Le pape François, justifiant sa demande d’une évolution du CEC sur la question de la peine de mort, a attaqué cette mesure avec des mots très forts: «mesure inhumaine qui humilie», «remède extrême et inhumain», «contraire à l’Evangile en elle-même», «inadmissible car [portant] atteinte à l’inviolabilité de la personne humaine».
La Parole de Dieu, a expliqué le pape argentin, est «une réalité dynamique, toujours vivante» qui ne peut être «conservée dans de la naphtaline». Aussi faut-il éviter une lecture rigide et immuable de la doctrine «qui humilie[rait] l’action du Saint Esprit». Au contraire, la doctrine est amenée à progresser, avec «l’évolution de conscience du peuple de Dieu».
C’est ainsi que le pape François a justifié sa demande de changer ce que dit le Catéchisme sur la question de la peine de mort.
Pour l’évêque de Rome, la peine de mort doit être rejetée car elle supprime «une vie humaine qui est toujours sacrée aux yeux du Créateur». De plus, elle empêche la possibilité d’un «rachat moral et existentiel». Ainsi, la peine capitale «oublie le primat de la miséricorde sur la justice».
En effet, a affirmé le pontife, cette mesure relève d’une «mentalité plus légaliste que chrétienne». Y compris lorsqu’elle était appliquée dans les territoires des Etats pontificaux. Et demander son interdiction n’est pas une contradiction avec l’enseignement passé de l’Eglise, a souligné le pape, car la dignité de la personne humaine de sa conception à sa fin naturelle a toujours été enseignée par le magistère.
Les prédécesseurs du pape François s’étaient en effet opposés à la peine de mort, sans pour autant proposer d’inscrire cette opposition dans le CEC. Le 12 décembre 1999, Jean Paul II (1978-2005) avait lancé un «appel à tous les responsables afin que l’on parvienne à un consensus sur l’abolition de la peine de mort». C’est un châtiment «cruel et inutile», avait-il expliqué le 27 janvier 1999. En 2011, Benoît XVI (2005-2013) avec lui aussi appelé à la concertation de tous pour «arriver à l’élimination de la peine capitale».
Le Catéchisme lui-même a évolué sur cette question. En 1992, le paragraphe 2266 du CEC déclarait que les autorités d’un pays devaient préserver le bien commun par des mesures proportionnées, «sans exclure dans des cas d’une extrême gravité la peine de mort». Puis les éditions ultérieures du CEC ont spécifié que les «cas d’absolue nécessité» justifiant la peine capitale «sont désormais très rares, sinon même pratiquement inexistants».
Une position également exprimée clairement dans le Youcat, l’édition du catéchisme destinée aux jeunes publiée en 2011. La question 381 est ainsi rédigée «Pourquoi l’Eglise est-elle contre la peine de mort ?»
Avant ce discours, le pape François s’était déjà résolument positionné contre la peine de mort à plusieurs reprises. Par exemple dans un message vidéo du 21 juin 2016 où il déclarait cette peine «inadmissible», ajoutant qu’elle «ne rend pas justice aux victimes, mais alimente la vengeance». «Le commandement ›Tu ne tueras pas’ a une valeur absolue et inclut aussi bien l’innocent que le coupable», justifiait-il.
Signe de l’importance du discours de l’évêque de Rome, de nombreux prélats étaient présents dans la nouvelle salle du Synode pour l’écouter. Parmi eux, une dizaine de cardinaux, dont au premier rang les cardinaux Tarcisio Bertone, ancien secrétaire d’Etat, et Gerhard Müller, préfet émérite de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Egalement dans l’assistance, de nombreux prêtres et des ambassadeurs près le Saint-Siège.
Depuis sa première publication en 1992, le CEC a été traduit en 48 langues, a par ailleurs souligné Mgr Rino Fisichella, président du Conseil pontifical pour la promotion de la nouvelle évangélisation. Sa promulgation le 11 octobre 1992 a eu lieu 30 ans jour pour jour après l’ouverture du Concile Vatican II. Depuis le Concile de Trente, les conciles sont traditionnellement suivis de la publication d’un catéchisme. Pour Vatican II, il avait fallu attendre le pontificat de Jean Paul II. (cath.ch/imedia/xln/be)
Jacques Berset
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