Charlie Gard: le pape demande le respect du désir des parents

Dans le cas du petit Charlie Gard, un bébé britannique atteint d’une maladie incurable, le pape François a appelé à respecter le désir des parents de le maintenir en vie. L’enfant de 10 mois est sous le coup d’une décision de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) qui a autorisé l’arrêt des soins.

Les parents de l’enfant souhaitaient l’emmener aux Etats-Unis pour un traitement expérimental. L’hôpital londonien s’y était opposé, proposant au contraire de suspendre l’aide respiratoire du bébé. Après de longs mois de bataille juridique, la Cour européenne des droits de l’homme avait tranché en faveur de l’hôpital et de la justice britannique. Pour l’heure, l’hôpital a décidé de surseoir à la décision de stopper les dispositifs de maintien en vie. La vie Charlie Gard est désormais entre les mains des médecins et les parents n’ont pas reçu, pour l’heure, l’autorisation de le ramener chez eux pour vivre ses derniers instants.

«Le terminus de la culture de la mort»

Le Saint-Siège a publié le 2 juillet 2017 la déclaration du pape François, dans laquelle il exprime son «affection et émotion» et assure prier pour les parents. Le pontife souhaite en outre que leur désir d’accompagner leur enfant jusqu’à la fin soit respecté.

La conférence des évêques d’Angleterre et du Pays de Galles s’était opposée le 28 juin à l’arrêt de la nutrition et de l’hydratation de Charlie Gard, conformément à la doctrine de l’Eglise en la matière, qui considère que ce ne sont pas des traitements, mais des soins élémentaires.

De son côté, l’Académie pontificale pour la vie avait publié le 29 juin dernier un communiqué, signé de son président Mgr Vincenzo Paglia. Elle y affirmait que l’intérêt du patient était primordial, mais aussi que «nous devons accepter les limites de la médecine et éviter des interventions médicales agressives disproportionnées».

Le cardinal Carlo Caffara, président émérite de l’Institut Jean Paul II pour la famille, avait quant à lui déclaré le 28 juin au quotidien italien Il Giornale: «Nous sommes arrivés au terminus de la culture de mort. Ce sont les institutions publiques, les tribunaux qui décident si un bébé a ou non le droit de vivre. Y compris en allant contre la volonté des parents».


L’affaire Charlie Gard: un pas vers l’euthanasie des nourrissons?

La CEDH a donné tort, le 27 juin 2017, aux parents de Charlie Gard mois, qui demandaient qu’il ne soit pas «débranché» et puisse bénéficier d’un traitement expérimental «de la dernière chance» aux Etats-Unis.

La Cour de Strasbourg a considéré que les juridictions britanniques pouvaient légitimement estimer, au vu des rapports d’experts médicaux, qu’il n’est pas dans l’intérêt de l’enfant de continuer à vivre sous respiration artificielle, ni de recevoir un nouveau traitement expérimental. Selon les juges britanniques, ces soins ne lui procureraient aucun bienfait et l’enfant souffrirait considérablement.

En conséquence, l’hôpital britannique dans lequel Charlie est hospitalisé va pouvoir le garder contre la volonté de ses parents et arrêter sa respiration artificielle, jusqu’à sa mort naturelle.

Quel «intérêt supérieur» pour l’enfant?

L’identification de «l’intérêt supérieur de l’enfant» est au cœur de cette affaire, souligne Grégor Puppinck, docteur en droit et directeur du Centre européen pour le droit et la justice (ECLJ-Strasbourg), sur le site d’actualité bioéthique Gènéthique. Pour l’hôpital et les juges britanniques,l’intérêt du petit Charlie est de mourir pour ne plus souffrir. Pour ses parents, il est de tout tenter pour vivre. Sur ce point, les juges de Strasbourg estiment «évident» que l’intérêt des parents s’oppose à celui de leur fils. En d’autres termes, selon la Cour, c’est avec raison que les autorités britanniques ont estimé que les parents faisaient preuve d’une obstination déraisonnable préjudiciable à leur fils.

Un tuteur pour décider de sa mort

Une autre question est de savoir qui est le meilleur garant et juge de l’intérêt de l’enfant. En principe, ce sont ses parents. Mais pour contourner leur refus de l’arrêt des soins, les autorités britanniques ont désigné un tuteur pour représenter l’enfant. De façon surréaliste, la Cour a imaginé que le bébé a une «volonté» propre, celle de mourir, et qu’elle est exprimée par le tuteur, note Grégor Puppinck.

S’agissant de l’atteinte au droit au respect de la vie, la Cour s’est une nouvelle fois abritée derrière le constat de l’absence de consensus en Europe en matière de fin de vie et d’euthanasie pour accorder au Royaume-Uni une large marge d’appréciation quant à la protection de la vie des personnes malades, comme dans l’arrêt Lambert contre France du 5 mai 2015.

Selon Grégor Puppinck: «Ainsi, les parents du petit Charles qui l’accompagnent courageusement dans cette épreuve auront eu la tristesse de voir la Cour confirmer, en substance, qu’ils sont de mauvais parents, et qu’ils doivent se résoudre à laisser leur fils mourir, dans son propre intérêt».

Un inquiétant précédent

Plus généralement, la Cour souligne que cette affaire est «exceptionnelle». Cependant, le précédent qu’elle pose est grave, affirme le directeur de l’ECLJ, «car elle accepte le principe que la mort d’un enfant soit décidée, contre la volonté de ses parents, en raison de son état de santé». Il avertit que ce principe pourrait conduire à l’acceptation de l’euthanasie des nourrissons, qui est déjà pratiquée et tolérée dans certains pays européens. Il suffirait pour cela de l’appliquer à d’autres enfants porteurs de handicaps graves mais non mortels et qui pourraient être abandonnés à la mort par déshydratation et sédation. (cath.ch/imedia/ap/rz)

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

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