En février 1985, le Pérou accueille pour la première fois un pape. Cette visite apostolique a lieu quelques mois seulement mois après la condamnation par la Congrégation pour la doctrine de la foi des «risques de déviation» de la théologie de la libération, dont le clergé péruvien est à l’origine.
Née dans les années 1960, cette théologie visait à rendre dignité et espoir aux pauvres et aux exclus. Si le Vatican a estimé louables les efforts de cette théologie, il a mis en garde contre une possible dérive marxisante et une mise au second plan de l’évangélisation.
Devant les évêques du pays, Jean Paul II appelle ainsi à ne pas «faillir dans le difficile effort de montrer et suivre le Christ avec cohérence». Il faut «une claire identité évangélique, évitant de tomber dans quelques raccourcis», leur lance-t-il. Il salue ainsi «le louable effort de clarification» de ces prélats sur la théologie de la libération.
Cette visite apostolique est également marquée par le terrorisme de l’organisation maoïste du Sentier lumineux. A Ayacucho, quatrième ville visitée, le pontife est bloqué pendant une heure sur les pistes de l’aéroport, pour raisons de sécurité. «Grave est la responsabilité des idéologies qui proclament la haine, la rancœur et le ressentiment comme moteurs de l’histoire», déclare-t-il dans un appel aux groupes armés à suivre plutôt la voie du dialogue.
Le pape polonais se rend en outre à Iquitos, une localité dans le nord du pays et en pleine forêt amazonienne. Il y est reçu par 500 chefs indiens en grande tenue de fête. Son successeur argentin se rendra lui aussi à la rencontre des peuples d’Amazonie, mais dans le sud du pays. De même, Jean Paul II a couronné une statue de la Vierge à Cuzco, ce que François fera à Trujillo.
Autre similitude: en 1985, le pape polonais s’est recueilli dans la cathédrale de Lima devant les reliques des saints péruviens, sainte Rose de Lima, saint Martin de Porrès, saint Jean Macias et saint Thuribe de Mogrovejo. Le pape actuel fera de même le 21 janvier.
Deux ans plus tard, en visite au Chili du 1er au 6 avril 1987, Jean Paul II est accueilli par le chef de l’Etat Augusto Pinochet, dont il avait lui-même qualifié le régime de «dictature transitoire». Ce voyage relativement long est marqué par les manifestations d’opposition au gouvernement. Le 3 avril, alors que le pape célèbre la messe de canonisation de la première sainte chilienne, la situation explose et des affrontements font plus de 600 blessés.
Visitant huit villes, le pape polonais quadrille le pays, se rendant même dans une des villes les plus méridionales de la planète, Punta Arenas. Au nord, il visite les villes d’Iquique et d’Antofagasta. Ces étapes, loin de l’agitation de la capitale Santiago, se déroulent sans heurt et dans la liesse.
Là encore, le voyage du pape François offre plusieurs ressemblances avec celui de Jean Paul II. Le pape polonais l’aura précédé dans les trois villes au programme de cette nouvelle visite. A Santiago, le pontife argentin célébrera comme son prédécesseur polonais au parc O’Higgins. De même, l’Université pontificale de Santiago accueillera sa seconde visite papale.
A Antofagasta en 1987, Jean Paul II s’était rendu dans une prison. François suivra son exemple en visitant la prison pour femmes de Santiago le 16 janvier. Le pape polonais avait rendu hommage à la Vierge du Carmel, patronne du Chili, en la couronnant dans le sanctuaire de Maipú. Son successeur fera de même, mais à Iquique.
En mai 1988, Jean Paul II retourne au Pérou. Ce bref voyage d’une quarantaine d’heures est prévu essentiellement pour participer au congrès eucharistique et marial de six pays de la région. Cette seconde visite intervient après l’encyclique Sollicitudo Rei Socialis (1987) dans laquelle le pontife rappelle la position de 1984 sur la théologie de la libération. Mais aussi que «l’aspiration à la libération par rapport à toute forme d’esclavage, pour l’homme et pour la société, est quelque chose de noble et de valable».
Au cours de cette seconde visite, le pape consacre le pays à Marie, Notre-Dame de l’évangélisation. La terre glorieuse du Pérou, déclare alors le pontife, marquée par les saints, est «affligée par la violence et la mort, (…) par des idéologies qui tentent de vider de sens sa foi chrétienne». A cette occasion, il offre une rose d’or à la cathédrale de Lima, honneur rare et réservé au Souverain pontife.
Dans la lignée de cette prière, le Pérou s’est consacré en 2016 aux Sacrés Cœurs de Jésus et Marie. (cath.ch/imedia/mp)
Maurice Page
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