«Je suis théologien, mais je n’ai jamais été séminariste ni religieux, précise Naseem Asmaroo. L’évêque irakien Saad Sirop, visiteur apostolique pour les fidèles chaldéens en Europe, m’a sollicité pour m’occuper de la petite diaspora chaldéenne en Suisse. Avec ma femme, nous avons spontanément accepté. Comme l’Eglise chaldéenne admet l’ordination d’hommes mariés, je serai ordonné prêtre en novembre.» Mgr Charles Morerod, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF) soutient et encourage cette démarche. Tout en ayant la charge des catholiques chaldéens en Suisse, Naseem continuera ainsi d’œuvrer au sein de l’Eglise diocésaine comme prêtre bi-ritualiste.
Né en 1972 à Mossoul, au nord de l’Irak, Naseem Asmaroo a d’abord obtenu un diplôme d’ingénieur en mécanique avant de se tourner vers la théologie. Après un premier cycle à Bagdad, il a poursuivi sa formation jusqu’à une maîtrise en théologie à l’Université catholique de Louvain, en Belgique, entre 2007 et 2009. Etabli en Suisse où il s’est marié en 2010, il est depuis octobre 2010 assistant pastoral de l’unité pastorale (UP) Chasseron-Lac de la région d’Yverdon.
Les 180 à 200 familles chaldéennes catholiques vivant en Suisse, soit environ un millier de personnes, pourront ainsi bénéficier cette année encore des services d’un prêtre. Cette petite diaspora, venant principalement d’Irak, est arrivée en Suisse ces dernières décennies. Les premiers se sont installés il y a une trentaine d’années, les autres plus récemment.Une majorité ont fuit la guerre et les conflits au Moyen-Orient. Les régions de Winterthur, Berne et Montreux sont les trois principaux pôles d’installation. La première tâche de Naseem Asmaroo sera de mettre en place une structure et d’installer les bases d’une mission chaldéenne avec l’appui de la Conférence des évêques suisses et de sa commission Migratio.
«Mgr Morerod s’est montré très ouvert à la proposition de mettre sur pied une mission chaldéenne en Suisse, il nous a offert son aide», expliquait, en février dernier à cath.ch Mgr Saad Sirop. L’évêque irakien estime que les réfugiés arabes de confession chrétienne peuvent mieux s’intégrer dans les pays occidentaux que leurs compatriotes musulmans, en raison de la façon de concevoir leur religion. «Les chrétiens ont plus de flexibilité, et chez eux, l’interprétation des Ecritures est davantage soumise à la raison et au sens commun».
Les Chaldéens installés en Europe, qui parlent le soureth, un dialecte issu de l’araméen, sont quelque 85’000, avant tout en Suède, en Allemagne et en France. Des communautés sont également implantées en Belgique, au Danemark, en Norvège, en Finlande, en Hollande, en Autriche, au Royaume-Uni, en Suisse et en Grèce.
La majorité des Chaldéens vit désormais en diaspora, en dehors de ses lieux d’origine. Alors qu’ils sont aujourd’hui moins de 300’000 en Irak (ils forment dans ce pays 60% des chrétiens qui ne sont pas partis ces dernières décennies), les chrétiens chaldéens sont plus d’un demi-million dans le reste du monde, notamment en Europe, aux Etats-Unis, au Canada, en Australie et en Amérique du Sud. Ils sont encore présents en petites communautés au Moyen-Orient: Iran, Syrie, Liban, Israël, Egypte et Turquie.
Actuellement, les chaldéens restés en Irak vivent à Bagdad, mais la majorité a trouvé refuge au Kurdistan irakien, après la prise, en 2014, de la ville de Mossoul et surtout des villages chrétiens de la Plaine de Ninive par les terroristes de Daech. Si ces villages ont été libérés depuis l’automne dernier, ils ne sont de loin pas encore habitables.
L’Eglise chaldéenne catholique est une des Eglises catholiques orientales. Le chef de l’Eglise porte le titre de patriarche de Babylone des Chaldéens, avec résidence à Bagdad en Irak. Le titulaire actuel est Louis Raphaël Ier Sako, élu en 2013.
Les premiers contacts entre l’Eglise de l’Orient et l’Eglise de Rome se produisirent au XIIIe siècle au cours des ambassades dominicaine et franciscaine vers les Mongols lancées par le pape Innocent IV3. En 1340, les Chaldéens résidant à Chypre entrèrent en communion avec Rome. Cette union fut réitérée au Concile de Florence en 1445.
En 1552, des évêques indignés par la transmission héréditaire du patriarcat d’oncle à neveu refusèrent l’autorité du patriarche Simon VII Ishoyahb et élurent l’abbé Yohannan Soulaqa comme patriarche. Il fut envoyé à Rome pour demander la consécration épiscopale et la communion avec le Saint-Siège. Le pape Jules III l’ordonna évêque et le proclama patriarche des chaldéens sous le nom de Simon VIII Soulaqa.
Le retour de Simon VIII en Orient provoqua de vives querelles; lui-même fut exécuté en 1555 et sa communauté en grande partie réintégrée à l’Eglise assyrienne. Il s’ensuivit une période troublée où catholiques et nestoriens se combattirent avec acharnement.
Ce n’est qu’en 1830 que la situation se stabilisa, avec la confirmation par le pape Pie VIII de Jean Hormizdas comme patriarche de Babylone des chaldéens, sous le nom de Youhanan VIII Hormez, avec son siège à Mossoul. Les catholiques devinrent largement majoritaires parmi les assyriens, mais souffrirent lourdement du génocide de 1918, perdant 70 000 fidèles. Il en résulta un mouvement des Chaldéens vers le sud, et le siège patriarcal fut finalement transféré à Bagdad en 1950. (cath.ch/mp)
Maurice Page
Portail catholique suisse
https://www.cath.ch/newsf/ordination-diaconale-theologien-irakien-naseem-asmaroo/