Le régime en place a un objectif clair: il cherche à empêcher son influence dans le pays «non pas en interdisant le culte, mais en faisant cesser ses activités sociales». Depuis 1995, explique le Père Mussie Zerai, selon la loi en vigueur dans le pays, c’est l’Etat qui concentre entre ses mains l’ensemble des activités sociales. «Ces dernières ne peuvent donc être menées par des institutions privées, ni par des organisations religieuses. Jusqu’ici, la norme a été appliquée de manière légère et n’a pas sérieusement remis en question le réseau de services offerts par les chrétiens et les musulmans. Cependant, on a noté une accélération de la pression au cours de ces derniers mois».
Les fonctionnaires ont décrété la fermeture de cinq cliniques catholiques présentes dans différentes villes. A Asmara, le Petit séminaire – qui servait tant le diocèse que les congrégations religieuses – a été fermé.
Différentes écoles de l’Eglise orthodoxe et d’organisations musulmanes ont également dû fermer leurs portes. La fermeture d’un institut islamique, à la fin d’octobre dernier, ont suscité de dures protestations chez les étudiants, qui ont été réprimées dans le sang.
«Au-delà du préjudice économique causé à chacune des confessions religieuses, poursuit le Père Zerai, c’est la population qui est pénalisée le plus fortement, ne disposant plus de structures sérieuses et efficaces auxquelles s’adresser».
A Dekemhare, à une trentaine de kilomètres au sud-est d’Asmara, ainsi qu’à Mendefera, à une cinquantaine de kilomètres au sud de la capitale, les autorités ont interdit l’activité des centres médicaux catholiques en affirmant qu’ils faisaient double emploi avec ceux de l’Etat.
«En réalité, note le prêtre, les structures publiques ne fonctionnent pas. Elles ne disposent pas de médicaments, ne peuvent opérer par manque d’appareillages adaptés et souvent elles sont même privées d’énergie électrique».
Se rebeller contre cette situation n’est pas facile, remarque Mussie Zerai. La révolte des musulmans a été réprimée par les armes et elle a causé de nombreux morts et blessés. Le mois dernier, 7’000 jeunes conscrits se sont unis et ont, ensemble, demandé à rencontrer le président Issayas Afewerki. Ils voulaient dénoncer des vexations de la part de leurs officiers.
Le président les a reçus et écoutés. Au terme de l’audience, les jeunes ont été emmenés dans un camp proche de Nakfa et, par punition, laissés en plein air, sous le soleil, avec très peu de nourriture et d’eau. Beaucoup ont dépéri et sont tombés malades. Après les protestations de leurs parents, le régime a déclaré qu’il les renverra dans les casernes pour finir leur service militaire. (cath.ch/fides/be)
Jacques Berset
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