La messe en l’honneur d’Horthy était prévue samedi 27 janvier 2018, jour du 73e anniversaire de la libération du camp de concentration d’Auschwitz-Birkenau. C’est la date choisie par l’ONU pour la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste.
Rendre, justement à cette date, un hommage à cette figure du nationalisme hongrois, qui a prêté la main à la déportation des juifs de Hongrie en 1944, a été largement ressenti comme une véritable provocation.
Près d’un demi-million de juifs hongrois ont été déportés et exterminés dans les camps nazis, lors d’un génocide qui a fait disparaître 70% de la communauté juive hongroise d’avant-guerre.
Le Père Zoltan Osztie, ancien président de l’Association des Intellectuels Chrétiens et curé de l’église de l’Assomption, dans le centre-ville de la capitale hongroise, a prétendu que les organisateurs ne s’étaient pas rendu compte que la messe spéciale d’anniversaire pour les 150 ans de la naissance de Horthy tombait le même jour que la Journée internationale de commémoration de l’Holocauste. En réalité, Horthy, qui fut régent du royaume de Hongrie entre 1920 et 1944, est né le 18 juin 1868 à Kenderes, dans la Grande Plaine septentrionale de Hongrie.
Mazsihisz, la principale organisation juive hongroise, avait d’emblée dénoncé «un outrage à la mémoire de toutes les victimes hongroises», relevant qu’il s’agissait d’une pure provocation, Miklos Horthy étant né en juin et non en janvier. Des organisations juives, notamment le Congrès juif mondial (CJM), qui représente les communautés et organisations juives dans 100 pays à travers le monde, avaient également vivement réagi dès le 25 janvier.
Le CJM s’est particulièrement élevé contre le fait que le vice-président du Parlement hongrois, Sandor Lezsak, membre de Fidesz-Union civique hongroise (Fidesz-MPSz), le parti du Premier ministre conservateur Viktor Orban, devait prononcer une allocution à l’occasion de cette messe. Une façon d’apporter un soutien officiel à la démarche.
Les milieux juifs et démocrates de Hongrie déplorent le fait que les partis de droite et d’extrême-droite cherchent, dans une tentative révisionniste, à réécrire l’histoire de la Hongrie à l’époque de l’alliance de Horthy avec l’Allemagne nazie. Ce révisionnisme s’inscrit dans un mouvement de réhabilitation de l’amiral Horthy, entrepris depuis la chute du communisme en 1989.
Le parti conservateur de Viktor Orban, le Fidesz, actuellement au pouvoir en Hongrie, cautionne lui aussi les commémorations locales en l’honneur de l’amiral Horthy, personnalité également très populaire au sein du parti d’extrême droite hongrois Jobbik. Viktor Orban a déjà qualifié Horthy d'»homme d’Etat exceptionnel», tout en affirmant que son gouvernement menait «une politique de tolérance zéro envers l’antisémitisme».
En novembre 2013, des manifestants antifascistes portant des étoiles jaunes avaient protesté lors de l’inauguration à Budapest d’une statue de l’amiral Miklos Horthy, qui avait dès 1920, décrété l’instauration pour les juifs d’un numerus clausus dans les universités. Les lois antisémites allaient être renforcées en 1938, limitant les droits civiques et les libertés des juifs. Celles de 1941 étaient calquées sur celles de Nuremberg, interdisant les mariages entre juifs et non-juifs, l’accès des juifs à la fonction publique et instaurant des quotas pour d’autres professions. Le travail forcé fut introduit dès 1939 après l’interdiction pour les juifs de servir dans les forces armées. Les forces de police et l’administration hongroises ont prêté main forte aux nazis lors des grandes déportations d’avril à juillet 1944. (cath.ch/cjm/com/be)
Jacques Berset
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