Etabli à Abou Dhabi, dans les Emirats Arabes Unis, le capucin suisse est l’évêque de l’un des plus grands diocèses du monde. Sa juridiction s’étend sur un territoire d’un million de kilomètres carrés, comprenant les Emirats arabes unis, Oman et le Yémen. Le catholicisme, minoritaire, s’y distingue par une grande diversité. En poste dans la région depuis 2004, Mgr Paul Hinder reconnaît qu’il y a «approfondi sa foi». Interrogé par la Luzerner Zeitung [PDF, en allemand] le 27 juillet 2018, il assure que le fait «d’être questionné par un catholicisme culturellement différent» représente «un véritable défi».
«J’ai vécu intensément le Concile Vatican II et son processus d’ouverture», poursuit l’évêque, dans un contexte où beaucoup pensaient que la manière occidentale de vivre sa foi catholique était universelle. «L’expérience d’une Eglise multiculturelle en Arabie m’a ouvert les yeux», confesse-t-il, en soulignant le danger, pour un catholicisme peu disposé à l’ouverture, «de tomber dans une forme de dogmatisme particulier».
Les chrétiens sont considérés comme particulièrement dignes de confiance.
L’évêque capucin évoque également les «deux visages» de la péninsule arabique. «Deux mondes s’y côtoient. D’une part le monde des mégapoles au niveau de vie occidental». Des villes comme «Dubaï, Abu Dhabi, Doha au Qatar, Mascate à Oman ou Riyad en Arabie Saoudite» dont le développement est lié au «boom du pétrole, combiné à de nombreux bouleversements politiques». D’autre part, un monde dans lequel se déploient «des sociétés sont encore fermement traditionnelles, tribales et islamiques. Les liens familiaux y sont extrêmement importants. Une élite locale, souvent minoritaire, y est la seule à détenir le pouvoir politique, garni d’éléments plus ou moins démocratiques, selon les Etats».
Dans ce contexte, la minorité chrétienne y est respectée, assure Mgr Hinder. «Je suis toujours frappé de constater que les chrétiens sont considérés comme particulièrement dignes de confiance et sont donc préférés pour certaines tâches. Il n’est pas rares que ce soit eux qui assurent la gestion financière des émirs ou des cheikhs. Ce n’est pas seulement une question de connaissances professionnelles, selon l’évêque. La fiabilité et l’intégrité des chrétiens sont particulièrement appréciées.»
Ces quinze dernières années, l’évêque reconnaît avoir beaucoup appris sur l’islam, mais n’est pas devenu un spécialiste pour autant. «Je n’ai pas eu le temps et le courage d’étudier le Coran, explique-t-il. Mais j’y cherche des sourates de temps en temps». Sa propre intégration est «un grand défi». «La péninsule arabique m’était très étrangère», reconnaît l’évêque polyglotte, qui a dû se mettre à l’anglais, sa «langue de travail», en l’espace d’un mois, lorsqu’il a appris sa nomination, peu avant Noël 2003. Sur place, le témoignage des fidèles lui a fait prendre conscience du rôle qu’il est appelé à jouer comme évêque: être un soutien pour les différentes communautés catholiques. (cath.ch/lz/pp)
Pierre Pistoletti
Portail catholique suisse
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