Jaroslaw Kaczynski, président du parti conservateur polonais, Droit et Justice (PiS) avait évoqué fin juillet une somme de 840 milliards de dollars que l’Allemagne devrait encore verser à la Pologne en réparation des crimes de l’occupation nazie.
Le 7 septembre, Beata Szydlo, la première ministre polonaise, issue du même parti, a estimé sur une radio privée que son pays avait droit à des réparations. Elle a précisé néanmoins que la décision politique d’en demander n’avait pas encore été prise, la question étant simplement étudiée par le Parlement, rapporte le quotidien français La Croix.
Les évêques polonais, membres du comité épiscopal chargé des relations avec leurs homologues allemands, ont immédiatement riposté en publiant une lettre de mise en garde au gouvernement. Ils s’inquiètent du risque de détériorer la réconciliation polono-allemande par des décisions irréfléchies et des déclarations prononcées hâtivement. Selon eux, les questions bilatérales encore non résolues doivent l’être par le biais de la diplomatie pour ne pas annihiler la confiance difficilement acquise.
Mgr Ludwig Schick, archevêque de Bamberg et président du groupe germano-polonais au sein de l’épiscopat allemand, a lui aussi réagi le 11 septembre, dans un communiqué. En tant qu’Eglise catholique en Pologne et en Allemagne, notre tâche depuis des décennies est de contribuer à la réconciliation et à la paix entre les deux pays, rappelle Mgr Schick. «Nous avons donc le devoir et le droit de souligner que ces réalisations ne doivent pas être compromises, mais qu’elles doivent être poursuivies.»
Les conférences épiscopales d’Allemagne et de Pologne travaillent depuis 1995 dans un groupe de contact qui, outre des questions ecclésiales, s’occupe de la réconciliation germano-polonaise.
Dès 1953, le gouvernement communiste polonais avait refusé les dédommagements proposés par l’Allemagne, invoquant «sa reprise économique comme intérêt préalable à son développement pacifique», indique La Croix.
Le 18 novembre 1965, en plein Concile Vatican II, des évêques polonais, dont le futur pape Jean-Paul II, ouvraient la voie au pardon avec leurs homologues ouest-allemands dans une célèbre lettre invitant «au dialogue, à la réconciliation et à la fraternité», et se concluant ainsi: «Nous vous pardonnons et demandons pardon».
En 1991, un an après la réunification allemande, Varsovie et Berlin signèrent un traité de bon voisinage prévoyant le versement de 500 millions de DM à la Fondation pour la réconciliation germano-polonaise. Tous les gouvernements polonais depuis 1991 ont jusqu’ici jugé le dossier clos.
Ce débat rouvert par les conservateurs du PiS est également régulièrement alimenté par certains historiens qui estiment que la Pologne – alors sous le joug communiste – ne jouissait pas de sa pleine souveraineté lors de la renonciation aux indemnités en 1953. (cath.ch/cx/mp)
Maurice Page
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