Gender, voyages, Père Hamel: Le pape répond aux questions dans l’avion

A l’issue de son 16e voyage apostolique en Géorgie et en Azerbaïdjan, le pape François a répondu le 2 octobre 2016 aux questions des journalistes dans l’avion qui le ramenait à Rome. Il a notamment abordé la question du «gender», de ses voyages et de la béatification du Père Hamel.

Le successeur de Pierre est notamment revenu, de façon très libre, sur les enjeux de son voyage aux «périphéries» de l’Europe, sur sa déclaration sur la «guerre mondiale contre le mariage», et sur le procès en béatification du Père Jacques Hamel.

Gender, «guerre mondiale contre le mariage»

«L’image de Dieu n’est pas l’homme, mais l’homme et la femme, ensemble», a tout d’abord expliqué le pape. «Tous deux ne font qu’une seule chair quand ils s’unissent. Cela, c’est la vérité. (…) Le mariage est à l’image de Dieu. Quand on détruit cela, on détruit l’image de Dieu». Il s’agit pour le pontife d’une «guerre mondiale contre le mariage, et nous devons être attentifs à ne pas laisser entrer en nous ces idées».

«Ce que j’ai critiqué, a expliqué le pape, est le mal qu’il y a dans le fait de constituer la théorie du genre en doctrine. Un papa français m’a raconté qu’un soir, en famille  – ce sont des catholiques, pas des catholiques à l’eau de rose, mais des catholiques- il demande à son fils de 10 ans: ›que veux-tu faire quand tu seras grand ?’, ›fille !’ lui répond l’enfant».

Homosexualité

Le pape s’est alors rendu compte que, dans les livres du collège, on enseignait la théorie du genre, «et ceci est contre les choses naturelles». «Une chose est, pour une personne, d’avoir cette tendance, et même de changer de sexe, autre chose est de faire l’enseignement dans les écoles sur cette ligne. «C’est un endoctrinement pour changer les mentalités. C’est cela que j’appelle la colonisation idéologique», a-t-il réaffirmé.

«J’ai accompagné, dans ma vie de prêtre, d’évêque, mais aussi de pape, des personnes avec des tendances homosexuelles et aussi des pratiques homosexuelles. On s’est approché du Seigneur, certains ne peuvent pas, mais je n’ai jamais abandonné. Les personnes doivent être accompagnées comme Jésus les accompagnait. Quand une personne a cette condition et qu’elle arrive devant Jésus, Jésus ne se retire pas et ne dit pas ›va-t-en’ parce que tu es homosexuel».

Transsexualité

«J’ai reçu l’année dernière une lettre d’un Espagnol qui racontait son enfance. C’était une fille, mais elle se sentait garçon. Quand elle a eu une vingtaine d’années, elle a confié à sa maman qu’elle désirait faire une opération chirurgicale pour changer de sexe. Sa mère lui a demandé de ne pas le faire tant qu’elle serait vivante. Elle est morte et, ensuite, elle a fait l’intervention. C’était une fonctionnaire d’Etat, elle a changé son identité civile et s’est marié. Et elle a demandé à venir me voir, lui qui était elle, de pouvoir venir me voir avec son épouse. Je les ai reçus. Ils étaient contents. Dans le quartier où ils habitaient vivait un vieux prêtre de plus de 80 ans, il n’était plus curé en titre mais il aidait la paroisse. Mais quand le nouveau prêtre voyait ce couple, il leur criait: ›vous irez en enfer’. Quand ils rencontraient le vieux prêtre, lui leur disait: ’pourquoi tu ne te confesses pas, viens, et tu pourras communier’. Vous comprenez ? La vie est la vie. Et les choses doivent se prendre comme elles viennent. Le péché est le péché. Les tendances ou les déséquilibres hormonaux créent tant de problèmes et nous devons être attentifs. Ne pas dire, faisons de même, non, non ! Mais accompagner chaque cas, discerner et intégrer. C’est ce que ferait Jésus aujourd’hui. Mais, s’il vous plait, n’écrivez pas ›le pape va sanctifier les trans’, s’il vous plait, non ! Je vois d’ici les coupures de journaux. S’il y a des doutes sur ce que j’ai dit, il faut les éclaircir. C’est un problème de morale, c’est un problème humain et il faut le résoudre comme l’on peut, toujours avec la miséricorde de Dieu, avec la vérité, toujours avec le cœur ouvert».

Amoris laetitia

«Le dernier mot n’est pas la faiblesse humaine, ni le péché, c’est la miséricorde ! Les problèmes se résolvent avec quatre mots-clefs : accueillir, accompagner, discerner, et intégrer. «Le dernier mot n’est pas la faiblesse humaine, ni le péché, c’est la miséricorde !»

Procès de béatification du Père Jacques Hamel

Interrogé sur la raison pour laquelle il avait décidé d’accélérer le processus d’examen de la cause de béatification du Père Jacques Hamel, assassiné le 26 juillet dernier par un jeune musulman fanatisé dans sa paroisse de Saint-Etienne-du-Rouvray, en Seine-Maritime, le pape a répondu: «J’en ai parlé avec le cardinal Amato (préfet de la Congrégation des causes des saints). Nous allons faire les études, et lui donnera l’information finale. Mais l’intention est de faire les recherches nécessaires et de voir si les raisons de le faire (la béatification) sont réunies. Nous devons chercher les témoignages pour ouvrir le procès. Il ne faut pas perdre les témoignages. C’est très important parce que les témoignages tout frais, c’est ce que les gens ont vécu. Avec le temps, l’un meurt, l’autre ne se souvient plus».

Géorgie et Azerbaïdjan

«La Géorgie est merveilleuse, c’est une nation chrétienne», s’est enthousiasmé le pape François. «Il y a tant de foi en Géorgie (…) Le président a parlé de la très vénérable – ›antichissima’ – culture chrétienne de ce pays. Il y a tant de martyrs…»

Ensuite, «la deuxième surprise a été pour moi le patriarche orthodoxe: c’est un homme de Dieu». «Si la doctrine peut parfois nous séparer, il faut aussi voir comment on peut avancer ensemble sur le «chemin de l’unité». Avec des «hommes de bonne volonté», c’est possible, a-t-il répété à deux reprises. Mais il faut «prier», «c’est très important».

Vis-à-vis de l’Azerbaïdjan, et du conflit avec l’Arménie dans la région du Haut-Karabakh, l’unique voie est le «dialogue sincère, face à face». Car avec la guerre, «on perd tout». Certains me demandent «pourquoi suis-je allé aux périphéries de l’Europe, en Albanie, à Sarajevo, puis en Arménie, en Géorgie et en Azerbaïdjan, pays musulman où se trouvent au maximum 700 catholiques» ? La réponse est «que la réalité se perçoit mieux aux périphéries qu’au centre». Mais cela ne «m’empêchera pas d’aller dans des grands pays européens, comme le Portugal, ou la France…»

Autres voyages  en 2017

«Le problème est que nous avons suspendu cette année les visites ad limina pour l’année sainte. Je dois donc faire, l’année prochaine, les visites ad limina de deux années en une», a expliqué le pape. «Il y aura peu de places pour les voyages, mais j’irai au Portugal. L’Inde et le Bangladesh sont quasiment sûrs. L’Afrique ? Le lieu n’est pas encore certain. Cela dépend du climat et des situations de guerres. Je veux aussi aller en Colombie, mais quand tout sera sûr et certain et que le référendum soit un succès. Que l’on ne puisse pas aller en arrière, que l’on ne puisse pas faire des recours, et que la situation soit stable».

Chine

«Vous connaissez bien l’histoire de ce pays, et de l’Eglise là-bas: l’Eglise patriotique, l’Eglise cachée. Il y a de bonnes relations. On étudie, on se parle, il y a des commissions de travail. Je suis optimiste. Les musées du Vatican font une exposition en Chine, les Chinois en feront au Vatican. Beaucoup de professeurs vont enseigner là-bas dans les universités chinoises, tant de sœurs, de prêtres qui peuvent bien travailler là-bas. Pour ce qui est des relations entre la Chine et le Vatican, il faut fixer un accord. On parle lentement, mais les choses lentes vont toujours bien. Les choses faites dans la précipitation ne vont pas bien. Le peuple chinois a ma plus haute estime. L’autre jour, un congrès a eu lieu à l’Académie des sciences du Vatican, une délégation chinoise est venue, le président chinois m’a fait parvenir un cadeau à cette occasion. Nous avons de bonnes relations. Pour le voyage, je ne pense pas encore».

Prochain consistoire

«Les critères seront les mêmes que les précédents. Ils doivent venir de partout parce que l’Eglise est de partout. Je suis en train d’étudier les noms. La liste est longue, mais il n’y a que 13 places. Il faut faire un équilibre. Je veux que l’on perçoive l’universalité de l’Eglise et non pas seulement le centre européo-centré. Cela peut se faire à la fin de l’année, mais il y a la question de la fin de l’Année sainte, ou au début de l’année prochaine».

Campagne présidentielle américaine

«C’est un choix très difficile. Il y a des difficultés, chez l’un, il y a des difficultés chez l’autre candidat. Dans une campagne électorale, je ne dis jamais un mot. Le peuple est souverain. La seule chose que je dirais serait ›étudie bien les choses, prie, et choisis en conscience’. Ensuite je sors de ce problème et je parle d’une fiction, parce que je ne veux pas parler du problème concret: quand dans un pays, quel qu’il soit, il a deux ou trois candidats qui ne donnent pas satisfaction à tous, cela signifie que la vie politique de ce pays est peut-être trop politisée, et n’a pas trop de culture politique. Un des travaux de l’Eglise, mais aussi de l’université, est d’enseigner la culture politique».

Victimes des tremblements de terre

«Trois dates sont possibles, dont le premier dimanche de l’Avent. Je dois choisir. Je ferai cette visite seul, comme prêtre, comme évêque, comme pape, mais seul. Je veux écouter les gens et être proches d’eux».

Prix Nobel

«Tant de gens vivent pour faire la guerre, mais tant d’autres vivent pour faire la paix. Choisir est très difficile; en laissant de côté le Prix Nobel, je désirerais qu’il y ait une déclaration pour les civils morts sous les bombes. L’humanité devrait faire quelque chose pour les victimes des guerres». (cath.ch-apic/imedia/ap/be)

 

 

 

Jacques Berset

Portail catholique suisse

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