La première fois que je rencontrais Pascal Fessard c’était au «Pied de cochon», un petit restaurant rustique et chaleureux, sur l’avenue de Pérolles à Fribourg. C’était au printemps 2013. Le lieu n’était pas choisi au hasard: «il y avait du Wifi». On pouvait donc plonger ensemble, par-delà l’écran de son ordinateur, dans l’aventure qui le passionnait: cath.ch. Il en était le capitaine, le «webéditeur» dans le jargon. Il y a investi toute sa compétence, mais aussi son temps, sa créativité et sa générosité. Entre ses mains, ce site allait rapidement devenir un incontournable de la presse catholique romande.
Ce n’était pas toujours facile de le suivre, Pascal, tant il débordait d’idées. Il avait toujours un coup d’avance quant à l’évolution de ce nouveau média. C’était un visionnaire qui, comme toute personne favorisée de quelque trait génial, souffrait parfois du rythme ordinaire dans lequel évoluait son univers professionnel.
Il gérait le site et son environnement dans leur ensemble, des petites tracasseries administratives aux questions techniques et stratégiques, sans oublier l’écriture. Pascal, c’était aussi une plume d’une fraîcheur frisant parfois l’impertinence. Il faut relire ses chroniques pour saisir l’acuité de sa pensée: précise, incisive parfois, mais toujours empreinte de respect et d’une foi sincère qui affleurait souvent sous un humour décapant.
Lancé en 2011, cath.ch allait rapidement atteindre sa phase de maturité. Trois ans plus tard, il devenait le point de jonction du travail de trois rédactions: l’Agence de Presse Internationale Catholique (APIC), le Centre Catholique de Radio et Télévision (CCRT) et Catholink, entité médiatique à l’origine du portail catholique suisse.
La maladie a surgi à ce moment-là, abrupte et inattendue. Ce cancer protéiforme allait tout chambouler.
Je me souviens de mon appréhension lorsque je l’ai revu peu après le diagnostic. A 30 ans, il arrive que l’on manque de ressources pour rejoindre le non-sens d’une maladie qui voile soudainement l’horizon. Pascal m’a aidé – et je ne dois pas être le seul – à lever le regard. Il n’était pas d’abord un malade, mais un époux, un père, un philosophe et un journaliste vivant. Nous avons passé des heures à parler de ce métier de journaliste qui nous rapprochait, de notre expérience professionnelle commune, du trépied ou de la caméra qui nous permettaient de retranscrire le monde qui nous entourait. Rien d’incongru dans ces échanges au plus près des petites choses du quotidien: Pascal était vivant jusqu’au bout. C’est ce que je retiens de cette vie que nous «célèbrerons» jeudi, selon le terme magnifique de son faire-part: ce n’est pas tant le faste ou l’extraordinaire qui fait la densité du quotidien, mais la capacité de déceler la grandeur des petites choses de la vie. Pascal en restera le témoin.
Pierre Pistoletti | 31.10.2016
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