Vaud: un ancien prêtre parmi les deux pasteurs licenciés

Deux nouveaux licenciements de pasteurs ont été enregistrés fin mars 2017 par l’Eglise évangélique réformée du canton de Vaud (EERV). Parmi ces deux ministres congédiés, un ancien prêtre catholique officiait encore à Lausanne en 2015.

«L’éviction de deux pasteurs noirs remet le feu à l’EERV», titrait le quotidien 24Heures lundi 3 avril 2017. Le jour précédent, une dizaine de paroissiens manifestaient leur colère à l’heure du culte. «Réhabilitez notre pasteur», pouvait-on lire sur leur banderole. Ils réagissaient au licenciement de Théodore Ntamack Ntamack, pasteur suffragant (à l’essai) à Froideville, qui a reçu son congé le 21 mars.

Parmi plusieurs éléments complexes, sa «manière de collaborer» est mise en cause dans la lettre de renvoi. Un motif remis sur le tapis lors de la séance de pacification, organisée par l’EERV mercredi soir à Cugy. Chaque partie a pu donner son point de vue dans cette soirée, durant laquelle un représentant du Conseil synodal a confirmé le licenciement du pasteur camerounais.

En poste depuis 6 mois

Du côté du Bussigny, le licenciement de Charles Nzila Makengo n’a pas fait beaucoup de bruit. «Je conteste les reproches qui me sont faits», s’est contenté de répondre le ministre dans le quotidien vaudois, sans préciser de quelle nature ils sont. Comme son collègue, Charles Nzila Makengo officiait aussi en tant que suffragant. Il a été admis par l’EERV en septembre 2016 pour desservir les paroisses de Bussigny – Villars – Sainte-Croix.

Lors de sa nomination, il s’est présenté à sa nouvelle paroisse sous forme écrite. «Ordonné prêtre en 1986, je suis détenteur d’un graduat en philosophie et d’une licence en théologie de l’Université catholique de Kinshasa», peut-on lire dans le Bonne Nouvelle de l’époque, l’ancien bulletin d’information de l’EERV. Il raconte comment il a été successivement formateur de séminaristes, professeur de théologie et curé de paroisse à Kinshasa, en République démocratique du Congo (RDC).

«Arrivé en Suisse en 1997 comme réfugié politique, je fus accueilli dans le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF) jusqu’en 2015», poursuit-il dans le même article. Dans les années 2000, il a en effet desservi la paroisse St-Aubin (NE), ainsi que dans le canton de Fribourg, avant d’être nommé curé in solidum en 2012 dans les paroisses Notre-Dame, St-Esprit et St-André, à Lausanne.

Mettre un terme au ministère sacerdotal

«Au cours de l’année 2015, certains bruits ont commencé à se faire entendre à son sujet, se rappelle un prêtre du diocèse LGF. Si bien qu’il est allé annoncer sa situation personnelle à l’évêque». Charles Makengo le confirme dans sa biographie: «L’année dernière, je formulai à Mgr Charles Morerod, évêque de mon diocèse d’accueil, mon intention de mettre un terme à mon ministère sacerdotal en vue de réorienter ma vie personnelle et professionnelle».

De fait, l’ancien prêtre explique qu’il est «en couple», qu’il a «conclu un mariage coutumier selon la règlementation congolaise» et qu’il a «trois enfants, âgés respectivement de 17, 15 et 13 ans, tous domiciliés en France voisine».

«Courageux d’avoir assumé»

«En tant que prêtre, il était irréprochable. Mais sa vie familiale était indéniablement non conforme avec la prêtrise et il l’a cachée pendant plusieurs années, déplore un prêtre du diocèse. Néanmoins, je le trouve courageux d’avoir finalement assumé sa situation, en allant l’annoncer auprès de l’évêque.»

En se racontant auprès de ses nouveaux paroissiens réformés, le pasteur Makengo écrivait: «Une certitude m’a toujours habité durant mon parcours, c’est celle d’être appelé à annoncer la bonne nouvelle du salut à mes frères et sœurs». Peut-être que cette certitude restera intacte, malgré l’épreuve à laquelle il fait face aujourd’hui.


Une période mouvementée pour l’EERV

Ces deux licenciements au sein de l’EERV font suite à six précédents qui ont défrayé la chronique ces dernières années. Daniel Nagy, mis à la porte en 2014, a perdu son procès aux prud’hommes: il songe à un éventuel recours. Daniel Fatzer, ancien pasteur de Saint-Laurent qui a fait une grève de la faim pour protester contre son licenciement durant l’été 2016, a intenté un procès au Tribunal d’arrondissement contre son ancien employeur. Bertrand de Felice a également actionné la justice des prud’hommes. Le Conseil synodal s’était excusé l’an dernier après le «licenciement regrettable» de Martin Hoegger. A noter que les deux pasteurs fraîchement licenciés n’étaient encore consacrés dans l’EERV, contrairement aux six autres. (cath.ch/gr)

Pierre Pistoletti

Portail catholique suisse

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