Né en Espagne, le Père Luis Espinal était arrivé en Bolivie en 1968, où il a réalisé un travail humanitaire et journalistique. Militant des droits humains, il avait combattu les successives dictatures militaires qui ont gouverné le pays dans les 1960 et 1970. Le Père Espinal avait été arrêté, torturé puis assassiné par des paramilitaires à La Paz, en 1980.
L’exhumation, sollicitée par le Ministère Public, avait comme objectif d’aider les investigations menées sur sa mort. L’intention des enquêteurs est de réaliser une autopsie, qui n’a pas été faite à l’époque du crime.
Dans un communiqué publié le 7 janvier, les représentants de la Compagnie de Jésus en Bolivie avaient manifesté son désaccord avec l’exhumation «en vertu du respect avec lequel devait être traité le corps, tant en vie qu’après la mort.» L’Ordre a également demandé que soient éclaircis les faits qui ont entraîné l’assassinat du Père Espinal.
Un groupe de jésuites s’est d’ailleurs présenté au Cimetière Général de La Paz le 9 janvier pour assurer une veille et manifester son rejet de l’exhumation, avant d’apprendre que cette dernière avait été suspendue par la Justice. Le Père Oswaldo Chirveches, le Superviseur Provincial, a exprimé ses « doutes sérieux » sur l’intérêt de cette exhumation pour l’enquête. D›après les jésuites, il existe en effet le risque que l’exhumation soit utilisée pour s’éloigner des objectifs de l’enquête. «Nous n’avons pas confiance!», a déclaré le Père Oswaldo Chirveches.
Des motifs bureaucratiques ont été officiellement évoqués pour justifier la suspension de l’exhumation. En effet deux anciens militaires au cœur de l’enquête de la mort du Père Espinal n’auraient pas été informés de cette décision. Parmi eux figure notamment Jaime Niño de Guzmán, ex-commandant des Forces Aériennes Boliviennes, considéré comme le commanditaire du meurtre.
Récemment, le Ministère des Relations Extérieures de la Bolivie avait rendu public des documents, jusqu’alors tenus secrets, concernant les agissements de militaires sous les différentes dictatures entre 1966 et 1979. Ces archives ont montré en particulier que le Père Espinal était espionné par les forces de sécurité boliviennes depuis 1972, au début du gouvernement dirigé par le Général Hugo Banzer. (cath.ch/jcg/bh)
Bernard Hallet
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