La dernière prière dite pour les victimes a été celle du jour même du Dimanche des Rameaux. La suivante viendra après le Dimanche de la Résurrection. Sur tous les cercueils des victimes était écrit le mot «martyr», qu’on peut lire dans tous les communiqués de l’Eglise copte orthodoxe. Car pour l’Eglise, ils ont été tués en haine de la foi.
Le nombre des victimes de la plus sanglante attaque contre les chrétiens égyptiens s’élève désormais à 46. Les blessés sont près de 130, dont certains sont dans un état de santé très critique. L’attentat de dimanche matin visant la cathédrale de St-Marc d’Alexandrie a causé la mort de 17 personnes, dont 11 chrétiens et 6 musulmans, et fait des dizaines de blessés. L’attentat suicide de Tanta a quant lui causé la mort de 29 personnes et blessé une septantaine d’autres.
A Tanta, les corps des défunts ont été enterrés dimanche soir 9 avril après 23h, dans les 30 tombes creusées et construites en moins de 12 heures par des dizaines d’hommes. Le nouveau cimetière se trouve au rez-de-chaussée inférieur de l’église Saint-Georges. L’édifice nécessite de lourdes réparations suite à l’explosion qui l’a frappée pendant que les fidèles célébraient la messe.
A Alexandrie, les funérailles des défunts coptes se sont tenues en présence de centaines de fidèles au monastère de Mar Mina, à l’extérieur de la ville. C’est là qu’avaient déjà été enterrées une partie des 25 victimes de l’attentat contre l’église d’Al-Kidissine, où des fidèles assistaient à une messe pour le Nouvel An 2011.
La foule a également accompagné lundi 10 avril 2017 les cercueils de trois policières, stationnées devant les portes de la cathédrale et tuées lors de l’explosion du kamikaze. Selon le ministère égyptien de l’Intérieur, quatre policiers ont été tués et 14 autres ont été blessés lors des attentats.
Le pape Tawadros, chef spirituel de quelque 12 millions de chrétiens coptes orthodoxes, célébrait la messe dans la cathédrale St-Marc d’Alexandrie, considérée comme le siège alexandrin du patriarcat copte orthodoxe. Pour des raisons inexplicables, la messe s’était terminée 10 minutes plus tôt que prévu, et le chef de l’Eglise copte était déjà sorti au moment de l’explosion.
Suite à ce double-attentat, le président égyptien Abdel-Fattah Al-Sissi a tenu une réunion urgente de son Conseil national de défense et décrété l’état d’urgence pour une période de trois mois. Il a demandé à la communauté internationale de dévoiler et de condamner les pays qui soutiennent et financent le terrorisme au niveau international.
«Les Egyptiens ont fait échouer des plans de pays et d’organisations terroristes pour faire sombrer leur pays dans l’obscurantisme et le fascisme. C’est pour cela que l’on voudrait se venger d’eux par tous les moyens», a-t-il lancé à cette occasion. Le président a demandé une nouvelle fois aux responsables de toutes les institutions étatiques et gouvernementales de «changer le discours religieux» et de semer «l’amour et la tolérance de l’islam».
De son côté, le Père Rafic Greiche, porte-parole de l’Eglise catholique égyptienne, salue la grande solidarité et les condoléances sincères des musulmans de la rue envers les chrétiens touchés par le terrorisme. «Ils se sentent proches dans la douleur et l’émotion, c’est une participation sincère, cependant, si l’on considère les hautes institutions [musulmanes] comme l’Université d’Al-Azhar, elles n’ont pas voulu affirmer de façon claire que Daech est ›kouffar’, mécréant. Ils disent seulement que ce sont des musulmans qui n’ont pas pris le bon chemin!»
Les chrétiens demandent depuis longtemps à Al-Azhar, la plus haute autorité sunnite, de prendre enfin une position claire et nette, qu’elle dise une fois pour toute que les terroristes sont hors de l’islam, «mais Al-Azhar ne l’a jamais fait». En réalité, déplore-t-il, les hautes autorités musulmanes n’ont encore rien fait pour changer la mentalité des fondamentalistes, «qui ensuite se transforment en terroristes».
Le Père Greiche dit ne pas savoir quand les terroristes frapperont à nouveau: durant les fêtes de Pâques, lors de la visite du pape ou encore à un autre moment ? Mais dans une interview accordée le 11 avril 2017 à l’agence de presse catholique italienne AsiaNews, il se dit sûr et certain qu'»il y aura d’autres attaques».
Coupant court aux rumeurs sur une éventuelle annulation du voyage apostolique du pape François au Caire, les 28 et 29 avril prochains, Mgr Angelo Becciu, substitut pour les Affaires générales de la Secrétairerie d’Etat du Vatican, a confirmé que le pontife se rendrait bel et bien en Egypte aux dates prévues. (cath.ch/ll/asian/alahram/be)
Jacques Berset
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