Riche final des Rencontres Dorothée et Nicolas de Flue

Lors de la dernière journée des Rencontres Dorothée et Nicolas de Flue, le 6 novembre 2016, le philosophe Bertrand Vergely a fustigé le transhumanisme, cette volonté de modifier nos limites physiques jusqu’à l’immortalité. Il en appelé à une révolution de l’intelligence pour retrouver nos racines spirituelles.

L’assemblée réunie au théâtre du Martolet à Saint-Maurice, en ce dernier jour des 20e Rencontres Dorothée et Nicolas de Flue, a longuement applaudi Bertrand Vergely, Son intervention forte et convaincante a fait mouche.
«La tentation de l’homme-dieu», le titre de son dernier livre a concordé avec le désir des Rencontres: lier les questions sociales et la réflexion chrétienne. En plus d’une heure, le philosophe orthodoxe, enseignant à l’Institut Saint-Serge à Paris, a décrit avec compétence les dangers du transhumanisme naissant. Et il a appelé à l’espérance, fondée sur la foi, pour dépasser cette tentation.

Transhumanisme tentant

Le transhumanisme se pose en nouvel horizon idéologique. En Europe et aux Etats-Unis, des chercheurs se font les promoteurs de cette manière de concevoir l’humain. Ils veulent nous affranchir de nos limites physiques et morales et faire reculer les frontières de la vie intelligente.
Sur le plan spirituel, voici l’homme-dieu, doté de pouvoirs infinis grâce aux progrès des technologies et de l’informatique. Dans les années 2030, prévoient ces futuristes, le cerveau sera hybridé avec les nanotechnologies. Dieu, décrédibilisé, sera remplacé par «l’homme-cyborg».
Il faut reconnaître, admet Bertrand Vergely, que le transhumanisme est tentant. Le mariage entre l’homme et la technique n’est pas nouveau, les appendices techniques, prothèses ou implants dentaires, nous aident déjà à surmonter nos handicaps. Et la peur de la technologie n’est-elle pas à surmonter? Car peut-on vraiment arrêter le progrès? D’ailleurs le transhumanisme est une formidable «usine à créativité»…

Logique de violence

Mais, s’interroge Bertrand Vergely, «derrière cette apparence séduisante, a-t-on vraiment pensé ce projet?». La science ne perd-elle pas son âme dans ce type de recherches?

«Le transhumanisme cache une pure logique de violence»

Finalement, la révolution transhumaniste dote l’humain de moyens supplémentaires. Mais «des moyens pour des moyens» cachent «le pouvoir pour le pouvoir». Et donc une pure logique de violence.
Et, en voulant remplacer nos organes défaillants, «ne confond-on pas la vie éternelle avec le corps perpétuel?», se demande Bertrand Vergely. L’éternité, une expérience spirituelle inoubliable, est remplacée par la perpétuité: «On vole nos éternités et on nous trompe par rapport à celles-ci»

L’accès au cœur véritable

Pourtant nous pouvons déjà parvenir à la vie éternelle, respecter chacun et lui permettre de vivre en sécurité. Mais, pour cela, il faut «avoir foi dans l’existence d’un monde spirituel et dans la possibilité de réaliser ce monde spirituel dans notre monde». En résumé, avoir foi dans ce que le monde intellectuel a perdu.
Dan l’histoire de l’humanité existe notre filiation chrétienne: la divinité supérieure n’est pas un être impersonnel, mais personnel. Le Christ fait homme met l’homme en relation avec l’infini. La vie n’est pas seulement faite de visible, car le Christ donne accès au cœur véritable. «Nous venons de la vie, nous sommes là pour la vie et nous allons vers la vie».

L’intelligence du cœur

Mais, plaide Bertrand Vergely, il faut opérer un lâcher prise, mourir à son désir de pouvoir asservir le monde par son intellect prédateur. Là, «l’homme fait une rencontre fabuleuse avec une éternité qui lui est offerte et non qu’il se construit».
«Il faut donc retrouver l’intelligence du cœur»: c’est ce que nous demandons par la prière du Notre Père: «Ne nous laisse pas succomber à la tentation… de devenir des hommes-dieux, mais donne-nous un vrai désir profond, pour aller de l’homme-dieu au Dieu fait homme».

Révolution intérieure

Car notre époque met à nu une profonde vérité: l’homme qui ne repose pas sur des bases spirituelles est entraîné vers «un simulacre de salut et un simulacre d’humanité». Pourtant ce monde porteur de questions graves est aussi plein d’espoirs. Car la nécessité d’une révolution intérieure se fait de plus en plus consciente.
Les applaudissements nourris de la salle ont conforté ces propos. Les Rencontres Dorothée et Nicolas de Flue, se sont placées, une fois encore, dans le sillage de l’ermite du Ranft. Pour un avenir pacifié. (cath.ch/bl)

 

Bernard Litzler

Portail catholique suisse

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