Les pleins et les creux du consistoire

Au cours du consistoire ordinaire du 19 novembre 2016 le pape François créera 17 nouveaux cardinaux, confirmant l’internationalisation du collège des soutiens du successeur de Pierre.

Le pape François avait pourtant prévenu, fin septembre 2016, de son souhait d’un consistoire qui soit le reflet de «l’universalité» de l’Eglise, et pas seulement «européo-centré». Las, l’annonce des nouveaux cardinaux n’a pas échappé aux commentaires soulignant les pleins et les creux, les élus et les déchus, surtout en Occident, d’un tel choix crucial pour l’Eglise: l’actuel pontife aura nommé en trois ans 44 cardinaux électeurs, sur 120 au total – 56 l’ont été par Benoit XVI, et 21 par Jean Paul II.

Parmi les creux, on relève ici les grandes villes n’ayant pas obtenu de cardinal, comme Venise, Turin ou Philadelphie. Là, on commente le profil de nouveaux cardinaux – les pleins – à Chicago, Madrid ou Bruxelles, qui se différencient des combattants de la «guerre culturelle» à mener contre l’idéologie libertaire. Tout cela n’est pas forcément faux du reste: en septembre 2015, le pape François avait demandé aux évêques américains de ne pas utiliser un «langage belliqueux», mais de «conquérir l’espace du coeur des hommes», sans faire de la croix «un étendard d’une lutte mondaine».

Mais l’Eglise n’est pas un simple club politique. La préférence du pape François pour des sièges cardinalices périphériques, comme Bangui en Centrafrique, Dhaka au Bangladesh, ou encore la Papouasie-Nouvelle Guinée, rappelle que l’hémisphère sud abrite désormais les deux tiers des catholiques, et que l’Eglise y est en forte expansion.

Un rééquilibrage du Sacré Collège

Il s’agit d’ailleurs plutôt d’un rééquilibrage: en cas de conclave, l’Europe reste majoritaire, avec 45% des cardinaux, mais son influence est désormais contrebalancée par les non-Européens. De même, l’internationalisation du Sacré Collège n’est-elle pas totalement une nouveauté, puisqu’elle remonte en fait au pape Pie XII, qui avait créé 56 cardinaux de 25 pays. Cette règle non-écrite avait été poursuivie et accentuée par ses successeurs, jusqu’au pape François.

De la même façon, parmi les nouveaux cardinaux figure un seul membre de la Curie romaine, Mgr Kevin Farrell, préfet du tout nouveau dicastère pour les laïcs, la famille et la vie. Ce qui confirme la tendance affirmée sous le pontificat actuel de cardinaux de terrain, résidentiels et non d’hommes de bureau. Le nouveau collège cardinalice compte ainsi 28% de curiali – membres de la Curie –  contre 35% des électeurs du pape François en 2013.

Tout cela indique une tendance de fond déjà affirmée par le pape lors du précédent consistoire: la pourpre cardinalice n’est pas «une promotion, ni un honneur, ni une décoration», mais un service. Ce n’est pas la logique du monde, mais celle du Christ. En témoigne suffisamment le choix du coeur du pontife: lors du prochain conclave, parmi les 4 cardinaux non-électeurs (parce qu’ayant plus de 80 ans), figure un simple prêtre albanais, le Père Ernest Simoni. A 88 ans, ce dernier a passé plus de 25 ans dans les geôles communistes. (cath.ch/imedia/bh)

Bernard Hallet

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