Elle mérite un petit commentaire cette série, puisqu’elle en suscités quelques-uns: courriers de lecteurs interrogateurs, énervés, indignés voire extrémistes, commentaires lapidaires et tranchants sur les réseaux sociaux. Les retours parvenus à nos rédactions respectives questionnent la pertinence de ces articles publiés «en pleine semaine pour l’unité» et fustigent parfois même la place accordée à l’autre confession.
Sur nos plateformes – cath.ch et réformés.ch – la question œcuménique est souvent abordée à travers une lorgnette positive. L’accent est mis sur des initiatives généreuses, qui tentent de dépasser les clivages, quitte à éviter les questions qui fâchent. Cette fois-ci, nous avons choisi d’emprunter à la disputatio médiévale pour construire cette série de débats. Un brin polémique? Nous l’assumons volontiers. Nécessaire? La question est ouverte.
Nous croyons malgré tout à la pertinence de notre démarche
On peut certes discuter de la forme: «les argumentaires des chroniqueurs sont trop courts» ou encore «les titres des disputes sont vraiment très réducteurs», nous a-t-on par exemple reproché. Mais sur le fond, de nombreuses réactions montrent que la culture du dialogue a encore du chemin à faire de part et d’autre des frontières confessionnelles. Une fois le «dogme» posé, quelle place laisser à l’autre? A son point de vue divergeant? Peut-on le remettre en question? Et surtout, peut-on esquiver toutes les tentatives qui visent à saper le dialogue à la racine – des plus grossières aux plus subtiles. Autre écueil auquel nous avons dû faire face, certains des théologiens contactés ne voulaient tout simplement pas battre le fer: «organiser une dispute la semaine de prière pour l’unité des chrétiens est contre-productif», nous ont rétorqué en substance certaines personnes contactées. D’autres, engagés dans le dialogue oecuménique, ont pu voir d’un mauvais oeil un dossier qui met l’accent sur ce qui clive au détriment de ce qui rapproche.
Nous croyons malgré tout à la pertinence de notre démarche, au moins pour deux bonnes raisons. Tout d’abord parce que le dialogue œcuménique entre catholiques et protestants ne peut faire l’économie des questions difficiles, de l’intercession des saints à l’ordination des femmes, en passant par l’intercommunion ou l’infaillibilité pontificale. A moins de viser une unité au rabais. Ces difficultés peuvent feinter d’être ignorées. Elles resurgiront toujours.
Mais il y a plus fondamental encore. Ouvrir le débat et prendre au sérieux les considérations de l’autre, l’écouter et se laisser déranger par sa vision des choses: autant d’attitudes qui pourraient – qui sait? – relativiser un peu nos propres points de vue. N’est-ce pas la condition sine qua non du dialogue œcuménique?
Pierre Pistoletti et Guillaume Henchoz | 24.01.2018
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