Devenue une association, Osons l’accueil, qui travaille en partenariat avec la Direction de la santé et des affaires sociales du canton de Fribourg (DSAS) et avec ORS Service AG, chargé par le canton de l’accueil, de l’encadrement et de l’hébergement des requérants d’asile, a fait le point lundi 23 janvier 2017 à la Maison de paroisse de St-Nicolas.
En préambule, le chanoine Claude Ducarroz, dès le début dans l’aventure d'»Osons l’accueil» aux côtés du médecin retraité Bernard Huwiler, de Vaulruz, et de l’ancien conseiller d’Etat diderain Pascal Corminboeuf, a rappelé que les requérants arrivaient en Suisse après un périple ponctué de souffrances indicibles. Ces personnes sont prêtes à affronter tous les dangers parce qu’il ne leur reste souvent pas d’autres options dans leur pays ravagé par les conflits.
Et le prévôt de la cathédrale St-Nicolas de croire qu'»il reste encore beaucoup d’amour à réveiller dans les profondeurs de l’Helvétie», tout en saluant le fait que la rencontre avec les requérants d’asile a permis à la population fribourgeoise de s’ouvrir encore davantage aux autres. «Ces requérants d’asile ont contribué à élargir les dimensions de notre tente, nous leur disons merci, car c’est aussi un échange de cadeaux!»
D’ailleurs, le Chapitre cathédral a donné l’exemple: il avait accueilli à la Rue des Chanoines 13 une famille de requérants d’asile afghans, un couple et ses quatre enfants, de l’ethnie des Hazâras. Ce groupe d’obédience chiite est la cible des talibans et des djihadistes sunnites qui ont fait allégeance à l’»Etat islamique». Cette famille ayant désormais son propre appartement en ville, c’est une autre famille afghane avec un bébé qui occupera à la même adresse, dès le mois prochain, un appartement devenu libre.
Bernard Huwiler pense que l’accueil dans les familles facilite l’intégration dans la société suisse, tout en relevant qu’il est plus difficile de placer dans une famille des hommes seuls. «En général, cela se passe pourtant très bien, on n’a pas eu de mauvaises expériences!»
Pour Anastasia Ossipova, de l’ORS, qui visite les familles susceptibles d’accueillir des requérants, il faut effectivement éviter la promiscuité. Chaque situation fait l’objet d’un «matching», une discussion approfondie entre la famille qui accueille et les personnes à accueillir. Il faut tenir compte des différences de culture, mais les requérants sont avertis des règles en vigueur dans la société suisse, notamment le fait que les femmes dans ce pays ont les mêmes droits que les hommes… «On laisse quelques jours de réflexion aux familles et aux requérants avant tout placement», précise Claude Gumy, directeur opérationnel d’ORS.
Pascal Corminboeuf a souligné qu’il y a plusieurs manières de faire en matière d’hébergement des requérants: les camps, les centres d’accueil, mais aussi l’accueil dans les familles. Dans ce cas, tout se passe extrêmement bien, quand on prend la peine d’avertir les voisins: tout un village peut se mobiliser et se montrer solidaire, en offrant toutes sortes de services. Des bénévoles s’engagent par exemple pour l’apprentissage de la langue, pour l’accompagnement scolaire, les loisirs. Toute une dynamique s’installe…
Le juriste moratois Erwin Murer, professeur de droit émérite de l’Université de Fribourg, le confirme. Responsable pour Osons l’accueil de l’Espace Nord du canton, il relève que quand on rencontre personnellement des requérants d’asile, «l’idéologie disparaît». Et de citer le cas d’une famille où l’on vote traditionnellement UDC qui a accueilli des requérants «les bras ouverts».
Bernard Huwiler, qui a tenu à remercier l’engagement dès le départ de la conseillère d’Etat Anne-Claude Demierre, a lancé un appel pour que de nouvelles familles d’accueil s’annoncent, afin que l’action d’Osons l’accueil puisse se poursuivre. Pour mieux se faire connaître, l’association dispose désormais d’un site internet: www.osonslaccueil.ch.
Il a également rappelé que cette association à but non lucratif dépend des dons des privés. Le Rotary Fribourg-Sarine organise d’ailleurs un concert de bienfaisance en faveur des réfugiés mineurs non accompagnés accueillis dans le canton de Fribourg à l’aula de l’Université le 22 février 2017 à 20h00, avec la violoniste Rachel Kolly d’Alba et le pianiste Christian Chamorel.
En quinze mois, 40 personnes seules ont été accueillies dans les familles, ainsi que 5 couples et des familles (51 personnes). Ces requérants d’asile sont restés pour des périodes de 3 mois au minimum. Certains sont hébergés pour une durée indéterminée. Dans 4 cas seulement l’accueil a été interrompu et a duré moins de 3 mois.
La durée moyenne pour un accueil a été de 6,9 mois. Le nombre de personnes accueillies a régulièrement augmenté jusqu’à l’été 2016, et a régressé avec les vacances scolaires. Diverses raisons ont été invoquées, comme la fin de l’accueil pour les premières familles qui ont participé à l’action, la difficulté de placer des hommes seuls, mais également la baisse des arrivées de requérants d’asile en Suisse en 2016. S’ils étaient au nombre de 39’523 en 2015, ils ne sont plus que 25’441 en 2016, dont une grande majorité en provenance d’Afghanistan, d’Erythrée, de Syrie et d’Irak. En 2106, le canton de Fribourg a accueilli 2’105 requérants d’asile contre 2’048 en 2015.
Le recul global s’explique, note Osons l’accueil, par la fermeture de la Route des Balkans et diverses mesures dissuasives prises par la Confédération. D’autre part, les mineurs non accompagnés – ils sont actuellement une centaine dans le canton de Fribourg – ne peuvent pas être hébergés dans les familles.
Actuellement, 31 requérants d’asile sont accueillis dans 22 familles, dont une majorité (20 dans 16 familles) par le biais d’Osons l’accueil. Les autres se sont adressés directement à l’ORS ou à la DSAS. (cath.ch/be)
Jacques Berset
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