Avant les obsèques du prélat prévues le 13 septembre, la police chinoise multiplie en effet les mises en garde et les arrestations au sein de la communauté ‘clandestine’ du diocèse, rapporte Eglises d’Asie, l’agence des Missions étrangères de Paris. On est ainsi sans nouvelles de l’évêque ‘clandestin’ Mgr Shao Zhumin nommé en 2007 par Rome évêque coadjuteur du lieu. A ce titre, d’un strict point de vue canonique, il devrait prendre la succession de Mgr Zhu.
Les autorités chinoises ont, semble-t-il, anticipé la question. Le décès de Mgr Zhu, étant donné son état de santé, était prévisible et la police a pris les devants. En effet, Mgr Shao Zhumin a disparu depuis le 23 août dernier. Les observateurs pensent qu’il a été placé au secret par les autorités pour l’empêcher de présider la messe de funérailles de Mgr Zhu, une présence qui marquerait aux yeux de tous son autorité sur l’ensemble du diocèse.
Depuis l’annonce du décès de Mgr Zhu, des prêtres ‘clandestins’ du diocèse ont par ailleurs été interpellés. D’autres ont reçu des coups de téléphone leur intimant l’ordre de ne pas assister aux obsèques de Mgr Zhu.
Ce climat de tension reflète la situation particulièrement complexe de l’Eglise à Wenzhou, ville où la présence chrétienne, protestante et catholique, est notablement importante. Elle s’est trouvée au centre de la campagne d’abattage des croix placées au sommet des édifices religieux menée par les autorités depuis près de trois ans. Dans le diocèse les ‘clandestins’ sont estimés à quelque 80’000 fidèles, les ‘officiels’ étant moitié moins.
Décédé dans sa 89e année, Mgr Vincent Zhu Weifang appartient à cette génération de prêtres chinois qui a connu la Deuxième Guerre mondiale, la guerre civile et l’emprise communiste dans le pays. Né le 10 décembre 1927 dans un district voisin de Wenzhou, Zhu Weifang a été ordonné prêtre en octobre 1954, cinq ans après la prise du pouvoir par Mao Zedong. Emporté par la persécution qui prépare la mise en place de l’Association patriotique des catholiques chinois, il est condamné à la rééducation par le travail et passe près de seize ans en camp, de 1955 à 1971. Il retournera en prison de 1982 à 1988 avant de recouvrer la liberté et de poursuivre son ministère de prêtre.
En 2007, l’évêque ‘clandestin’ de Wenzhou, Mgr Lin Xili, qui avait été ordonné à l’épiscopat dans la plus grande discrétion en 1992, est très âgé et affaibli par la maladie. En vue de favoriser l’unité entre les deux communautés ‘clandestine’ et ‘officielle’ de ce diocèse très dynamique, Rome décide de nommer comme évêque de Wenzhou le Père Vincent Zhu Weifang, membre du clergé ‘officiel’, avec comme coadjuteur le Père Shao Zhumin, membre du clergé ‘clandestin’. Le Père Zhu était alors déjà âgé de 80 ans
Bien qu’évêque ‘officiel’ Mgr Zhu Weifang pouvait se montrer indocile envers le pouvoir. En juillet 2015, afin de protester contre la campagne d’abattage des croix, le vieil évêque avait publié, avec 26 de ses prêtres, une lettre ouverte pour appeler «les catholiques chinois et toutes les personnes animées par un sens de la justice à ne pas rester silencieux et à élever la voix ensemble». Evoquant une persécution qui se renforce, le prélat écrivait : «En tant que citoyens chinois, nous aspirons à une démocratie plus complète et à un véritable Etat de droit.» Avec plusieurs prêtres et derrière une banderole, Mgr Zhu était allé porter sa lettre aux autorités provinciales. (cath.ch-apic/eda/mp)
Maurice Page
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