Giusep Nay, qui fait partie du Groupe consultatif d’experts sur la liberté de religion ou de conviction de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), porte un regard critique sur cette affaire. Il est d’avis que la décision des autorités scolaires bâloises manque de bases juridiques.
Dans un premier temps, Monica Gschwind, directrice de l’Instruction publique du demi-canton de Bâle-Campagne, avait décidé de dispenser les deux adolescents musulmans de serrer la main de leur enseignante et ceci dans le but d’assurer «un bon fonctionnement de l’enseignement».
Selon une analyse juridique réalisée à la demande du Département de l’éducation de Bâle-Campagne, les écoles du canton peuvent exiger la poignée de main. Cette expertise relève que tant l’intérêt public concernant l’égalité entre femmes et hommes que l’intégration des personnes étrangères l’emportent largement sur la liberté de croyance des élèves.
Pour l’ancien juge fédéral, interrogé dans la dernière édition du journal «Schweiz am Sonntag», dans ce domaine, le droit n’est pas le bon endroit pour trouver une solution. Il faut par conséquent faire montre de pédagogie. Et également dans le cadre de l’intégration, c’est le devoir des professionnels de faire comprendre aux élèves que ce n’est pas leur façon de voir les choses qui peut seulement prévaloir: c’est le point de vue de l’enseignante qui est déterminant !
Les élèves et leurs parents doivent se mettre à la place de l’enseignante. Ils devraient alors se rendre compte qu’elle ne se sent respectée que s’ils manifestent leur respect de la façon dont elle le comprend, c’est-à-dire en lui serrant la main. Il est cependant d’avis que dans l’affaire de Therwil – s’agissant de croyances religieuses strictes des élèves, respectivement de leur père – il faudrait considérer ce fait comme un cas exceptionnel et ne pas exiger qu’ils serrent la main de leur enseignante.
Il propose que, dans ce cas, les élèves montrent leur respect à l’enseignante d’une autre manière. L’ancien juge fédéral pense que le recours au droit n’est pas le lieu adéquat pour trouver des solutions quand il s’agit de façons de penser patriarcales. Il estime cependant que pour la grande majorité des musulmans, l’obligation de serrer la main de l’enseignante n’est pas un tabou. Elle ne représente pas pour eux, contrairement aux élèves concernés et à leur père, une grave ingérence dans leur liberté de croyance.
Du côté de la Fédération suisse des communautés israélites (FSCI), le secrétaire général Jonathan Kreutner déclare à la «Schweiz am Sonntag» que les juifs orthodoxes qui refusent de serrer la main des femmes ne sont pas concernés, parce qu’ils fréquentent des écoles privées. Mais des juifs modérés profitent également de règles spéciales, par exemple de dispenses les jours de fêtes religieuses. Les communautés juives craignent un regain des conflits si la vie en commun des religions est de plus en plus marquée par des sanctions au lieu du dialogue. (cath.ch-apic/be)
Jacques Berset
Portail catholique suisse