Villars-sur-Glâne: Le centenaire des trois Nicolas

La célébration du centenaire de l’église de Villars-sur-Glâne, le 9 octobre 2016, a été placée sous le signe de la fraternité universelle entre les chrétiens. L’archimandrite grec melkite syrien Nicolas Antiba est venu rappeler que l’Eglise a besoin de ses «deux poumons», de l’Occident et de l’Orient, pour répandre le souffle de l’Esprit.

Soudain, en pleine messe solennelle, les applaudissements crépitent dans l’église quasi pleine de Villars-sur-Glâne. Les paroissiens ne peuvent exprimer autrement leur émotion face au geste imprévu et fort de sens de l’abbé Nicolas Glasson envers le prélat syrien, invité d’honneur des festivités du centenaire. Le vicaire épiscopal dans le canton de Fribourg pour les vocations offre à Mgr Nicolas Antiba une bougie de Nicolas de Flüe, venant directement du Ranft, la localité du canton d’Obwald où le saint a vécu une partie de sa vie.

Trois Nicolas se rencontrent ainsi pour souligner l’exigence chrétienne d’agir pour la fraternité et la paix. Le vicaire fribourgeois rappelle que saint Nicolas de Flüe a œuvré de façon décisive pour la paix au sein de la Confédération Suisse en développement. Un besoin de paix qui touche particulièrement le prélat syrien, né un 25 décembre à Alep, au nord de la Syrie. La ville est actuellement très durement touchée par la guerre. L’archevêque de Bosra et Hauran et Jabal al Arab, au sud-ouest de la Syrie, a été invité par l’abbé Philippe Blanc, notamment interpellé par le fait que sa paroisse est, comme celle de Villars-sur-Glâne, placée sous le patronage des saints Pierre et Paul. Nicolas Glasson a ainsi assuré qu’il prierait pour l’intercession de Nicolas de Flüe en faveur de la paix en Syrie, demandant à toute l’assemblée de faire de même.

Un «exercice redoutable»

En début de messe, le Père Philippe Blanc, curé modérateur de l’Union pastorale (UP) St-Joseph, a recommandé de poser sur cet anniversaire de l’église plus qu’un regard nostalgique. Il a appelé à ressentir de la reconnaissance pour toute la foi qui a marqué la paroisse pendant ces décennies.


Une paroisse dans l’histoire

[timeline:1u-wRaIpf7drIFigAlnXKPv3P9G1QPbYLXDMgI6-gD_s]

Nicolas Glasson, dans son homélie, a relié le centenaire à l’Evangile du jour, portant sur la guérison des dix lépreux, selon saint Luc. «Les paroissiens qui reviennent aujourd’hui sur les 100 ans de leur église, sont comme ce lépreux samaritain, qui retourne sur ses pas pour rendre grâce et contempler l’œuvre de Dieu», a estimé le vicaire épiscopal. Il a relevé que, s’il s’agissait d’une grande fête, l’événement constituait également un «exercice redoutable». Pour l’abbé, les paroissiens doivent en effet «s’engager à ce que nos successeurs puissent fêter les 200 ans», de l’église. Selon Nicolas Glasson, le jubilé ne sera réussi que «si nous restons dans la rencontre avec le Christ». «Allons jusqu’au bout, comme le samaritain est allé jusqu’à Jésus-Christ», a-t-il lancé.

Les «deux poumons» de l’Eglise réunis

Le vicaire épiscopal a souligné qu’en aidant les fidèles syriens, la paroisse était sur la bonne voie «pour faire en sorte que l’Eglise reste vivante». La quête était en effet destinée à soutenir l’archidiocèse de Bosra et Hauran. Des collectes ont déjà été réalisées à cet effet, et la paroisse de Villars-sur-Glâne entend faire un don d’en tout cas 15’000 francs à sa «consoeur» du Proche-Orient.

Mgr Nicolas Antiba a chaleureusement remercié les paroissiens pour leur sollicitude. Il a assuré que «la main de Dieu m’a conduit vers vous». Le prélat syrien a répété l’importance de la solidarité entre chrétiens, rappelant que «nous avons besoin les uns des autres». Il a insisté sur le fait que l’Eglise ne pouvait répandre le souffle de l’Esprit que par «ses deux poumons, celui de l’Orient et celui de l’Occident». Se référant aux précédents propos de l’abbé Glasson, il a souhaité que les deux paroisses «sœurs» fêtent ensemble le second centenaire de l’église.


Une nouvelle Maison de paroisse

L’archevêque syrien et les cinq autres prêtres fribourgeois présents ont ensuite emmené la foule de quelques centaines de fidèles devant la nouvelle Maison de paroisse, à deux pas de l’église. La célébration du centenaire de l’église a ainsi coïncidé avec l’inauguration officielle du bâtiment et la bénédiction de la scuplture trônant à l’extérieur. Mgr Antiba a eu l’honneur de consacrer à Dieu la Maison, ainsi que l’œuvre de métal forgé, réalisée par l’artiste fribourgeois François Aeby. Le Père Blanc, le président de paroisse Roger Chardonnens, le conseiller national fribourgeois Dominique de Buman, l’archimandrite et l’auteur de la scuplture se sont ensuite succédé au micro. Ils ont rendu hommage à l’œuvre d’art dont les diverses composantes représentent la «diversité dans l’unité des chrétiens» et la verticalité métallique, «le lien solide entre Dieu et les hommes». Ils ont également souhaité que le centre paroissial donne une nouvelle dynamique à l’esprit de communion dans la paroisse.

Parmi les nombreuses personnalités présentes lors de cette matinée, Carl-Alex Ridoré, préfet de la Sarine, a confié à cath.ch son émotion de participer aux festivités. Le magistrat fribourgeois originaire de Villars-sur-Glâne a en effet vécu des moments forts de son enfance dans cette église. «On se souvient des moments de joie, des confirmations, des premières communions, mais aussi des instants plus tristes, comme les enterrements. C’est un sentiment poignant de pouvoir aujourd’hui tourner une page sur tout cela».


Connaître ses racines «pour aller de l’avant»

Jusqu’à l’automne 2017, diverses autres manifestations auront lieu dans le cadre du jubilé de l’église notamment une journée «marche et spiritualité», une animation pour les enfants de la catéchèse et leurs familles, ainsi qu’un pèlerinage à Rome avec 150 paroissiens.

Le 20 novembre 2016, une exposition rétrospective pensée par l’historien Michel Charrière sera en outre vernie à la nouvelle Maison de paroisse. retraçant l’histoire de la paroisse sur les 100 dernières années. Elisabeth Piller, conseillère paroissiale et responsable du projet, explique à cath.ch qu’il ne s’agit pas de faire preuve de nostalgie, mais de la nécessité de «connaître ses racines pour aller de l’avant».


Trois questions à Mgr Nicolas Antiba

Quelle est la situation dans votre archidiocèse de Bosra et Hauran?
L’archidiocèse couvre une grande surface, et la situation y est très différente selon les endroits. Il est sûr qu’il y a des problèmes de sécurité, mais notre région est plus calme que d’autres. Il reste que certains groupes «rebelles» y effectuent parfois des actions. Ainsi la localité où se situe notre évêché a été bombardée. Les chrétiens se sentent néanmoins en danger et beaucoup ont déjà émigré.

Je voudrais préciser que j’appelle ces groupes «rebelles» parce que je ne trouve pas d’autre dénomination. Ce ne sont pour la plupart pas des Syriens. Alors je ne sais pas contre quoi ils viennent «se rebeller» dans notre pays.

Que faudrait-il faire, selon vous, pour mettre fin au conflit?
Moi, je suis né à Alep, et je connais des gens sur place. Je voudrais d’abord dire que les informations sur la responsabilité des bombardements qui sont diffusées en Occident sont très souvent exagérées, parfois fausses. Les Occidentaux suivent un agenda précis, celui de faire tomber Bachar el Assad, qui ne va pas forcément dans le sens de la paix en Syrie. Ce qu’il faudrait en premier lieu c’est que les grandes puissances arrêtent de se mêler de cette guerre, sur le terrain. Il est contreproductif de soutenir les groupes dits «modérés». Il n’y a pas de groupes modérés. La paix reviendra seulement si on coupe les munitions et les ressources à ces groupes. Plutôt que de bombarder, les grandes puissances devraient faire pression sur les pays qui financent et arment les «rebelles».

Les actions de soutien, comme celles de la paroisse de Villars-sur-Glâne sont importantes pour vous?
Absolument. Tout signe de solidarité entre chrétiens est essentiel. D’abord par la prière, car nous croyons à la force de la prière, c’est un soutien très fort pour nous. Avec les gens d’ici, qui prient pour la paix, nous pouvons créer des chaînes de parenté spirituelle.

(cath.ch-apic/rz)

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

https://www.cath.ch/newsf/villars-glane-centenaire-trois-nicolas/