En mars dernier, dans cette région oubliée de RDC, deux experts de l’ONU ont été enlevés puis retrouvés morts. La sécurité ainsi que la vie des habitants se trouvent menacées dans ces provinces où les milices de Kamuina Nsapu développent toujours davantage leur rhétorique aux accents mystico-religieux, relève ADC.
Le chef traditionnel Kamuina Nsapu a été tué en août 2016 lors d’une opération de police. Depuis l’automne dernier, ses miliciens s’en prennent aux forces de l’ordre et saccagent des bâtiments officiels. Plusieurs édifices de l’Eglise catholique ont également été pillés et incendiés et des religieux contraints de fuir et de se cacher en brousse, par mesure de sécurité. Ils ont reçu des menaces de morts au cas où ils sortiraient de leurs lieux de refuge.
«Nous ne savons pas comment tout cela va évoluer. Les miliciens attirent beaucoup de jeunes gens en leur faisant miroiter des ‘pouvoirs magiques’ dont ils seraient pourvus et qui les rendraient invulnérables. Ils sont malgré tout tués tragiquement. Toute la semaine, j’ai regardé des photos de ces jeunes abattus de sang-froid par des militaires armés jusqu’aux dents, sans pouvoir faire sens de ces criantes injustices», note l’un des partenaires d’ADC qui travaille dans la région.
Le conflit a éclaté dès avril 2016, après que des représentants de l’Etat ont refusé, pour des motifs politiques, de reconnaître la nomination du chef traditionnel Kamuina Nsapu. La mort de ce dernier au cours d’échauffourées avec la police a déclenché des affrontements opposant des milices, qui se battent au nom de feu leur chef, aux forces de sécurité et aux autorités.
«L’escalade de la violence a déjà coûté la vie à plus de 400 personnes. Des policiers ont été décapités. L’armée, elle, a fait feu sur des populations sans défense. Puis, en mars, vint l’enlèvement des experts de l’ONU dont le décès a affligé la communauté internationale. Pourtant, des centaines de Congolais avaient déjà trouvé la mort dans des circonstances d’une rare violence, sans que personne ne s’en émeuve», déplore ADC.
En RDC, une majorité de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et la malnutrition est un phénomène généralisé. Le partenaire que soutient Action de Carême au Kasaï central s’est donné pour objectif d’améliorer la qualité et la quantité de nourriture disponible. En janvier 2017, les collaborateurs de l’organisation partenaire d’ADC ont dû quitter la région, craignant que l’on attente à leur vie et à leur sécurité. En février 2017, ils ont pu y retourner à la faveur d’une accalmie.
Depuis mars 2017, les combats ont désormais gagné Kananga, la capitale provinciale. «Dans leur volonté de retrouver les rebelles, les forces de sécurité congolaises s’en prennent à d’innocents civils. Les fronts ne sont pas clairement démarqués. Outre des bâtiments publics, des églises ont été attaquées et détruites, obligeant de nombreux prêtres et religieuses à fuir pour chercher refuge dans d’autres villes», relève ADC dans un communiqué du 10 mai 2017.
La Conférence épiscopale nationale du Congo, la CENCO, a enjoint la communauté internationale à apporter une aide humanitaire aux régions affectées, mais aussi à faire pression sur les instances politiques congolaises pour qu’elles s’efforcent de trouver une issue à la crise. François Mercier, chargé de programme pour la RDC à Action de Carême, estime que «le moment est venu de mettre un terme à cette tragédie et de protéger la population. La crise politique qui souffle sur tout le pays finit aussi par compromettre notre travail de développement». (cath.ch/com/be)
Jacques Berset
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