Les églises sont toujours pleines! Même en semaine, à la messe du matin, toutes les places assises sont occupées. Et le dimanche, il y a foule.
«Massif». En Pologne, on se sent plus proche des États-Unis ou de l’Amérique latine que de l’Europe occidentale en matière de pratique religieuse et de prédominance de la culture catholique dans le quotidien. Le catholicisme est visible partout. Ici, on peut voir un crucifix à l’Assemblée, au tribunal ou à l’hôpital. 92% des Polonais se déclarent croyants. De source ecclésiastique, nous savons en revanche que la pratique dominicale avoisine les 41%.
«Ancré». Il est significatif que 100% des citoyens polonais demandent l’enterrement religieux. Dire «je suis chrétien», chez nous, c’est normal. Longtemps refuge de la liberté d’expression au cours des vicissitudes de l’histoire d’une nation oppressée, l’Eglise a été le lieu de la résistance et de l’expression de l’identité polonaise. C’est dans les églises qu’on lisait des poèmes, qu’on chantait la nation polonaise au cours du siècle d’occupation prussienne, autrichienne et russe qui a rayé la Pologne de la carte au xixesiècle. En Pologne, l’Église a été une grande force dans la lutte pour la liberté.
«Divers». il ne faut pas se figurer un catholicisme monolithe traditionaliste! Il y a dans le pays autant de sensibilités que de places à prendre dans l’Église. La porte est ouverte à tous, progressistes, traditionalistes, chrétiens à fibre sociale ou scientifique… Cette variété de la communauté catholique en Pologne est une explication possible de la permanence de la pratique religieuse dans ce pays.
La Pologne a élaboré un modèle d’autonomie des sphères religieuse et publique différent de la loi de séparation de l’Église et de l’État que connaît la France depuis 1905. La constitution polonaise prévoit la neutralité de l’État pour ce qui concerne la sphère religieuse ou philosophique. L’État est autonome face à l’Église et inversement, comme le stipule le droit suprême de la république de Pologne. Mais c’est parce que les pouvoirs publics de la république de Pologne font preuve d’impartialité en matière de convictions religieuses et d’opinions philosophiques, assurant leur libre expression dans la vie publique, qu’il y a un enseignement de la religion dans toutes les écoles publiques. En même temps, la constitution prévoit la tolérance. Nul n’est obligé d’assister au cours de religion. Parler d’un État confessionnel, c’est une contre-vérité. Dans notre histoire, jamais l’Église ne s’est opposée aux désirs de la société polonaise façonnée au fil de son destin multinational et multi-religieux par une forte tradition de tolérance.
Karol Wojtyla et le cardinal Stefan Wyszynski restent indépassables! Mais la Pologne catholique offre encore aujourd’hui de magnifiques figures. Permettez-moi d’évoquer trois belles figures: le compositeur et musicien Krzysztof Penderecki, dont l’œuvre diffuse une forte inspiration religieuse — au cinéma, sa musique a habillé L’exorciste de William Friedkin, Katyn d’Andrzej Wajda ou Shutter Island de Martin Scorsese —; le prêtre cosmologiste Michal Heller, dont l’immense travail scientifique a été récompensé par le prix Templeton, un million de dollars; le cardinal Stanislaw Dziwisz, archevêque de Cracovie. Cet homme discret a été le secrétaire particulier de Jean-Paul II pendant vingt-sept ans. C’est aujourd’hui un leader incontesté.
Au début de la Pologne libre, dans les années 1980, la pratique dominicale avoisinait les 52%; elle est de 40% aujourd’hui. De sorte que la Pologne peut se féliciter d’être l’Église d’Europe où la pratique est la plus massive. La continuité reste une ligne de force. Il semble qu’en Pologne, la sécularisation ne soit pas une étape nécessaire de l’histoire démocratique. Mais il ne faut pas non plus se reposer sur des lauriers. Le revers de la médaille, ce sont les 60% de la population qui ne vont pas à la messe chaque dimanche. C’est la même réalité que le chiffre record de 40% de pratiquants réguliers. Il faut être vigilant. Une «conversion pastorale», telle que la désire le pape François est nécessaire. Il faut aussi dynamiser la foi surtout parmi les jeunes générations, car elles fréquentent moins les églises que leurs parents.
Ce sera la rencontre avec deux papes! Avec le pape François, physiquement présent, et avec Jean-Paul II, l’archevêque de Cracovie, né à moins de trente kilomètres de là, à Wadowice. L’idée des JMJ est venue des expériences pastorales du cardinal Karol Wojtyla. Il était toujours entouré de jeunes et très investi dans le développement d’une pastorale pour les jeunes. Pour la Pologne, cet événement préparé dans toutes les paroisses du pays est un moment de grand réveil religieux de la jeunesse.
La basilique de la Divine-Miséricorde
À Lagiewniki, quartier sud de Cracovie, le sanctuaire de la Divine-Miséricorde est un sanctuaire en plein essor. La basilique de la Divine-Miséricorde est un vaisseau futuriste où plus de trois millions de visiteurs viennent chaque année du monde entier contempler l’icône de Jésus miséricordieux révélée au monastère où vécut et mourut sainte Faustine Kowalska (1905-1938). Favorisée d’une intimité spéciale avec Jésus, cette religieuse a écrit un Petit journal qui est le livre polonais le plus traduit.
Le centre Jean-Paul II
Le site d’une ancienne usine Solvay, où Karol Wojtyla a travaillé pendant la Seconde Guerre mondiale comme ouvrier, a été transformé depuis peu en sanctuaire Jean-Paul II. Une très belle architecture moderne abrite un vaste lieu de dévotion à saint Jean-Paul II, devenu archevêque de Cracovie en 1958. On y voit notamment exposée, dans une vitrine, une soutane pontificale ensanglantée. C’est l’habit blanc que portait le pape polonais le 13 mai 1981, jour de l’attentat qui a failli lui coûter la vie.
Nowa Huta
Ce quartier très vivant de Cracovie, vaste cité ouvrière construite par les communistes, occupe cinq des dix-huit arrondissements de la ville. Célèbre lieu de résistance chrétienne, Nowa Huta n’avait aucun lieu de culte, de sorte que le futur pape Jean-Paul II célébrait les messes de Noël en plein air.
Czestochowa
Dans cette ville peu distante de Cracovie, le monastère des Pauliniens de Jasna Gora conserve depuis 1382 une icône de la Vierge, la «Vierge noire», patronne de la Pologne et objet du plus grand pèlerinage du pays. C’est vers elle qu’avaient convergé les jeunes lors des JMJ de 1991, animées par Jean-Paul II, lui-même fidèle pèlerin de Czestochowa.
«Extrait du Bulletin N° 194 du CFRT/Le Jour du Seigneur»
Pierre Pistoletti
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