Mgr Georges Pontier, archevêque de Marseille et président de la CEF, Mgr Georges Colomb, évêque de La Rochelle et Saintes, et Mgr Denis Jachiet, évêque auxiliaire de Paris, tous deux membres de la Commission épiscopale pour la pastorale des migrants, rappellent les incitations du pape François, qui a fait de la question migratoire «un marqueur fort de son pontificat». Dans son message pour cette journée, intitulé «Accueillir, protéger, promouvoir et intégrer les migrants et les réfugiés», le pontife exprime sa «préoccupation spéciale concernant la triste situation de nombreux migrants et réfugiés qui fuient les guerres, les persécutions, les catastrophes naturelles et la pauvreté».
Dans leur document intitulé «Migrants: trouver une réponse commune», les prélats français attirent l’attention sur les milliers de déplacés qui ont trouvé la mort sur la périlleuse route de l’exil. C’est pour eux «un scandale auquel personne ne peut se résigner». Et d’insister: «Les personnes contraintes de fuir leur pays ont le droit de requérir une protection sans qu’il leur faille pour cela ajouter aux risques initiaux ceux d’un parcours incertain. Le leur permettre est pour notre société un impératif, tant légal que civilisationnel !»
Les évêques relèvent qu’avec d’autres, l’Eglise catholique s’engage déjà sur ce chemin. En mars dernier, la CEF, en partenariat avec le Secours catholique, la Fédération protestante de France (FPF), la Fédération d’Entraide Protestante et la communauté de Sant’Egidio, signait avec l’Etat un protocole portant sur la mise en place de «couloirs humanitaires». Ces mesures permettent à 500 personnes parmi les plus vulnérables, actuellement réfugiées au Liban, de venir en France pour y demander l’asile.
S’il demeure modeste, ce programme basé sur les couloirs humanitaires «n’en est pas moins précieux», estiment les évêques, qui plaident en faveur de la mise en place de voies d’accès légales et sûres. Une solution, face à la crainte sécuritaire que beaucoup expriment devant la situation migratoire actuelle, qui apparaît «d’autant plus souhaitable qu’elle permet précisément d’organiser l’accueil et, ce faisant, de concilier la sécurité de nos concitoyens et celle de personnes en quête de protection».
Mais les évêques ne se font pas d’illusions: «le développement de voies légales ne tarira pas l’arrivée spontanée d’exilés vers la France et plus largement vers l’Europe ! Les chemins qu’ils prennent et prendront seront encore dangereux et éprouvants, et leur besoin d’accueil et de protection nous obligeront, demain comme aujourd’hui. Dans ce contexte, l’existence de voies d’accès légales et sûres ne doit en aucun cas être utilisée comme prétexte pour renvoyer ces exilés vers les pays de transit qu’ils ont traversés. A cet égard les projets européens visant à donner corps à la notion de pays tiers sûrs nous préoccupent».
La CEF reconnaît qu’il n’y a pas d’accueil véritable sans accompagnement du chemin d’intégration. «A la suite du pape François, nous pensons ainsi que les dispositifs publics d’accueil des réfugiés peuvent être complétés par le développement de programmes de parrainage par des collectifs citoyens. Par leur caractère diffus, de tels programmes offrent aux nouveaux arrivants la possibilité d’une réelle intégration sociale, laquelle fait souvent défaut dans les dispositifs d’accueil où les arrivants sont regroupés entre eux».
Les évêques saluent l’engagement de tous les citoyens, chrétiens ou non, qui s’investissent au sein de collectifs d’accueil. «Tout en rappelant à l’Etat ses obligations en matière d’accueil, nous demandons aux chrétiens d’accroître leur engagement en ce sens et, au-delà du soutien administratif, de l’enseignement du français ou encore de l’insertion professionnelle, nous les invitons à se positionner plus spécifiquement sur le créneau de la convivialité afin de donner corps à la valeur de la fraternité».
La CEF se préoccupe particulièrement de la situation des jeunes migrants, notamment des mineurs non accompagnés dont le nombre, en France, ne cesse de croître. «De diocèses toujours plus nombreux nous parviennent des cris d’alarme quant à la situation de ces jeunes, laissés le plus souvent sans protection, et, pour certains, renvoyés à la frontière, au mépris de leurs droits les plus élémentaires».
La situation dans les territoires frontaliers, notamment celle de nombreux mineurs tentant d’entrer seuls en France par la montagne, apparait particulièrement préoccupante aux yeux de la CEF. «Parmi eux, trop sont interceptés et renvoyés en Italie, sans qu’il leur soit possible de faire respecter leurs droits».
Rappelant qu’un mineur non accompagné est un mineur en danger, les évêques encouragent les nombreux citoyens, parmi lesquels des chrétiens, qui s’engagent individuellement ou collectivement pour aider ces jeunes à obtenir la protection à laquelle ils aspirent et à laquelle ils ont droit. Ils demandent également une «action résolue de l’Etat en faveur de l’insertion professionnelle» des requérants d’asile.
«Nous demandons ainsi aux responsables politiques d’accorder aux personnes, ce dès les premiers mois de la phase de demande d’asile, la possibilité de travailler. De la même manière, l’accès aux études et à la formation professionnelle doit être effectivement ouvert aux personnes se trouvant en cours de procédure. Plus généralement, la reconnaissance des compétences des migrants doit être promue et, si cela s’avère nécessaire, des éléments de remise à niveau doivent pouvoir leur être proposés».
La CEF se dit encore vivement préoccupée par les poursuites pénales dont certaines personnes faisant preuve de solidarité à l’égard des migrants font l’objet. «Nous invitons les responsables politiques à tout mettre en œuvre pour faire cesser cette pénalisation de la solidarité». De son côté, le Père Carlos Caetano, responsable de la pastorale des migrants au sein de la CEF, a déclaré le 10 janvier 2018 que plus de 3’000 réfugiés ont été accueillis dans les diocèses français depuis l’appel lancé par le pape en septembre 2015. Il a demandé que les centres d’hébergement d’urgence, de même que les écoles, les hôpitaux ou encore les lieux de culte, soient «sanctuarisés». Il réagissait à une circulaire ministérielle permettant le recensement des migrants qui s’y trouvent. (cath.ch/cef/com/be)
En 1914, le pape Benoit XV instituait une Journée mondiale du migrant et du réfugié
Jacques Berset
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