Le Souverain pontife a prononcé un discours d’équilibre et sans concession, appelant à éduquer les jeunes générations à rejeter toute violence au nom de Dieu, la qualifiant de «falsification».
Après une entrevue en privé de 20 minutes environ au Palais présidentiel d’Heliopolis, au nord-est du Caire, avec le président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi, au cours de laquelle le pontife devait insister sur la protection des chrétiens, le pape s’est rendu à la mosquée-université d’Al-Azhar.
Il n’existe pas d’autre alternative à la «barbarie de la confrontation» que la culture de la rencontre, a prévenu le pontife au cours de son discours. «Pour s’opposer vraiment à la barbarie de celui qui souffle sur la haine, a-t-il poursuivi, il faut (…) faire mûrir des générations», qui répondent à la logique «incendiaire» du mal par la «croissance patiente du bien».
Pour faire face à ce «défi civilisationnel», le pape a recommandé de s’appuyer sur la dignité humaine et sur les dix commandements donnés à Moïse sur le Mont Sinaï – situé en Egypte – et notamment celui, central, du ›Tu ne tueras point’.
«La violence est la négation de toute religiosité authentique», a-t-il de nouveau rappelé. En tant que dignitaires religieux, «nous sommes tenus (…) de mettre en lumière les tentatives de justifier toute forme de haine au nom de la religion, et de les condamner comme des falsifications idolâtriques de Dieu».
«Répétons un ›non’ fort et clair à toute forme de violence», a martelé le pontife, «affirmons ensemble l’incompatibilité entre violence et foi», et «décrétons la sacralité de toute vie humaine», a-t-il invité les représentants religieux réunis pour cette Conférence pour la paix.
S’inspirant de la vision chrétienne de la laïcité, ce défi suppose encore, a ajouté le pape François, de ne pas «reléguer la religion dans la sphère privée», en «excluant Dieu de l’horizon», mais de ne pas non plus confondre les sphères politique et religieuse, sans les distinguer.
Il existe en effet un risque, a relevé le pontife, que «la religion soit absorbée par la gestion des affaires temporelles, et tentée par les mirages des pouvoirs mondains qui en réalité l’instrumentalisent». Dans l’islam, les deux sphères temporelle et spirituelle sont confondues, alors que le christianisme établit une distinction entre les deux domaines.
Le dialogue interreligieux, a expliqué le successeur de Pierre, n’est pas un «syncrétisme conciliant». Il doit suivre trois orientations fondamentales: le «devoir d’identité», sans ambiguïté ni complaisance; le «courage de l’altérité» et enfin la sincérité des intentions». Le dialogue ne peut être une stratégie pour réaliser des fins secondaires, a-t-il remarqué, mais doit être une «voie de vérité».
Avant son intervention lors de la Conférence pour la paix, le pape François avait rencontré en privé le cheikh Ahmad Al-Tayeb, Grand imam d’Al-Azhar, pendant une vingtaine de minutes. La mosquée d’Al-Azhar, construite en 969, un an après la conquête musulmane de l’Egypte par les Fatimides, est la plus ancienne université islamique. Gardienne de l’orthodoxie sunnite, elle accueille 300’000 personnes de l’ensemble du monde musulman.
Al-Azhar s’est opposée aux Frères musulmans lorsque ceux-ci ont voulu imposer leur idéologie politique radicale fondée sur l’islam, sous la présidence de Mohammed Morsi. Mais également à l’actuelle présidence d’Al-Sissi, lorsque celui-ci a demandé, il y a quelques semaines, une réforme du droit coranique, notamment en cas de divorce par répudiation, jusqu’à présent réduit à un simple mot prononcé trois fois. (cath.ch/imedia/ap/be)
Jacques Berset
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