Plus de 10’000 femmes ont été assassinées de 2012 à 2015 au Mexique, soit sept par jour, selon le Système national d’information sanitaire (Sinais). Dans ce pays ultraviolent où on dénombre en moyenne 50 à 60 meurtres quotidiens, les cas de féminicides sont désormais évoqués dans les médias. Mais un chiffre ne fait toujours pas la ‘une’ des journaux: c’est celui de l’assassinat des prêtres et agents pastoraux.
La mort du cardinal Juan Jesus Posadas Ocampo, archevêque de Guadalajara, tué le 24 mai 1993 sur le tarmac de l’aéroport de la ville, a certes été médiatisée. Mais durant la période de 1990 à 2017, 47 prêtres, un diacre, 4 religieux, 9 laïcs au service de l’Eglise et une journaliste catholique ont été victimes – pour la plupart – du crime organisé. Ces meurtres méthodiques sont souvent banalisés, traités comme des faits divers, voire présentés comme des règlements de compte ou résultant d’affaires de mœurs.
Ces meurtres méthodiques sont souvent banalisés
Ces chiffres m’ont été fournis ce mois de décembre à Mexico par un religieux pauliste, le Père Sergio Omar Sotelo Aguilar, directeur du Centro Catolico Multimedial (CCM). Selon lui, les assassins suivent une méthodologie qui va de la diffamation à l’extorsion, du séquestre à la torture, de l’enlèvement à l’assassinat.
La mise en cause publique des serviteurs de l’Eglise, dans les médias de certains Etats mexicains, où le gouvernement et son administration sont particulièrement corrompus, vise à les fragiliser ou à les forcer à se taire. Mais certains, comme Mgr Ramon Castro y Castro, évêque de Cuernavaca, persécuté par le gouverneur de l’Etat de Morelos, Graco Ramirez, ne veulent pas courber l’échine.
Recevant à l’évêché de Cuernavaca une délégation internationale de l’œuvre d’entraide catholique Aide à l’Eglise en Détresse (AED/ACN), il nous a confié recevoir de nombreuses menaces: «On a saboté les pneus de ma voiture, il y a une année et demie. C’était un avertissement. Je suis la cible de diffamations, de calomnies, pour tenter de ruiner ma réputation, mais les fidèles ont compris, ils ne sont pas dupes!»
L’Eglise, quand elle défend la conception chrétienne de la famille ou dénonce la corruption omniprésente ou encore la pauvreté qui touche la moitié de la population tandis qu’une «élite» vit dans l’opulence, devient une cible toute désignée. Elle est accusée de faire de la politique – un reproche fatal dans un pays marqué par un anticléricalisme institutionnel – alors qu’elle ne fait que suivre ce que demande le pape François. «Je ne fais que mon travail pastoral, défendre la dignité humaine, en suivant la doctrine sociale de l’Eglise», nous confie Mgr Ramon Castro y Castro. Pour les politiciens corrompus et le crime organisé (c’est souvent la même chose au Mexique), c’est déjà trop! Jacques Berset | 21 décembre 2017
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