Au cours de sa rencontre avec le patriarche copte orthodoxe d’Alexandrie Tawadros II, le 28 avril 2017 au Caire, le pape François a signé une déclaration commune avec le patriarche, qui affirme l’intention commune de respecter le baptême au sein de chaque confession chrétienne. Cette déclaration rappelle celle signée il y a 44 ans entre Paul VI et Chenouda III.
- Nous, François, évêque de Rome et pape de l’Eglise catholique, et Tawadros II, pape d’Alexandrie et patriarche du Siège de saint Marc, remercions Dieu dans l’Esprit Saint de nous offrir la joyeuse occasion de nous rencontrer une fois encore, pour échanger une fraternelle accolade et pour nous unir de nouveau dans la prière. Nous glorifions le Tout-Puissant pour les liens de fraternité et d’amitié existant entre le Siège de saint Pierre et le Siège de saint Marc. Le privilège d’être ensemble ici, en Egypte, est le signe que la solidité de notre relation s’accroît d’année en année, que nous grandissons dans la proximité, dans la foi et dans l’amour du Christ notre Seigneur. Nous remercions Dieu pour l’Egypte bien-aimée, cette «patrie qui vit en nous» comme aimait le dire Sa Sainteté Chenouda III, pour le «peuple béni de Dieu» (cf. Is 19, 25), avec cette antique civilisation des pharaons, avec l’héritage grec et romain, avec la tradition copte et la présence islamique. L’Egypte est le lieu où la Sainte Famille a trouvé refuge, une terre de martyrs et de saints.
- Notre profond lien d’amitié et de fraternité a son origine dans la pleine communion qui a existé entre nos Eglises au cours des premiers siècles et qui était exprimée de multiples manières par les premiers Conciles œcuméniques, jusqu’au Concile de Nicée en 325 et par la contribution du courageux Père de l’Église saint Athanase, qui a reçu le titre de «Protecteur de la foi». Notre communion était alors exprimée par la prière et par des pratiques liturgiques similaires, par la vénération des mêmes martyrs et saints, ainsi que par le développement et par l’expansion du monachisme, suivant l’exemple du grand saint Antoine, connu comme le Père des moines.
Cette même expérience de communion avant le temps de la séparation a une signification spéciale dans nos efforts pour restaurer la pleine communion aujourd’hui. La plupart des relations existant au cours des premiers siècles entre l’Eglise catholique et l’Eglise copte orthodoxe ont perduré jusqu’aujourd’hui, malgré les divisions, et ont été revivifiées récemment. Elles nous incitent à intensifier nos efforts communs afin de persévérer dans la recherche d’une unité visible dans la diversité, sous la conduite de l’Esprit Saint.
- Nous nous souvenons avec gratitude de la rencontre historique, il y a quarante-quatre ans, entre nos prédécesseurs, le pape Paul VI et le pape Chenouda III, dans une accolade de paix et de fraternité, après plusieurs siècles où nos liens mutuels d’amour n’étaient pas capables de trouver une expression à cause de la distance qui est survenue entre nous. La Déclaration commune qu’ils ont signée le 10 mai 1973 a représenté un jalon sur le chemin de l’œcuménisme, et a servi de point de départ à la Commission pour le dialogue théologique entre nos deux Eglises, qui a porté beaucoup de fruit et a ouvert la voie à un dialogue plus large entre l’Eglise catholique et toute la famille des Eglises orientales orthodoxes. Dans cette Déclaration, nos Eglises ont reconnu que, en lien avec la tradition apostolique, elles professent «une foi dans le Dieu Un Trine " et «la divinité de l’Unique Fils né de Dieu… Dieu parfait pour ce qui est de sa divinité, et homme parfait pour ce qui est de son humanité». Il a également été reconnu que «la vie divine nous est donnée et est nourrie en nous à travers les sept sacrements» et que «nous vénérons la Vierge Marie, Mère de la Vraie Lumière», la «Theotokos».
- C’est avec une profonde gratitude que nous nous rappelons notre rencontre fraternelle à Rome, le 10 mai 2013, et la proclamation du 10 mai comme le jour où chaque année, nous approfondissons l’amitié ainsi que la fraternité entre nos Églises. Cet esprit renouvelé de proximité nous a rendus capables de reconnaître une fois encore que le lien qui nous unit était reçu de notre unique Seigneur le jour de notre baptême. Car c’est à travers le baptême que nous devenons membres du corps unique du Christ qu’est l’Eglise (cf. 1 Co 12, 13). Cet héritage commun est la base du pèlerinage que nous faisons ensemble vers la pleine communion, tandis que nous grandissons dans l’amour et la réconciliation.
- Nous sommes conscients d’avoir encore un long chemin à parcourir dans ce pèlerinage, cependant nous nous souvenons de tout ce qui a été déjà accompli. En particulier, nous nous rappelons la rencontre entre le Pape Chenouda III et saint Jean Paul II, venu en Egypte en pèlerin durant le Grand Jubilé de l’an 2000. Nous sommes déterminés à suivre leurs pas, animés par l’amour du Christ le Bon Pasteur, profondément convaincus qu’en marchant ensemble, nous grandissons dans l’unité. Puissions-nous puiser notre force de Dieu, parfaite source de communion et d’amour !
- Cet amour trouve sa plus profonde expression dans la prière commune. Lorsque des chrétiens prient ensemble, ils en viennent à réaliser que ce qui les unit est plus grand que ce qui les divise. Notre désir d’unité est inspiré par la prière du Christ «que tous soient un» (Jn 17, 21). Approfondissons nos racines communes dans la foi apostolique en priant ensemble et en recherchant les traductions communes de la Prière du Seigneur et une date commune pour la célébration de Pâques.
- Alors que nous cheminons vers le jour béni où, enfin, nous serons rassemblés autour de la même table eucharistique, nous pouvons coopérer dans plusieurs domaines et démontrer d’une manière tangible la grande richesse qui nous unit déjà. Nous pouvons témoigner ensemble de valeurs fondamentales telles que la sainteté et la dignité de la vie humaine, le caractère sacré du mariage et de la famille, ainsi que le respect de toute la création, qui nous a été confiée par Dieu.
Face à de nombreux défis contemporains comme la sécularisation et la globalisation de l’indifférence, nous sommes appelés à offrir une réponse commune fondée sur les valeurs de l’Évangile et sur les trésors de nos traditions respectives. A ce sujet, nous sommes encouragés à entreprendre une étude plus approfondie des Pères orientaux et latins, et à promouvoir un échange fructueux sur le plan pastoral, spécialement dans la catéchèse, et pour un mutuel enrichissement spirituel entre des communautés monastiques et religieuses.
- Notre témoignage chrétien commun est un signe de réconciliation et d’espérance rempli de grâce pour la société égyptienne et pour ses institutions, un grain semé pour porter des fruits de justice et de paix. Puisque nous croyons que tout être humain est créé à l’image de Dieu, nous luttons pour la sérénité et la concorde à travers une cohabitation pacifique des chrétiens et des musulmans, en témoignant ainsi du désir de Dieu pour l’unité et l’harmonie de la famille humaine tout entière et pour l’égale dignité de chaque être humain. Nous partageons la préoccupation pour le bien-être et l’avenir de l’Égypte. Tous les membres de la société ont le droit et le devoir de participer pleinement à la vie de la nation, en jouissant de la pleine et égale citoyenneté et en collaborant pour bâtir leur société. La liberté de religion, incluant la liberté de conscience, enracinée dans la dignité de la personne, est la pierre angulaire de toutes les autres libertés. C’est un droit sacré et inaliénable.
- Intensifions notre inlassable prière pour tous les chrétiens en Egypte et de par le monde entier, et spécialement au Moyen Orient. Les expériences tragiques ainsi que le sang versé par nos fidèles persécutés et tués pour la seule raison d’être chrétiens rappellent à nous tous combien davantage l’œcuménisme du martyre nous unit et nous encourage sur le chemin de la paix et de la réconciliation. Car, comme l’a écrit saint Paul : «si un seul membre souffre, tous les membres partagent sa souffrance» (1 Co 12, 26).
- Le mystère de Jésus qui est mort et ressuscité par amour se trouve au cœur de notre cheminement vers l’unité. Une fois encore, les martyrs sont nos guides. Dans l’Eglise primitive, le sang des martyrs était la semence de nouveaux chrétiens. De même, de nos jours, puisse le sang des très nombreux martyrs être la semence d’unité parmi les disciples du Christ, un signe et un instrument de communion comme de paix pour le monde.
- Obéissant au travail de l’Esprit Saint, qui sanctifie l’Eglise, la garde tout au long des siècles, et la conduit vers la pleine unité – cette unité pour laquelle Jésus a prié: aujourd’hui nous, pape François et pape Tawadros II, en vue de satisfaire le cœur du Seigneur Jésus, ainsi que les cœurs de nos fils et filles dans la foi, nous déclarons mutuellement que, dans le même esprit et d’un même cœur, nous chercherons sincèrement à ne plus répéter le baptême qui a été administré dans nos respectives Églises pour toute personne qui souhaite rejoindre l’une ou l’autre. Nous confessons cela en obéissance aux Saintes Écritures et à la foi des trois Conciles œcuméniques célébrés à Nicée, à Constantinople et à Ephèse.
Nous demandons à Dieu notre Père de nous guider, dans le temps et par les moyens que l’Esprit Saint choisira, vers la pleine unité dans le Corps mystique du Christ.
- Laissons-nous, donc, guider par les enseignements et par l’exemple de l’apôtre Paul, qui a écrit: «Ayez soin de garder l’unité dans l’Esprit par le lien de la paix. Comme votre vocation vous a tous appelés à une seule espérance, de même il y a un seul Corps et un seul Esprit. Il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, au-dessus de tous, par tous, et en tous " (Ep 4, 3-6). Le Caire, 28 Avril 2017 (cath.ch/imedia/be)
Jacques Berset
Portail catholique suisse
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