Le correspondant de la BBC dans le pays a rapporté jeudi 8 février, la disparition d’un pasteur de l’Eglise protestante, le révérend David Ekofo. Selon Radio France internationale (RFI) il a fui le pays pour se réfugier aux Etats-Unis. Méconnu du grand public, il avait récemment tenu des propos critiques contre le régime du président Joseph Kabila, devant des dignitaires du pouvoir, lors d’une messe à la mémoire de feu Laurent Désiré Kabila, père du chef de l’Etat.
Le 3 février dernier, le Père Sébastien Yebo, curé de la paroisse Saint-Robert de la commune de la Nsele, à Kinshasa, a été enlevé dans sa paroisse au petit matin, par des inconnus. Il avait été libéré en fin de journée. Il était le deuxième religieux inquiété en RDC, depuis le début de l’année. Le 22 janvier, l’abbé Robert Masinda, en service à la paroisse de Bingo dans le diocèse de Butembo-Beni, avait été kidnappé avec deux ingénieurs agronomes alors qu’ils rentraient des champs. Ils ont été libérés trois jours plus tard.
Cinq autres religieux catholiques ont été enlevés dans le pays. Il s’agit des abbés Jean-Pierre Akilimani et Charles Kipasa, enlevés le 17 juillet 2017, ainsi que des Pères assomptionnistes Jean-Pierre Ndulani, Edmond Kisughu et Anselme Wasukundi, kidnappés le 19 octobre 2012 dans le territoire de Beni. «A ce jour, nul ne sait où se trouvent ces personnes», rappelait la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), dans une déclaration publiée le 24 janvier 2018.
Dans des témoignages entendus sur RFI, des religieux chrétiens ont exprimé leur sentiment d’insécurité croissant à Kinshasa. Ce climat de peur est monté d’un cran depuis les tentatives de marches d’organisations proches de l’Eglise catholique, le 31 décembre, pour exiger l’application des accords politiques inter-congolais, parrainés par l’Eglise catholique, il y a un an. Ces manifestations avaient été suivies d’une autre, le 21 janvier dernier lors de laquelle les policiers avaient tiré sur la foule.
L’abbé Joseph Bema, curé de la paroisse Saint-Kisito, à Kinshasa, la capitale, a dit avoir été obligé de ramper jusqu’à l’entrée d’une base de la Mission d’observation des nations unies au Congo (MONUSCO) pour fuir les tirs de la police. Depuis, il dort rarement dans sa paroisse. «Je me sens en insécurité. Il y a des visites de personnes non identifiées qui me cherchent. Parfois, ils se trompent d’adresse», a-t-il poursuivi.
Un autre prêtre, l’abbé Placide Okalema avait participé à la manifestation du 21 janvier, a dénoncé, quant à lui, une «persécution» des religieux dans son pays. «On voudrait que les citoyens soient silencieux. Et nous, parce que nous parlons, nous devenons l’objet d’insécurité. Personnellement, je suis menacé», a-t-il dit. Il a ajouté qu’il recevait des appels, des menaces de personnes non identifiées. «Malgré toutes ces menaces, nous n’avons pas peur», a-t-il conclu.
En France, la Fédération protestante de France (FPF) s’est aussi dite préoccupée pour les Eglises chrétiennes en RDC. «Je dis ‘des Eglises’, parce qu’il s’agit de l’ensemble des églises protestantes, mais surtout des églises catholiques du pays», a déclaré le révérend François Clavairoly, président de la FPF. «Tout le monde est concerné dans ce pays, c’est un ensemble. Nous sommes- là, attentifs à cette question et nous essaierons de manifester notre solidarité dans la mesure du possible», a-t-il indiqué.
Par ailleurs, le gouvernement congolais, sous la houlette de la ministre des Droits humains a mis en place une commission d’enquête mixte. Elle est composée de six membres, représentants, entre autres, de l’Etat, de la société civile et de l’Union africaine. Elle est chargée d’enquêter sur la violation des droits de l’homme lors marches du Comité laïc de coordination (CLC) des 31 décembre et 21 janvier. (cath.ch/ibc/bh)
Bernard Hallet
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