Ce penseur néo-conservateur, qui se disait ami de personnalités telles que Ronald Reagan, Margaret Thatcher voire du pape Jean Paul II, a milité entre autres pour concilier l’enseignement social catholique avec capitalisme. En 2016 et 2017, il était professeur à l’Université Catholique d’Amérique à Washington (CUA).
Dans son hommage, l’Université catholique rappelle que ce professeur de la Tim et Steph Busch School of Business and Economics de la CUA depuis août dernier était «l’un des penseurs les plus influents du pays et un mentor pour les professeurs et les étudiants en affaires».
Michael Novak, un ancien séminariste, est apparu au début des années 1960 comme un des penseurs libéraux les plus brillants du catholicisme, enthousiasmé par le Concile Vatican II. Ses essais journalistiques, rassemblés dans Une nouvelle génération: américaine et catholique (1964), et ses rapports sur le Concile Vatican II, dans The Open Church: Vatican II, Act II (L’Eglise ouverte: Vatican II, Acte II. 1964), reflète la vision d’un renouveau de l’Eglise.
Tournant le dos à son passé libéral (c’est-à-dire de gauche, selon le sens américain du terme «liberalism»), il a plus tard défendu des positions les plus conservatrices. De 1978 à 2010 a été l’un des cerveaux de la boîte à idées (think tank) néo-conservatrice American Enterprise Institute. Dans son livre The Spirit of Democratic Capitalism (1982) (traduit en français sous le titre Une Ethique économique: les valeurs de l’économie de marché, Paris, Cerf, 1987), Michael Novak affirmait que le système américain était le résultat de la fusion entre un système politique (démocratique), un système économique (libéral) et un système culturel (le christianisme) devenus inséparables. Pendant des années, il a proposé son «capitalisme démocratique» comme étant le système politique et économique le plus compatible avec le christianisme et en particulier avec le catholicisme.
Le penseur catholique, un des protagonistes de la «révolution reaganienne», était le co-fondateur de la revue néo-conservatrice Crisis Magazine, Il a vivement dénoncé la théologie de la libération, qu’il considérait comme marxiste. Il a essayé de convaincre le monde catholique que la seule solution était le «capitalisme de marché».
Il a décrit dans ses écrits le processus que lui et son groupe de réflexion a conduit à approcher et à essayer d’influencer le pape Jean Paul II, qui, à ses yeux, venant d’un pays communiste, ignorait ce qu’était l’économie capitaliste et le système de gouvernement démocratique.
Michael Novak s’était mis en tête d’expliquer au pape polonais les principes sous-jacents du capitalisme, affirmant que ce système était le plus compatible avec le christianisme. Mais il évitait avec précaution d’entrer en matière sur les condamnations – notamment du pape Jean Paul II – des mécanismes de la dette et de la monopolisation des ressources appauvrissant les pays du tiers-monde.
La lune de miel de l’influent penseur américain avec le Vatican va bientôt décliner, avec les critiques adressées en 2009 au pape Benoît XVI pour son encyclique Caritas in veritate, où il parle des «omissions», «insinuations douteuses» et «erreurs commises par inadvertance» par le pape.
Sa réaction sera encore plus dure après la publication, par le pape François en novembre 2013, d’Evangelii gaudium (La joie de l’Evangile). Cette Exhortation apostolique parle en effet d'»économie qui tue». Pour Novak, le pape François parle de l»’idolâtrie de l’argent», de la puissance excessive des marchés financiers et de la pauvreté «tout simplement parce qu’il est né en Amérique du Sud». Il ne comprendrait pas le capitalisme américain et européen.
Conseiller de l’administration Bush, il avait pris le contre-pied des évêques américains en prenant fait et cause pour l’invasion militaire de l’Irak, arguant du principe de la «guerre juste» contenu dans le catéchisme de l’Eglise catholique.
Michael Novak a été représentant des Etats-Unis à la Commission des Nations unies sur les Droits de l’Homme, puis ambassadeur auprès de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Il était aussi titulaire de la chaire George Frederick Jewett sur la religion, la philosophie et les politiques publiques à l’American Enterprise Institute. Il était titulaire d’un master en histoire et philosophie de la religion de l’Université Harvard, et d’un baccalauréat en théologie de l’Université pontificale grégorienne. (cath.ch/be)
Jacques Berset
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