Prêtre du diocèse de Paris depuis 2007, le Père Jean-Baptiste Arnaud a analysé de manière complète les homélies prononcées par Jean-Marie Lustiger lors des dix premières années de sa charge en tant qu’archevêque de Paris, entre 1981 et 1991. Il a aussi auditionné les enregistrements de ses interventions, archivés à l’Institut Jean-Marie Lustiger à Paris.
Dans un ouvrage intitulé Selon ta parole. La prédication de Jean-Marie Lustiger (Ed. Parole et Silence, 2016), le Père Arnaud revient sur la conception de l’homélie qu’avait le cardinal Lustiger.
«Il voulut montrer que l’homélie était un acte liturgique dans la messe. Selon lui, sa spécificité lui donnait sa force», explique le Père Arnaud. L’homélie, poursuit-il, était pour l’ancien archevêque de Paris une nourriture de Dieu qui partageait le «pain de sa parole».
Mgr Lustiger a le souci de faire sentir aux fidèles pourquoi l’eucharistie dominicale est le sommet de la vie chrétienne. Pour le prélat, dans la ligne du concile Vatican II, l’évêque a la mission de prêcher. Cette mission doit révéler au peuple de Dieu sa vocation à recevoir sa parole pour la transmettre au monde. Ainsi l’homélie est un révélateur du Corps du Christ aux croyants, qui fait de lui un peuple de prophètes.
L’homélie est une parole de circonstance, une parole dans l’histoire. Une manière de lire l’histoire prophétique qui reconnaît la façon dont Dieu agit dans l’histoire humaine, analyse le Père Arnaud. «Le cardinal y voit un acte d’interprétation de l’écriture dans les circonstances de la petite comme de la grande Histoire», détaille encore le Père Arnaud. Aussi bien lors d’événements dramatiques que les commémorations et les événements heureux. «C’est pour cette raison que les événements des années 1980 résonnent beaucoup dans ses homélies».
Pour Mgr Lustiger, le fait d’inclure beaucoup d’éléments historiques et d’éléments des enjeux de la vie de L’Eglise, doit permettre aux chrétiens de comprendre ce monde dans lequel ils vivent. Ces homélies constituent un envoi en mission. Il disait: «Ce que les prêtres et les évêques sont pour le peuple de Dieu, le peuple de Dieu l’est pour le monde». La dimension de formation et d’éveil de la conscience est donc présente dans ses sermons.
Le cardinal parisien incite les fidèles à être enraciné dans la parole de Dieu pour discerner les enjeux dans la société et le monde. Il s’agit de reconnaître les semences de Dieu et, par opposition, de dénoncer l’idolâtrie et l’athéisme présents dans la société.
«Il était conscient que des gens très différents étaient présents aux messes. Il s’adressait à tout homme, comme le Christ l’a fait en son temps: les croyants et les non croyants», souligne le Père Arnaud.
Un homme au fort caractère
Né à Paris le 17 septembre 1926 de parents juifs d’origine polonaise, Aron Lustiger est baptisé en 1940, puis entre au séminaire des Carmes. Il est ordonné en 1954. Avant de rejoindre le diocèse de Paris et d’être créé cardinal par Jean-Paul II en 1983, Jean-Marie Lustiger est nommé évêque d’Orléans, poste qu’il occupe de 1979 à 1981.
Pendant près d’un quart de siècle, de 1981 à 2005, l’homme au caractère fort transforme profondément le diocèse de Paris et marque durablement l’Eglise de France. Son influence dépasse largement les frontières de la capitale, et même de la France. Il est aussi l’homme-clé du succès des Journées mondiales de la jeunesse à Paris, en 1997. Figure intellectuelle , il est élu à l’Académie française en 1995, au fauteuil du cardinal Decourtray. (cath.ch/radvat/bh)
Bernard Hallet
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