Malgré la discrétion des Evangiles, les premiers chrétiens n’ont pas mis longtemps à réfléchir à la place de Marie dans leur foi, explique pour la CEF le Père eudiste Laurent de Villeroché, de la Congrégation de Jésus et Marie. Ils ont rapidement voulu célébrer ses derniers moments, comme ils le faisaient pour honorer leurs saints. A cause du caractère unique de sa coopération, une croyance se répand: son «endormissement» – sa Dormition – consiste en réalité en son élévation, corps et âme, au ciel par Dieu.
La fête exprime cette croyance: chaque 15 août, les chrétiens célèbrent à la fois la mort, la résurrection, l’entrée au paradis et le couronnement de la Vierge Marie.
En 1950, le pape Pie XII estime utile de proposer une définition plus précise: «La Vierge immaculée, préservée par Dieu de toute atteinte de la faute originelle, ayant accompli le cours de sa vie terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire du ciel, et exaltée par le Seigneur comme la Reine de l’univers, pour être ainsi plus entièrement conforme à son Fils, Seigneur des seigneurs, victorieux du péché et de la mort». La définition fait partie des dogmes de l’Eglise.
On associe souvent l’Assomption de Marie avec l’Ascension du Christ. De fait, les mots se ressemblent et il y a dans les deux cas une montée mystérieuse au ciel dans la gloire de Dieu.
Pourtant, «assomption» ne vient pas du verbe latin «ascendere» (monter, s’élever), qui a donné «Ascension», mais d’»assumere» (assumer, enlever). L’étymologie souligne l’initiative divine: Marie ne s’élève pas toute seule vers le ciel, c’est Dieu qui fait le choix de l’»assumer», corps et âme, en la réunissant à son Fils sans attendre la résurrection finale, tant elle a su s’unir, corps et âme, à Lui, dès sa vie terrestre.
Dans le sillage de l’Ascension, Marie inaugure le destin ouvert aux hommes par la résurrection de son Fils et anticipe ce qui deviendra la condition des sauvés à la fin des temps.
La liturgie de l’Assomption célèbre Marie comme la «transfigurée»: elle est auprès de Lui avec son corps glorieux et pas seulement avec son âme. En elle, le Christ confirme sa propre victoire sur la mort.
Marie réalise ainsi le but pour lequel Dieu a créé et sauvé les hommes. En la fêtant, les croyants contemplent le gage de leur propre destin, s’ils font le choix de s’unir à leur tour au Christ.
Cette contemplation renforce enfin la confiance dans l’intercession de Marie: la voilà toute disponible pour «guider et soutenir l’espérance de ton peuple qui est encore en chemin». Ils aiment alors demander à Dieu: «Fais que, nous demeurions attentifs aux choses d’en-haut pour obtenir de partager sa gloire».
Mgr Michel Dubost, évêque émérite du diocèse d’Evry-Corbeil-Essonnes, rappelle que l’Assomption, une fête née dans la nuit des temps en Orient, s’est rapidement propagée. Sa célébration universelle a une influence décisive sur la définition de l’Assomption comme dogme de la foi par Pie XII (Munificentissimus Deus – 1er novembre 1950).
Cette fête est née à Jérusalem, mais il est difficile de savoir à quelle époque. L’origine précise de la fête du 15 août tient peut-être à la consécration à cette date, par l’évêque Juvénal (422 – 458) d’une église dédiée à Marie à Kathisma (étape supposée de la Vierge entre Nazareth et Bethléem). Elle a plus probablement pour origine la consécration d’une autre église à Gethsémani, à côté de Jérusalem, au VIème siècle, là où certaines traditions affirmaient que la Vierge avait fini sa vie terrestre.
Quoi qu’il en soit, souligne Mgr Michel Dubost, la fête fut étendue à tout l’empire par l’empereur Maurice (582 – 602), sous le nom de Dormition (Koimelis) de la Vierge Marie. Elle a toujours été célébrée le 15 août, et a toujours depuis revêtu une importance particulière en Orient: l’année liturgique s’ouvre quasiment avec le 8 septembre – fête de la naissance de Marie – et s’achève le 15 août, fête de son retour à Dieu. «Toute l’année liturgique est ainsi placée sous le patronage de Marie».
Comme souvent à cette époque, l’Eglise de Rome est en retard sur l’Eglise de Constantinople. «On est sûr que la fête de l’Assomption n’y était pas célébrée sous Grégoire le Grand († 604) mais qu’elle l’était en 690. On pense donc qu’elle fut instaurée par le pape Serge 1er (687 – 701), lui-même d’origine syriaque».
La fête fut longtemps accompagnée d’une procession nocturne, supprimée par le pape Pie V (en 1566), à cause des nombreux abus qui l’entouraient. Elle a longtemps été précédée d’un jeûne et, en différents diocèses de l’Europe du Sud, elle pouvait être le temps de la bénédiction du fourrage et de l’offrande des premières récoltes. (cath.ch/cef/rz/be)
Jacques Berset
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