Chefs d’Etat «impeccables»

«Impeccable!» Le premier ministre français vient d’exiger cette qualité pour tout chef d’Etat. Il signait ainsi la démission du ministre de l’intérieur et visait François Fillon, candidat à la Présidence.

Tout chrétien sait que personne n’est impeccable, et que pareille exigence interdirait à quiconque l’exercice du pouvoir. Il voulait donc dire autre chose: plus que pour quiconque, on attend d’un haut responsable une plus grande moralité dans la gestion de ses affaires. Il a raison.

Car la conduite d’un pays est guidée par la raison humaine. Or celle-ci a deux fonctions: théorique et pratique. Théorique lorsque, en science et en philosophie, ses énoncés sont en accord avec les choses: «la terre tourne» est une vérité théorique, comme 2 et 2 font 4. C’est l’attitude du savant, dont on attend qu’elle soit rationnelle.

Mais on attend du chef d’Etat qu’il soit raisonnable, car il s’agit cette fois de raison pratique: que ses décisions soient équilibrées, rapides, justes et bienfaisantes, tenant compte des circonstances et des pressions extérieures; en un mot: avisées, et ordonnées au bien commun.

On peut être scélérat et bon mathématicien; on ne peut être scélérat et chef d’Etat.

Or la justesse d’un tel jugement pratique relève de la correspondance entre l’action décidée et la volonté droite. C’est cette droiture qui est essentielle à l’exercice du pouvoir. Ici les erreurs, les faiblesses, mais surtout les vices ou un mode de vie déviant influent directement sur les décisions, en les faussant.

Très grossièrement: on peut être scélérat et bon mathématicien; on ne peut être scélérat et chef d’Etat. C’est dans ce sens que les «affaires» s’invitent aujourd’hui dans toutes les campagnes politiques, et y jouent un rôle central, car on ne peut sans mensonge totalement séparer vie privée et vie publique. Cependant autre chose serait d’avoir commis ponctuellement une erreur, qui n’engage pas la personnalité profonde, autre chose d’avoir laissé le vice forger progressivement un caractère profond. Telle est la question qui plombe la candidature de François Fillon, et sa dernière dénonciation visant le Président Hollande est à l’évidence une erreur de jugement.

Cet élément va peser dans le choix des électeurs: si chacun peut certes balayer devant sa porte, tous ne sont pas pour autant candidat aux plus hautes fonctions.

François-Xavier Putallaz | 26 mars 2017

 

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