Le glas a sonné pendant 5 minutes le 14 septembre à 20h à travers l’archidiocèse de Manille. Dans une lettre pastorale publiée le 8 septembre, le cardinal Luis Antonio Tagle, archevêque de Manille, demandait de faire sonner ‘la cloche des morts’ à l’intention des victimes de la politique antidrogue du président de la République Rodrigo Duterte. Selon la police elle-même, depuis juillet 2016, 3’800 toxicomanes ou trafiquants présumés ont été exécutés, rapporte l’agence d’information Eglises d’Asie.
«Nous ne pouvons permettre que la destruction de vies devienne normale. Nous ne pouvons pas gouverner la nation en tuant»dénonce le cardinal Tagle.
L’archevêque de Manille n’est ni le premier ni le seul à faire sonner le glas: depuis la mi-août, les évêques des Philippines sont nombreux à avoir pris cette décision.
Le premier d’entre eux est sans doute Mgr Pablo Virgilio David, évêque de Caloocan. Dans son diocèse se trouve la ville de Bulacain où, le 15 août dernier, les opérations anti-drogue ont fait 32 victimes en un seul jour. Pour le président Duterte, «ce qui s’est passé à Bulacain est une bonne chose. Si nous pouvons tuer 32 personnes tous les jours, alors peut-être pourrons-nous réduire ce qui nuit à ce pays».
Mais parmi les victimes figurent notamment Kian delos Santos, un lycéen de 17 ans. Selon le rapport de police, le jeune homme aurait été abattu après avoir ouvert le feu sur les forces de l’ordre. Des vidéos de surveillance contredisent cette version des faits et montrent l’adolescent être emmené par les forces de police. Les policiers mis en cause ont depuis été suspendus et font l’objet de poursuites judiciaires pour homicide. Plusieurs autres adolescents auraient été victimes de forces de l’ordre, comme le dénonce Human Rights Watch.
Suite à ce drame, l’évêque de Caloocan, décidé de faire sonner le glas dans son diocèse, chaque soir, à 20h, pendant dix minutes,
De son côté, Mgr Mgr Socrates Villegas, archevêque de Lingayen-Dagupan et président de la conférence épiscopale des Philippines (CBCP) a annoncé que, dans son archevêché, à compter du 17 août, le glas retentira pendant 15 minutes, pour rendre hommage aux victimes de la guerre anti-drogue et appeler à arrêter de soutenir les exécutions. Plusieurs autres évêques ont fait de même.
Ce n’est pas la première fois que l’Eglise catholique manifeste publiquement son opposition à la politique antidrogue du président Duterte. Ce dernier reste cependant très populaire dans l’archipel et semble bien décidé à faire taire les voix dissidentes. Dans le projet de budget pour 2018, le parlement a accordé un budget de 1000 pesos philippins, soit 16 euros, à la Commission des droits de l’homme. Selon l’article 13 de la Constitution des Philippines, cette commission, indépendante est chargée d’enquêter sur toute forme d’atteinte aux droits de l’homme. En 2017, son budget était de 749 millions de pesos. (cath.ch/eda/mp)
Maurice Page
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