Cette demande de classement sans suite constitue un camouflet public pour le commissaire principal de la Police civile d’Anapu. Considéré comme un proche des grands propriétaires terriens de la région, Rilmar Firmino avait en effet affirmé devant les médias, le jour de l’arrestation du prêtre, que la police détenait une vidéo corroborant l’accusation de harcèlement sexuel. Un élément qui n’a apparemment pas convaincu le Ministère public.
Cette absence de preuve renforce également la thèse de nombreuses organisations de défense des droits humains selon laquelle l’arrestation du Père Amaro relève d’une machination. Elle aurait été orchestrée par les propriétaires terriens de la région, dont le prêtre est l’un des pires ennemis, depuis que ce dernier a promis de poursuivre la mission initiée par son amie Sœur Dorothy Stang. La religieuse américaine, qui avait pris fait et cause pour les petits paysans, a été assassinée le 12 février 2005 par des grands propriétaires locaux.
Face aux accusations qui demeurent, en particulier celles d’invasions illégales de terres et d’extorsion de fonds, les soutiens au Père Amaro ne cessent de se multiplier. Le dernier en date est provenu, le 24 avril, de 90 religieux, religieuses de 30 congrégations, ainsi que des laïcs réunis du 20 au 24 avril à Tabatinga, dans l’État d’Amazonas, lors des «Rencontres de congrégations religieuses soutenant des projets dans une perspective pan-amazonienne».
Les participants ont dénoncé «la détention arbitraire et la criminalisation du Père Amaro, victime d’un complot des pouvoirs politiques et économiques». Les signataires du communiqué exigent «la libération immédiate et inconditionnelle du curé d’Anapu, et la fin des persécutions judiciaires dont il est l’objet». Le communiqué demande également aux autorités brésiliennes d’adopter des mesures plus appropriées pour garantir la sécurité et l’intégrité physique et psychologique du Père Amaro, ainsi que celle des défenseurs des droits humains au Brésil.
Ces nouvelles plutôt rassurantes ont été quelque peu ternies par l’absence de réponse sur l’Habeas Corpus (demande de remise en liberté) déposée par les défenseurs du Père Amaro. D’après une source proche de l’enquête, cette absence de réponse serait liée au fait que les propriétaires terriens «trainent les pieds pour venir faire leur déposition à charge contre le religieux». Par crainte, là-aussi, que les accusations ne soient pas étayées par des preuves? En attendant, ce retard a pour conséquence de maintenir le prêtre en détention. «Et on ne peut pas exclure l’idée d’un calcul de la part de ceux qui veulent jeter un doute sur son intégrité, en le laissant le plus de temps possible en prison», soulignent certains. (cath.ch/jcg/rz)
Raphaël Zbinden
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