RIE III: les Eglises zurichoises demandent une mise en œuvre «socialement acceptable»

Les Eglises protestantes et catholique romaine dans le canton de Zurich ont des inquiétudes au sujet de la votation sur la réforme de la fiscalité des entreprises (RIE III), le 12 février 2017. Elles s’attendent à une baisse de recettes globale de l’ordre de 33 millions de francs. Tout en renonçant à émettre un mot d’ordre pour les votations, les Eglises ont appelé, le 14 janvier, à une mise en œuvre de la réforme «socialement acceptable».

La réforme de l’imposition des entreprises III (RIE III) supprime le taux d’imposition réduit dont bénéficient aujourd’hui les sociétés holding, les sociétés de domicile et les sociétés mixtes. Il s’agit surtout pour la Suisse de s’aligner sur les normes internationales en matière de lutte contre les paradis fiscaux, tout en conservant une fiscalité compétitive. Les adversaires de la réforme craignent qu’elle n’entraîne un important manque à gagner pour les collectivités publiques, y compris les Eglises reconnues.

Une réforme «compréhensible»

Tout en s’inquiétant des répercussions financières sur leurs institutions que représenterait une acceptation de la RIE III, les Eglises zurichoises expriment leur compréhension quant à la volonté de supprimer les privilèges fiscaux dont bénéficient certaines entreprises. Cet aspect est «nécessaire» et fondamentalement approuvé par toutes les forces politiques, affirment les Eglises dans leur communiqué conjoint.

Elles s’inquiètent néanmoins d’un climat politique de plus en plus rude, dans lequel des avancées telles que la solidarité sociale ne vont plus de soi. Selon les Eglises, cette évolution pourrait mettre en péril la cohésion sociale, surtout si la classe moyenne se voyait fiscalement pénalisée.

Au regard de ces considérations, les institutions religieuses renoncent donc à émettre un mot d’ordre pour les votations. Elles exhortent néanmoins à se rattacher, dans le cadre de ces débats, au modèle fédéraliste et à prendre une décision «soigneusement réfléchie», qui aille dans le sens de «la responsabilité chrétienne».

Où se feraient les économies?

Le Conseil d’Etat zurichois prévoit, dans le cadre de la réforme, une baisse de 18,2% de ses recettes fiscales. Sur cette base, l’Eglise catholique estime le manque à gagner à 17,5 millions de francs par an. Cela découlerait d’une baisse prévisible de 25% des recettes issues des impôts ecclésiastiques sur les personnes morales.

Le communiqué du 14 janvier précise que ce manque de revenus affectera négativement des secteurs des Eglises actifs pour le bien de la société dans son ensemble, tels que l’éducation, le social et la culture. Elles avertissent que si ces moyens venaient à manquer, de nombreux services fournis par l’Eglise seraient abandonnés. Les institutions n’entendent cependant pas réaliser des économies dans les secteurs soutenant les plus faibles. Elles attendent ainsi que le Conseil d’Etat mette en œuvre une réforme «socialement acceptable». «Cela implique que les Eglises ne soient pas forcées de retirer les moyens mis dans leurs activités au service de toute la société», souligne le communiqué.

Les institutions religieuses demandent ainsi que le fonds de compensation prévu dans certains cantons (dont Fribourg, Berne ou Bâle-Campagne) ne bénéficie pas qu’aux collectivités publiques, mais aussi aux Eglises reconnues.

Pas de mot d’ordre de la RKZ

Dans l’émission Hautes Fréquences du 15 janvier 2017, sur la RTS, le secrétaire général de la Conférence centrale catholique romaine (RKZ), qui fédère toutes les Eglises cantonales catholiques du pays, confirme que la réforme inquiète l’Eglise catholique zurichoise. Il rappelle que les impôts sur les personnes morales lui apportent presque la moitié de ses revenus. Sur la question des économies que cela impliquerait, il note que ce genre de décisions est du ressort des paroisses, où les impôts sont prélevés. Mais par rapport à ces contraintes financières «les Eglises sont conscientes de leur rôle social». Confirmant que la RKZ n’a pas non plus donné de consigne de vote, il relève que l’impact de la RIE III sera très différent selon les cantons. Il aurait ainsi été difficile d’adopter une prise de position globale. Daniel Kosch souligne également les incertitudes concernant les effets réels de la réforme, signalant qu’un statu quo dans la fiscalité pourrait inciter des entreprises à quitter le pays, ce qui causerait également des pertes financières. Le secrétaire général de la RKZ estime également qu’il n’est pas dans la tâche de l’institution de prendre position sur des questions de politique fiscale. En Suisse alémanique, les cantons de Berne et Soleure sont dans un cas de figure similaire à celui de Zurich.

En Suisse romande, seuls les cantons du Jura et de Fribourg ont un impôt ecclésiastique sur les personnes morales. Ils seraient donc potentiellement les plus touchés par la RIE III. (cath.ch/kath/bal/rz)

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

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