Sous le coup d’une mesure d’internement, après avoir purgé une peine pour délits sexuels, un homme enfermé dans la prison intercontonale de Bostalden (Menzingen) a adressé une demande d’assistance au suicide à l’association Exit. L’homme d’une soixantaine d’années motive son choix par «une vie devenue en permanence insupportable», selon le quotidien bernois Der Bund, qui révèle l’affaire.
Exit a informé le détenu que sa demande sera prise au sérieux. Mais son cas comporte des circonstances spéciales qui doivent être analysées. L’association ne souhaite pas pour l’heure en dire davantage. Concernant les demandes d’assistance au suicide émanant des prisons, elle reste vague: «Exit vérifie toujours soigneusement chaque demande d’aide avec les personnes concernées, leurs proches, les médecins qui les traitent et d’autres spécialistes».
Sur son site internet, l’association détaille «les conditions pour faire une demande d’assistance au suicide»: être domicilié en Suisse, avoir son discernement, faire une demande manuscrite, ou encore être atteint de souffrances intolérables.
C’est ce dernier point qu’invoque le prisonnier bernois pour solliciter l’assistance d’Exit, selon le Bund. L’homme y justifie son désir de mourir par le fait qu’il est atteint d’une maladie pulmonaire incurable et une perte disproportionnée de sa qualité de vie, clairement intolérable. Il accuse en outre l’Office de l’exécution judiciaire de «tortures psychologiques». En cause: une interdiction totale de sortie, mise en oeuvre par le canton depuis 2011.
Cette demande appelle un certain nombre de clarifications. «C’est une question complexe qui doit être résolue, reconnaît Laszlo Polgar, chef adjoint du Département pénitentiaire bernois. La loi ne règlemente pas encore ce genre de cas, où des détenus font une demande d’assistance au suicide». Les prisonniers, comme la population suisse, vivent de plus en plus vieux. D’autant que les décisions politiques récentes vont dans le sens d’un «risque zéro» en termes de sécurité. Ce qui signifie, selon Laszlo Polgar, que «les prisonniers restent plus longtemps en détention». Ce genre de demandes pourraient donc augmenter à l’avenir, nécessitant une clarification légale.
Pour le professeur Jonas Weber, qui enseigne le droit pénal à l’Université de Berne, une personne qui subit une mesure d’enfermement devrait avoir les mêmes droits qu’une personne libre en terme d’assistance au suicide. Une telle demande concerne l’intimité du détenu, au même titre qu’une demande de mariage.
Ludwig A. Minelli est le fondateur Dignitas qui, comme Exit, offre une assistance au suicide en Suisse. Selon lui, la demande de ce prisonnier a de bonnes chances d’aboutir étant donné que l’homme n’est plus en train de purger sa peine. Considéré comme dangereux, il reste sous le coup d’une mesure d’internement à durée indéterminée. «Ce danger disparaîtrait si le prisonnier se suicidait», affirme le fondateur de Dignitas.
Pierre Pistoletti
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