop émotionnel, Dieu se retrouve dans le rôle exclusif de faiseur de miracles et de solutions (…) Tant que l’Africain ne prendra pas conscience que tout ne peut pas tomber du ciel, et que Dieu n’est pas un magicien ou un marabout (…) qu’il ne prendra pas conscience que, malgré sa toute-puissance, Dieu ne peut changer la vie des hommes tant que ceux-ci n’y apportent pas leur contribution, ils continueront à vivre et à se nourrir d’idéologies et à se faire continuellement arnaquer». (cath.ch/fides/rz)
Raphaël Zbinden
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