Taizé: Frère Alois explique le choix de Bâle

15’000 jeunes de Taizé se sont rassemblés, pour le tournant de l’année 2017, à Riga, en Lettonie. Le prieur de la communauté œcuménique, Frère Alois Löser, souligne l’importance de l’édition lettone et explique le choix de la ville de Bâle pour la rencontre de l’an prochain.

Qu’est-ce qui vous a particulièrement marqué dans cette rencontre de Riga?
Frère Alois: Le fait que cette rencontre ait été réalisable à Riga, dans cette ville relativement petite, en marge de l’Europe, est en soi marquant. L’Europe ne peut se développer que si l’on prend au sérieux et qu’on écoute également l’histoire des petits pays. Depuis l’indépendance des Pays baltes, il y a 25 ans, nous avons accueilli à Taizé de nombreux jeunes de cette région. Il y a deux ans, une rencontre pour les Pays baltes a déjà eu lieu à Riga. Maintenant nous avons pu voir qu’une rencontre européenne était également possible dans cette ville.

Les préparatifs pour la prochaine rencontre de ce type à Bâle ont commencé. Mais Bâle est une ville encore plus petite que Riga…
Nous avons choisi Bâle – même si elle n’est pas une ville liée à Luther – pour son statut de «cité de la Réforme». Au vu de la commémoration des 500 ans de la Réforme, en 2017, cela nous a semblé important. Nous voulons célébrer cette année comme celle de la réconciliation. De plus, Bâle est situé à la frontière avec la France et l’Allemagne. Au-delà de sa situation en Suisse, c’est sa qualité de ville très ouverte vers les autres pays qui a orienté notre choix. Ces régions transfrontalières sont des lieux où l’Europe peut particulièrement bien se développer dans un élan commun.

L’année 2016 a été perçue comme très mauvaise par l’opinion publique. Comment avez-vous vécu cette année et ses développements politiques?
Sur le plan personnel, 2016 a commencé à Homs, en Syrie. Dans la communauté de Taizé elle-même, nous avons perçu cette année comme celle de nombreux bouleversements. L’instabilité augmente et engendre des craintes chez beaucoup de personnes, ce qui est également compréhensible. Certaines choses que nous pensions être stables ont évolué.

Avez-vous un exemple?
Je pense à notre culture européenne, de laquelle nous avons toujours été si fiers. Cette image de nous-mêmes vacille, avant tout à cause de la migration et des importants flux de réfugiés. Nous sentons que nous devons, au vu de ces réalités en Europe, nous ouvrir. Les défis ne vont cesser de croître.

A Taizé, quel regard avez-vous sur cette situation?
Nous voulons y faire face et avons accueilli des familles de réfugiés de Syrie et d’Irak, ainsi qu’un groupe de jeunes du Soudan et d’Afghanistan et depuis peu des réfugiés mineurs de Calais. Ces derniers sont profondément traumatisés par l’expérience de leur fuite et la période passée dans ce bidonville du nord de la France. La vie dans de telles conditions peut détruire les personnes.

Dans ce contexte, quel est votre message pour 2017?
Nous avons besoin de racines profondes. Nous devons nous demander: qu’est-ce qui est important dans ma vie? Quelles sont mes priorités? Où sont mes appartenances? Ces questions ne doivent pas nous induire en erreur, elles ne doivent pas nous refermer sur nous-mêmes et ériger des frontières. Notre recherche de profondeur et de sécurité menace parfois de nous faire basculer dans le repli sur nous-mêmes et le nationalisme. Mais là-derrière se cache souvent une profonde nostalgie, à laquelle nous devons répondre. Pour cela, nous devons marquer un temps d’arrêt et approfondir notre foi.

Frère Alois Löser est âgé de 62 ans. Ce religieux catholique allemand est depuis 2005 prieur de la communauté œcuménique de Taizé, basée en Bourgogne. (cath.ch/kna/rz)

Raphaël Zbinden

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