Avec cette lettre apostolique en forme de Motu Proprio (du latin, «de son propre mouvement»), le pape met en exergue une nouvelle voie pour l’ouverture d’un procès en béatification ou canonisation: l’offrande de la vie.
Cette nouvelle catégorie se caractérise par la libre acceptation d’une «mort certaine et à court terme», par charité pour les autres. Il s’agit «d’une vraie, pleine et exemplaire imitation du Christ qui mérite donc l’admiration», souligne le pontife. Ce Motu Proprio débute d’ailleurs par la phrase de l’Evangile selon saint Jean (15,13) : «Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis».
Cette offrande de la vie correspond à une voie médiane entre les deux procédures existantes, à savoir le martyre et la reconnaissance de vertus héroïques. Contrairement au martyre, la mort n’est dans ce cas ni donnée par un persécuteur ni advenue par haine de la foi.
Pour aboutir à la béatification, la seule offrande de la vie ne suffit pas, précise le Motu Proprio. Il faut en effet trois autres conditions: l’existence de vertus chrétiennes vécues même «de façon ordinaire»; l’existence «d’une odeur de sainteté et des signes, au moins après la mort»; enfin, un miracle doit être obtenu par l’intercession de la personne concernée après sa mort.
Pourraient être concernés dans le passé ceux qui sont venus en aide à des malades de la peste par exemple, et qui sont morts à leur tour de cette infection. Ou plus récemment, cette jeune Italienne atteinte d’un cancer, Chiara Corbella, décédée le 13 juin 2012 après avoir refusé le traitement qui aurait attenté à la vie de l’enfant qu’elle attendait. Son procès en béatification est actuellement en cours à Rome.
Le Père Maximilien Kolbe – mort en 1941 à Auschwitz en «martyre de la charité», selon les mots de Jean Paul II (1978-2005) – aurait aussi pu être concerné par cette nouvelle catégorie. Ce Motu Proprio élargit ainsi les possibilités d’enquête pour des situations contemporaines. Par exemple, on peut imaginer que des volontaires, religieux ou laïcs, qui seraient décédés après avoir contracté un virus en portant secours aux malades lors de situations d’épidémies, pourraient voir leurs cas étudiés par la Congrégation pour les causes des saints, relève Radio Vatican.
La lettre apostolique Maiorem hac dilectionem -›Pas de plus grand amour’ vient ouvrir une quatrième voie pour la canonisation des saints, appelée ›l’offrande de sa vie’. Elle permet de valoriser «le témoignage chrétien héroïque», affirme dans L’Osservatore Romano du 11 juillet Mgr Marcello Bartolucci, archevêque de Bevagna, en Italie, ancien secrétaire de la Congrégation des causes des saints.
Il existait jusqu’à présent trois voies pour conduire à une béatification puis à une éventuelle canonisation: le martyre en haine de la foi, la reconnaissance de l’héroïcité des vertus, ainsi qu’une troisième, appelée ›équipollente’, par simple décision du pape. Cela avait le cas pour le jésuite Pierre Favre (1506-1546), canonisé par le pape François en 2013.
Cette nouvelle voie ressemble au martyre par le don de sa vie, mais non pas en ›haine de la foi’, plutôt par un «acte héroïque de charité». Lequel dépasse, selon Mgr Bartolucci, l’instinct naturel de conservation.
En outre, à la différence de l’héroïcité des vertus, l’offrande de la vie consiste pour le prélat en «un unique acte héroïque qui par sa radicalité, son caractère irrévocable et sa persistance jusqu’à la mort exprime pleinement l’option chrétienne».
Parmi les procédures de reconnaissance canonique, selon l’archevêque, s’il était possible de les classer par ordre, la première place reviendrait ainsi au martyre, puis à l’héroïcité des vertus, et enfin à l’offrande de sa vie jusqu’à la mort.
La réflexion sur cette nouvelle catégorie remonte à 2014, lors de l’assemblée ordinaire de la Congrégation des causes des saints. Elle a ensuite été portée à l’attention du pape, qui l’a encouragée par le biais d’une étude complémentaire. En juin 2016, un débat contradictoire s’est tenu au sein de la Congrégation, en présence de 15 experts.
Une majorité, mais pas l’unanimité, s’est prononcée en faveur de cette nouvelle voie. Tout en maintenant la nécessité d’un miracle pour aboutir à une béatification. La session plénière des cardinaux et évêques de la Congrégation a ensuite approuvé ces dispositions en septembre 2016, avant de les soumettre au pape en novembre. Le Souverain pontife les a lui-même entérinées le 10 janvier dernier, décision ayant conduit à la rédaction de ce Motu Proprio par la Congrégation.
Ainsi, conclut Mgr Bartolucci, avec cette décision la doctrine chrétienne sur la sainteté vient «s’enrichir de nouveaux horizons et opportunités pour l’édification du peuple de Dieu». (cath.ch/imedia/ap/xln/be)
Jacques Berset
Portail catholique suisse